Les dirigeants de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) se sont réunis ce 28 mai à Lagos, au Nigeria, pour célébrer le 50e anniversaire de l’organisation, alors que la région subit de profonds bouleversements sécuritaires et diplomatiques, le durcissement des droits de douane américains et une baisse de l’aide internationale.
Au cours de la dernière décennie, les coups d’État et les tentatives de déstabilisation politique, nourris par une défiance populaire croissante envers les élites politiques, ont ébranlé près de la moitié des pays fondateurs de la CEDEAO, mettant à mal la démocratie et fragilisant les liens entre pays voisins. Le départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger a porté un coup dur à la crédibilité et à l’influence régionale de l’organisation, selon plusieurs experts.

« C’est une atteinte majeure à la capacité de la CEDEAO à incarner les espoirs et l’optimisme de ses débuts », estime Kwesi Aning, spécialiste de la coopération internationale au Centre international de formation au maintien de la paix Kofi Annan, basé à Accra (au Ghana). « Cela reflète un niveau de leadership désastreux parmi les dirigeants de la CEDEAO », ajoute-t-il.
Parmi les premières économies du continent africain, pays le plus peuplé de la région, le Nigeria qui assure actuellement la présidence tournante de la CEDEAO était attendu comme la « force stabilisatrice » de l’organisation, mais il est « vacillant » aujourd’hui, selon un Rapport publié ce 27 mai 2025 par le Cabinet de conseil en risques SBM Intelligence. « Ses crises internes, notamment la mauvaise gestion économique, l’instabilité politique, l’insurrection de Boko Haram et les échecs de gouvernance, ont considérablement réduit sa capacité à diriger », indique le Rapport.
– Troubles et commerce –
Les répercussions des troubles sur le commerce entre pays sont flagrantes. Avant la détérioration des relations entre le Nigeria et le Niger voisin, suite au coup d’État à Niamey en juillet 2023, des commerçants nigérians expédiaient quotidiennement plusieurs camions de céréales depuis le marché de Dawanau, dans l’État de Kano, au nord-ouest du Nigeria, vers le Niger. Si le volume de céréales fournies depuis Kano vers le Niger n’a guère changé, les coûts ont augmenté.

Plusieurs commerçants et transporteurs interrogés par l’AFP à Kano ont indiqué que les taxes sur les marchandises nigérianes importées au Niger ont quintuplé, alimentant une forte recrudescence de la contrebande à travers des frontières poreuses. « Nous payions l’équivalent de 100.000 nairas (environ 56 euros) de droits d’importation par camion avant la sortie de la CEDEAO, désormais c’est environ 500.000 nairas (près de 278 euros) », se lamente Aliyu Abubakar, un chauffeur de camion de 40 ans.
© Afriquinfos & Agence France-Presse