Zambie: Le Sommet de Paris restructure 6,3 milliards de $ sur la dette extérieure, bol d’air à Lusaka

Afriquinfos Editeur
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Hakainde Hichilema, l'opposant élu à la présidence zambienne, lors d'une conférence de presse à son domicile de Lusaka, le 11 août 2021.

Le soulagement mais aussi l’attente d’un quotidien meilleur ont gagné les rues de Lusaka vendredi 23 juin, au lendemain d’un accord pour restructurer la dette colossale de la Zambie, une réussite pour le Président Hakainde Hichilema élu sur la promesse de relancer l’économie.

Le Président français Emmanuel Macron (g) salue son homologue zambien Hakainde Hichilema, à son arrivée au palais de l’Elysée à Paris pour un dîner officiel, le 22 juin 2023.

La dette du pays d’Afrique australe est évaluée à 32,8 milliards de dollars dont 18,6 milliards auprès de créanciers étrangers notamment la Chine, selon le ministère des Finances. La Zambie été le premier pays africain à faire défaut sur sa dette en 2020 après l’irruption de la pandémie du coronavirus.

Les créanciers se sont accordés jeudi 22 juin pour restructurer 6,3 milliards sur la dette extérieure, en marge du « Sommet pour un nouveau pacte financier à Paris« . L’accord prévoit notamment « d’importantes extensions d’échéance et une réduction des taux d’intérêt« , a précisé le Gouvernement zambien dans un communiqué. Dans le quartier d’affaires du centre de Lusaka, des Zambiens matinaux se regroupaient pour une lecture collective des journaux: « C’est enfin fait« , en titre du Zambia Daily Mail contre un trait tiré par le Times of Zambia sur le mot « Renflouement« .

Père de quatre enfants et chef d’une petite entreprise d’engrais, Mooya Chilala, 44 ans, se réjouit de voir enfin arriver « une bonne chose pour le pays« , avec cet accord que le Gouvernement précédent a tenté d’obtenir en vain « pendant des années« . La dette publique avait explosé sous la présidence d’Edgar Lungu, battu en août 2021 par l’éternel opposant Hakainde Hichilema, autrefois malmené et même emprisonné. Lungu est accusé de s’être perdu dans de lourds projets d’infrastructures et d’avoir surendetté le pays auprès de la Chine (4,1 milliards) qui construit aéroports, routes, écoles, usines et même postes de police en Zambie.

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L’accord décroché jeudi 22 juin après deux ans d’âpres négociations devra encore être mis en œuvre par des accords bilatéraux avec chaque créancier. Mais il constitue déjà une étape-clé pour débloquer un plan d’aide de 1,3 milliard de dollars sur trois ans obtenu en 2022 auprès du Fonds monétaire International (FMI). « Il est impératif d’établir des échéanciers clairs pour la mise en œuvre« , a déclaré H. Hichilema en clôture du Sommet à Paris.

– « Rien ne changera » –

Réunis en assemblée plénière vendredi 23 juin, les parlementaires ont chanté en chœur l’hymne national pour célébrer la conclusion de l’accord mais l’opposition restait sceptique. « J’espère que cette restructuration se traduira par une réduction des prix de la farine de maïs et le développement d’infrastructures« , a lancé Emmanuel Tembo, élu du Patriotic Front, estimant qu’un effacement pur et simple de la dette aurait été une vraie victoire.

L’accord « va permettre au Gouvernement d’orienter des ressources vers des domaines sociaux (…) tels que l’éducation gratuite« , a assuré jeudi soir à l’AFP une source proche de la Présidence zambienne. Mais dans le centre de Lusaka, Veronica Mwale, marchande ambulante de 22 ans et mère d’un enfant, reste indifférente. Derrière son étal d’oranges, elle explique d’un ton las que pour elle, « rien ne changera » tant que le prix du « mealie meal« , porridge de maïs et plat de base, ne cessera d’augmenter.

Une partie de la dette extérieure zambienne est par ailleurs détenue par le FMI, la Banque mondiale et les banques multilatérales de développement, et ne peut être restructurée. D’autre part, les créanciers privés (6,8 milliards de dollars) doivent encore accepter de « faire un effort comparable à celui qu’on a fait« , a souligné une source au Gouvernement français, évoquant une des clauses de l’accord.

Le FMI et la Banque mondiale ont salué une restructuration « agile et efficace« , qui contribuera « à rétablir la croissance » en Zambie, gros producteur de cuivre, qui a souffert ces dernières années des fluctuations des cours du métal.