Gambie: Funérailles à Banjul du 1er président, Sir Dawda Jawara, mort à 95 ans

Afriquinfos Editeur
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Sir Dawda Jawara (g), premier président de la Gambie indépendante, reçoit son homologue guinéen Ahmed Sékou Touré à Banjul, en janvier 1960 (AFP).

BANJUL (© 2019 AFP) – Les Gambiens ont rendu hommage jeudi au premier président de la Gambie indépendante, Sir Dawda Jawara, décédé mardi à 95 ans, lors de funérailles d’Etat à Banjul , en présence du chef de l’Etat Adama Barrow qui a salué « un éminent homme d’Etat » ayant « ouvert la Gambie au monde ».

Sir Dawda Jawara a été président de Gambie de 1965 à 1994, quand il a été renversé lors d’un putsch mené par Yahya Jammeh. Il est décédé mardi à Fajara, à 13 km de la capitale Banjul. Le président Barrow a décrété une semaine de deuil national, du 27 août au 2 septembre, dans cette ex-colonie anglaise partiellement enclavée dans le Sénégal. Le président Jawara « a mené une vie remplie. Il a été un panafricaniste et un humaniste, un éminent homme d’Etat qui a ouvert la Gambie au monde, avec tact et sagesse », a déclaré M. Barrow, lors des funérailles à l’Assemblée nationale, marquées par 21 coups de canon. Le cercueil, recouvert du drapeau gambien, avait auparavant été transporté par des officiers de l’armée. Il a ensuite été acheminé dans une mosquée pour la prière mortuaire, suivie de l’inhumation peu après 19H00 GMT dans la cour de l’Assemblée nationale, selon un journaliste de l’AFP.

Les funérailles ont eu lieu en présence de nombreuses personnalités gambiennes, de membres de la famille de M. Jawara dont ses deux veuves et du ministre des Forces armées du Sénégal voisin, Sidiki Kaba. Né en 1924 dans une famille mandingue musulmane, à Barajally (centre) où son père était commerçant, M. Jawara, vétérinaire formé au Ghana, puis en Ecosse, était entré en politique en 1960 en devenant le leader du Parti progressiste du Peuple (PPP). Sa carrière gouvernementale, commencée avec le portefeuille de ministre de l’Education en 1960, lui avait permis de devenir Premier ministre en 1962. C’est à ce poste qu’il négocia et proclama en 1965 l’indépendance de la Gambie, colonie anglaise depuis 1888. Son principal succès aura sans doute été d’avoir préservé cette indépendance en refusant l’intégration à son puissant voisin, le Sénégal, en restant jusqu’en 1970 sous la tutelle de la Couronne britannique qui l’anoblira. Il ne devait mettre fin à cette tutelle qu’en 1970, lorsque la Gambie est devenue une république. Sir Dawda a ensuite été élu régulièrement, tous les cinq ans, avec une nette majorité, d’abord par l’Assemblée nationale, puis au suffrage universel après la réforme constitutionnelle de 1982.

Un an avant cette réforme, son régime, considéré comme l’un des plus démocratiques du continent, avait survécu à un coup d’Etat, grâce à l’intervention de l’armée sénégalaise. Le président Jawara a ensuite formé en 1982 avec son homologue sénégalais Abdou Diouf une confédération, la Sénégambie, dissoute en 1989. En juillet 1994, il avait été finalement renversé lors d’un putsch mené par Yahya Jammeh. Quittant Banjul à bord d’un navire de guerre américain, il avait obtenu d’abord l’asile au Sénégal. Il s’était ensuite installé à Londres avec sa famille, dont ses deux femmes, pendant une dizaine d’années, avant de rentrer définitivement en Gambie en 2004. Il s’était réinstallé dans sa résidence de Fajara, dans un quartier chic près de Banjul, confisquée au lendemain du putsch en même temps que d’autres biens, tous restitués après l’amnistie dont il a bénéficié en 2001. Depuis cette amnistie, il avait annoncé son retrait de la vie politique et effectué un séjour au pays en 2002, au cours duquel il avait été reçu par Yahya Jammeh.

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Dawda Jawara avait assisté le 18 février 2017 aux cérémonies marquant à la fois l’anniversaire de l’indépendance et l’investiture en Gambie d’Adama Barrow, après le départ en exil en Guinée Equatoriale de Yahya Jammeh, épilogue d’une crise à rebondissements de six semaines. Les défenseurs des droits humains réclament l’extradition de M. Jammeh, dont le régime est accusé de tortures systématiques d’opposants et de journalistes, d’exécutions extrajudiciaires, de détentions arbitraires, de disparitions forcées et de viols.