Pour que les success stories africaines s’internationalisent ! (Tribune libre de Bola Bardet, Fondatrice de Susu)

Afriquinfos Editeur
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Bola Bardet.

Paris (© 2021 Afriquinfos) – Alors que la crise du Covid-19 a entraîné une forte baisse des flux d’investissements directs étrangers en direction du continent et que l’aide publique au développement ne cesse de se réduire depuis une dizaine d’années, l’Afrique reste considérée comme l’eldorado économique de ce siècle. Dotés d’importantes ressources naturelles et d’un marché de consommateurs en pleine expansion grâce à une démographie jeune et une classe moyenne en plein essor, les marchés africains suscitent les convoitises des firmes étrangères du monde entier.

Ce regain d’intérêt pour l’Afrique cette dernière décennie s’est accompagné d’un nouveau narratif, présentant un autre visage du continent au monde, plus attractif et moins misérabiliste. Évidemment, de nombreux défis persistent en termes de développement pour les pays africains mais l’émergence est réelle. Un double mouvement illustre cet attrait et succès africain du moment : les diasporas qui voient désormais l’Afrique comme une destination d’avenir, des entreprises africaines dont l’empreinte dépasse désormais le simple marché local.

Des diasporas qui veulent investir le continent

L’Afrique est souvent présentée comme une région du monde subissant particulièrement les dégâts de la fuite de ses cerveaux vers l’étranger. L’exemple qui est souvent donné est celui du secteur médical, où les compétences – et les investissements publics – manquent. Mais dans le même temps, on observe de plus en plus une envie d’Afrique au sein des diasporas africaines résidant en Europe et en Amérique du Nord. Dans un sondage effectué auprès des jeunes de la diaspora française, 76% des personnes interrogées par Talent2Africa, plate-forme de recrutement en ligne dédiée à la diaspora africaine, souhaitent s’impliquer dans le développement du continent.

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Et cette volonté des diasporas de contribuer au développement est souvent synonyme de projet entrepreneurial pour avoir de l’impact. Les exemples de projets portés par des membres de la diaspora ne manquent pas comme la « Laiterie du Berger » qui fournit les seuls produits laitiers à base de lait collecté auprès des éleveurs du Sénégal ou encore Susu qui permet aux diasporas de financer des services de santé pour leurs proches résidant en Afrique de l’Ouest. Plutôt qu’intégrer la fonction publique ou des grands groupes, ces entrepreneurs ont compris que les TPE et PME constituent le cœur des écosystèmes africains comme le secteur informel qui domine encore.

Créer des champions africains rivalisant à l’international

Que l’Afrique attire les talents et les investissements est une chose, que les entreprises africaines s’imposent sur la scène régionale et internationale en est une autre. Dans sa dernière étude sur le financement en capital-risque des start-up africaines, Partech Africa note que la tech africaine a battu son record en 2020 avec 359 levées de fonds.

Côté sectoriel, la Fintech continue d’être le secteur captant le plus l’intérêt des investisseurs, avec 26% des tours de table et 25% du volume d’investissements. C’est d’ailleurs dans ce secteur que les entreprises africaines commencent à avoir un réel rayonnement international. « Lidya », startup nigériane spécialisée dans les services financiers digitaux, a étendu ces dernières années ses services à plusieurs pays européens comme la Pologne et la République tchèque. En 2020, le groupe panafricain Ecobank a lancé Rapidtransfer International, une solution de transferts de fonds destinée au corridor Europe – Afrique pour concurrencer directement les mastodontes internationaux présents sur les grands corridors intercontinentaux.

La résilience et la créativité des entrepreneurs ne sont plus à démontrer. Néanmoins, les projets d’entreprise en Afrique manquent encore trop souvent d’une dimension régionale ou internationale dans leur visée. Les entrepreneurs africains doivent passer à l’étape supérieure, en démontrant qu’ils sont aussi capables de penser leurs entreprises au-delà des frontières africaines pour que l’Afrique s’insère pleinement dans l’économie mondiale et proposent des solutions globales.

Tout l’enjeu désormais est que ce rayonnement s’étende à d’autres secteurs, et que les entreprises africaines soient capables d’être reconnues sur la scène internationale tout en générant des retombées en termes d’emplois et de richesse sur le continent.