Le pays doit mettre en sourdine, pour un temps, les conflits idéologiques parfois stériles qui paralysent les réformes politiques, économiques, sociales et sécuritaires, a-t-il dit, estimant que la Tunisie est dans une certaine mesure le dernier espoir du printemps arabe.
Selon lui, la Tunisie fait face à un affaiblissement de ses institutions publiques, une faible croissance économique, une montée de la violence djihadiste et du commerce illicite.
La révolution dite de la "liberté" et de la "dignité" (17 décembre 2010-14 janvier 2011) a mis la démocratie à l'ordre du jour, mais elle visait également le chômage et les inégalités sociales et exprimait le désespoir de larges franges de la jeunesse tunisienne, a affirmé M. Ayari.
Le bilan est mitigé, a-t-il dit. "Certains ne voient pas le bout du tunnel et voudraient revenir en arrière alors que d'autres expliquent qu'il faut être patient et que ce n'est pas du jour au lendemain qu'un régime démocratique stable et qu'une économie compétitive et re-distributive se met en place".
"Le pays est en transition, a-t-il poursuivi, lors d'une transition, l'on sait ce que l'on quitte mais l'on ne sait pas tout le temps ce que l'on atteint. Cela génère des incertitudes qui peuvent alimenter des conflits sociaux et politiques".
Pour M. Ayari, la Tunisie a tous les ingrédients pour réussir, malheureusement, elle subit le contrecoup de l'instabilité régionale et vit souvent par procuration des guerres qui ne la concernent pas directement.
Il a souligné que la Tunisie, si elle surmonte les crises politiques qui l'agitent, devra dans un premier temps relever le défi du développement régional et de la décentralisation politique: construction d'infrastructures dans les zones délaissées, besoin de représentation politique des régions intérieures du pays, réconciliation entre la capitale, la côte et la bande ouest.
Dans un second temps, a-t-il affirmé, il devra réfléchir à son identité mouvante et fluctuante dans un monde de plus en plus changeant en privilégiant la diversité sur la singularité.
A propos des difficultés que l'adoption de la démocratie rencontre dans certains pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, M. Ayari a expliqué que la démocratie implique la reconnaissance de la souveraineté de la majorité, la reconnaissance de la souveraineté du droit sur la souveraineté de la majorité, et la reconnaissance du pluralisme des valeurs et des modes de vie.
La démocratie implique également la tenue régulière d'élections libres et concurrentielles et consacre le principe de l'alternance politique, a-t-il dit.
Dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, le problème réside dans la propension qu'ont certains partis au pouvoir à se contenter de reconnaître la souveraineté de leur majorité, tout en utilisant le droit pour limiter les possibilités d'alternance et imposer une vision hégémonique à la société.