La première mouture du nouveau code d’investissement tunisien sera soumise prochainement à l’examen avant approbation par les députés de l'Assemblée constituante, a annoncé mercredi Kamel Ayari, membre du comité exécutif pour l’élaboration du code.
Véritable constitution pour les hommes d’affaires tunisiens et étrangers, "ce nouveau code suscite un phénomène d’attentisme vu que certains investisseurs diffèrent leurs projets pour s’assurer de la tendance des nouvelles dispositions dont les facilitations, la liberté du marché et les primes (…)", a estimé M. Ayari.
Selon ce dernier, les incitations offertes actuellement aux investisseurs locaux et étrangers, représentent 2,5% du PIB du pays et 10% des recettes de son budget. 70% des incitations fiscales sont dédiés aux entreprises exportatrices tandis que uniquement 7% sont destinés aux activités servant le développement régional.
Le nouveau code d’investissement prévoit apporter des amendements dans les 20 mécanismes d’incitation, servir les priorités de l’Etat tunisien notamment le développement inclusif, l’employabilité, le développement du capital humain, le renforcement de la valeur ajoutée et l’innovation en plus de la promotion des exportations et l’internationalisation des entreprises tunisiennes.
C’est dans cette logique que des avantages préférentiels seront réservés aux entreprises qui désirent s’implanter dans une zone à développement prioritaire ou dans une province intérieure du pays et particulièrement celles qui mettent en valeur les spécificités naturelles des zones concernées par l’investissement.
Lassaad Dhaouadi, membre du groupement professionnel des conseillers fiscaux de Tunisie, a toutefois averti que le nouveau code d' investissement "comporte les mêmes lacunes que celles figurant dans l' actuelle code notamment pour ce qui est absence d' articles liés au suivi des entreprises bénéficiant de primes financières, au contrôle des fraudeurs et à la création d' emploi".
Ces insuffisances sont, d' après M. Dhaouadi, derrière les pertes de l’Etat tunisien "puisque des hommes d’affaires ont jouit de primes stipulées par le code d’investissement sans pour autant avoir réalisé des projets rentables". Cependant, a-t-il poursuivi, "d’autres fondent des projets fictifs qui ne voient pas le jour rien que pour profiter de ces avantages".
Un autre handicap s’hérite de l’ancien code d’investissement en l’occurrence "l’importation du chômage". L’article 11 du nouveau code indique que "toute entreprise peut recruter des cadres de nationalité étrangère à raison de 30% de son personnel d’encadrement". Toujours selon M. Dhaouadi, "il s’agit là d’emplois créés au détriment de la main d’œuvre tunisienne".
Ainsi, le nouveau code n’incite pas à favoriser des emplois supplémentaires.
En réaction sur cette critique, Khalil Abidi, directeur au ministère tunisien des Finances a expliqué que l’article 11 vise surtout les entreprises investissant dans des secteurs high-tech, de pointe, qui exigent de hautes qualifications non encore disponibles en Tunisie.
"Nous sommes confrontés à une rude concurrence au niveau de l’attraction des investisseurs étrangers particulièrement de la part du Maroc et de la Turquie. Nous avons donc intérêt à offrir aux investisseurs les facilités possibles pour s’implanter chez nous et créent de la valeur ajoutée", s’est exprimé M. Abidi.
Dans la perspective de trouver un équilibre entre les entreprises tunisiennes et celles étrangères aux niveaux du suivi et des avantages préférentiels, le futur code donnera lieu à une Instance nationale de l’Investissement (INI).
"Elle veillera à accompagner les investisseurs durant les différentes étapes de création de projets, leur faciliter les procédures et à contrôler la manière dont les primes d’incitation ont été utilisées", comme l’a confirmé M. Abidi.
Dans l’attente de son approbation par la Constituante, le nouveau code d’investissement de la Tunisie ambitionne de renforcer la spécialisation de ce pays dans des secteurs à forte valeur ajoutée l’agroalimentaire, les composantes automobiles et aéronautique et les technologies en l’occurrence. Parallèlement, le futur code appelle les investisseurs à respecter les législations tunisiennes en vigueur telles que la sécurité sociale et l’employabilité.