Bénin, Bissau, Guinée: Le Rwanda infuse son soft power et modèle de gouvernance à résultats

Afriquinfos Editeur
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Kigali © 2023 Afriquinfos)- Le Rwanda serait-il le nouvel eldorado en terme de coopération Sud-Sud? C’est ce que laisse penser la récente tournée du Président rwandais dans trois pays ouest-africains. Au Bénin, en Guinée-Bissau et Guinée, Paul Kagamé s’est vu dérouler le tapis rouge par des dirigeants en admiration pour sa personne, mais aussi pour ce qu’il a réussi à impulser comme gouvernance dans son pays. Un modèle de gouvernance dont ils veulent s’inspirer, et bénéficier de l’expertise rwandaise en matière sécuritaire et numérique.

Paul Kagamé a la cote en Afrique de l’Ouest. C’est en guest star qu’il a successivement foulé les sols du Bénin, de la Guinée-Bissau et de la Guinée. A chaque étape, il a laissé un peu de Kigali mais n’est pas reparti les mains libres non plus. A Bissau, le Président rwandais s’est vu décerner la « médaille Amílcar Cabral », la plus haute distinction en Guinée-Bissau et au passage, a signé des accords dans différents secteurs. Notamment le commerce, l’éducation, le tourisme et les services aériens bilatéraux.

Les deux Présidents se sont accordés pour axer leurs interventions sur la jeunesse de leurs pays: «Comme le reste de l’Afrique, la ressource la plus importante que possèdent le Rwanda et la Guinée-Bissau est une population jeune. Notre devoir est d’assurer une stabilité qui nous permette de créer des environnements favorables pour que nos jeunes puissent utiliser leurs compétences et atteindre leur plein potentiel», a déclaré le Président Kagame.

Au Bénin, première étape de sa tournée, la sécurité était le maître-mot. Le nord du Bénin est depuis peu la cible d’attaques meurtrières menées par des hommes armés. Une menace que le pays tente de contenir hors de ses frontières afin d’éviter la prolifération de cette menace dans le reste du pays.

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Le Rwanda de Paul Kagamé a déjà fait preuve de son expérience dans ce domaine au Mozambique et en Centrafrique. Ce pays a reçu un soutien de l’armée rwandaise pour contrer l’insurrection armée qui sévit au nord du Mozambique. ‘’Nous sommes prêts à travailler avec le Bénin pour prévenir tout ce qui se peut produire dans la zone autour de ses frontières’’, a déclaré Paul Kagamé.

Des soldats rwandais en ont été déployés en Centrafrique, au Mali, au Darfour, mais aussi en Somalie. Bien qu’ayant un effectif assez réduit, 35.000 hommes, l’armée rwandaise s’est spécialisée dans les missions de maintien de la paix et exporte donc son expertise. Ce sera donc le cas au Bénin où la coopération militaire sera dans un premier temps axée sur la formation et l’encadrement.

Cette diplomatie militaire permet à Kigali d’étendre son influence dans la région, mais aussi de renflouer ses caisses.

Soft power en branle 

Au-delà de la coopération militaire avec le Bénin, le Rwanda souhaite également se positionner sur le marché du numérique en Afrique de l’Ouest. En République de Guinée, les gouvernements rwandais et guinéen ont signé un protocole d’entente entre les deux pays «dans le domaine des postes et télécommunications, et des technologies de l’information et de la communication, la digitalisation de l’État et du numérique en général», informe Mory Sanda Kouyaté, le ministre guinéen des Affaires étrangères. A Conakry, on ne cache pas son admiration pour le modèle rwandais: ‘’Du génocide de 1994 à la réunification du pays, le Rwanda a su se relever, s’assumer et se reconstruire avant de s’affirmer comme une référence africaine. C’est en cela que le modèle rwandais fascine le Colonel Président Mamadi Doumbouya , a indiqué la Présidence guinéenne, dans un communiqué.

Pour Paul-Simon Handy, directeur Afrique de l’Est de l’Institut d’études de sécurité à Addis-Abeba, le soft power mis en branle par Paul Kagamé vise plusieurs objectifs dans un contexte régional où Kigali n’a pas pignon sur rue: ‘’Le Rwanda, c’est aussi ce pays dont la conduite de la diplomatie est contestée dans son entourage immédiat, dans les Grands Lacs, notamment au Congo. Et, apporter cette diplomatie militaire, rapporte des points. Mais les relations se sont tendues avec des alliés comme les États-Unis.

Donc, il y a certainement le mode de financement du modèle rwandais à changer. Et je pense que cette diplomatie militaire est aussi pour le Rwanda un moyen de diversifier ses sources de revenus, ce qui permet d’explorer de nouvelles avenues, diplomatiques et militaires’’. L’Afrique de l’Ouest semble être un terreau favorable pour ce nouveau positionnement.

Boniface T.