Tunisie, Togo, deux producteurs de phosphates en grand besoin de ‘Dialogue national’…

Afriquinfos Editeur
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Une carrière de phosphate (DR, Pouvoirsafrique)

Lomé (© 2025 Afriquinfos)- Qu’est-ce que la Tunisie logée dans la partie Nord du continent et le Togo situé en Afrique de l’Ouest, peuvent-ils bien avoir en commun? Aussi curieux que cela puisse paraître, les deux pays ont en commun de faire partie des principaux producteurs mondiaux de phosphates, et partagent également le fait d’être en proie à une crise politique interne dont la résolution pourrait passer la tenue d’un ‘Dialogue national’. Dialogue appelé de tous leurs vœux par les Oppositions dans ces deux Etats.

En Tunisie,le secteur minier contribue à hauteur de 3% au PIB de la Tunisie et est dominé à 80% par l’exploitation du phosphate.  En 2023, le pays arrivait à la dixième position parmi les producteurs mondiaux avec 3,6 millions de tonnes. Un classement certes honorable, mais qui est bien loin de ses précédentes performances dans le secteur.  La Tunisie faisait en effet partie des principaux producteurs mondiaux de ce phosphate en 2010, année à l’issue de laquelle elle en a livré un volume record de 8,2 millions de tonnes. La production a cependant baissé pour atteindre 2,4 millions de tonnes en 2011 en marge de la révolution socio-politique qui a secoué le pays cette année-là, et n’est, depuis lors, plus remontée au niveau de référence de 2010.

Pour redonner de l’allant au secteur, le gouvernement tunisien a adopté un programme d’une durée de 5 ans (2025-2030) visant à porter la production nationale de phosphate à 14 millions de tonnes d’ici 2030. Si l’initiative est ambitieuse et sera salvatrice pour la filière, la crise politique que traverse le pays, les revendications sociales et autres manifestations localisées, ont été identifiées comme des freins affectant le développement de cette filière en Tunisie. 

Le parallèle peut être aisément fait entre la situation tunisienne qui prévaut en Tunisie et celle du Togo.  Dans ce pays aussi, le phosphate est le premier produit d’exportation avec 60,29 milliards FCFA en 2021, soit 63 % des exportations de produits extractifs du Togo en 2021. Le secteur extractif a représenté 1,41 % du PIB togolais en 2021, et 2,54 % des revenus de l’État, des chiffres similaires à ceux de 2020. Il faut souligner que ces chiffres sont relativement faibles, compte tenu du potentiel minier togolais.

Alors que le Togo a fait partie des principaux producteurs mondiaux de phosphates à la fin du 20ème siècle, il est aujourd’hui hors du top 20 mondial. Ici aussi, à l’instar de la Tunisie, une sempiternelle crise politique et des revendications sociales, plombe l’essor de la filière phosphate. De récentes manifestations provoquées par l’instauration d’un régime parlementaire, l’arrestation d’un rappeur engagé, la cherté de la vie, ont sécoué le pays.

Autre similitude, dans ces deux pays, l’opposition et des acteurs de la société civile appellent à un dialogue. En Tunisie, le mouvement Ennahdha a appelé, dans un communiqué publié en début d’année 2025, à l’urgence d’un dialogue national sérieux et inclusif afin de « sauver la Tunisie ».

Le mouvement qui critique le régime et la politique du président de la République, Kaïs Saïed, a insisté sur la nécessité d’un dialogue national « sérieux et inclusif entre toutes les forces nationales afin de sauver la Tunisie selon un programme démocratique participatif qui aborde les questions et les problèmes politiques, économiques et sociaux, en commençant par la libération de tous les détenus politiques et la levée de toutes les restrictions imposées aux partis, à la société civile et aux libertés.

Au Togo, dans une déclaration lue le 12juin lors d’une conférence de presse, l’Alliance nationale pour le changement (ANC), les Forces démocratiques pour la République (FDR) et une partie de la société civile ont demandé « solennellement et publiquement la démission immédiate de Faure Gnassingbé ». « L’imposition d’une constitution dite de la 5ème République, sans référendum, sans consultation populaire et sans consensus national, constitue un acte de haute trahison contre le peuple togolais et la démocratie », ont-ils dénoncé.

Dans un message solennel adressé à la Nation à l’occasion de la fête de l’Ascension et en prélude à la Pentecôte, la Conférence des Évêques du Togo (CET), avait, elle aussi, exprimé sa vive inquiétude face à la situation sociopolitique du pays. Face à cette situation, la CET a appelé à un ‘’véritable dialogue, franc, sincère, inclusif et constructif’’ et exhorte tous les acteurs – politiques, société civile, forces de sécurité et confessions religieuses – à s’unir pour préserver la paix. Elle souligne : ‘’La paix véritable ne peut se construire sans la justice, la vérité et un dialogue sincère’’.

Pour l’heure, ni à Lomé ni à Tunis, les pouvoirs en place ne semblent aller dans le sens d’un Dialogue.

S. B.