Tunisie: Abir Moussi subit encore des coups de colère judiciaires du Président Kais Saied

Afriquinfos Editeur
3 Min de Lecture
Combinaison de portraits de six des 26 candidats à la présidentielle tunisienne du 15 septembre 2019 (de gauche à droite): l'ancien président Moncef Marzouki, la candidate anti-islamiste Abir Moussi, le Premier ministre Youssef Chahed, l'homme d'affaires Nabil Karoui, le ministre sortant de la Défense Abdelkarim Zbidi et le président par intérim du Parlement Abdelfattah Mourou.

L’opposante tunisienne Abir Moussi, dirigeante du PDL (Parti destourien libre), a été condamnée ce 12 juin 2025 à deux ans de prison en vertu d’un décret-loi présidentiel qui punit les « fausses informations », a indiqué son avocat.

Jeudi, « la justice a qualifié de crime les critiques de Mme Moussi contre l’instance électorale, ISIE fin 2022″, a précisé Me Nafaa Laribi. Lors d’une conférence de presse, Mme Moussi avait critiqué le processus électoral, le jugeant « anticonstitutionnel » et « faussé » par l’ISIE selon ses avocats. Virulente critique à la fois du Président Kais Saied et du parti islamo-conservateur d’opposition Ennahdha, Mme Moussi, ex-députée et avocate, est en détention depuis son arrestation en octobre 2023 devant le Palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Manifestation contre la politique du Président tunisien sortant Kais Saied, le 13 septembre 2024 à Tunis.

Le 26 mai, elle a purgé une première peine de 16 mois dans une autre affaire ouverte également à la suite d’une plainte déposée par l’ISIE. En vertu du décret-loi 54, elle avait été condamnée en août 2024 à deux ans de prison, une peine ensuite réduite à un an et demi en appel. « Le tribunal s’est précipité pour la condamner de nouveau pour qu’elle reste en prison », a déploré son avocat.

Mme Moussi fait l’objet de plusieurs accusations graves dont celle « d’attentat ayant pour but de changer la forme du Gouvernement », soupçonnée d’avoir voulu rétablir un régime similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du « Printemps arabe ». D’autres figures de l’opposition sont derrière les barreaux et condamnées à de lourdes peines, comme le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, condamné début février 2025 à 22 ans de prison pour « complot contre la sûreté de l’Etat ».

D’autres opposants sont poursuivis en vertu du décret-loi 54, promulgué en septembre 2022 par le Président Saied pour lutter contre la diffusion de « fausses informations ». Le texte est vivement critiqué par les défenseurs des droits, qui dénoncent son interprétation trop large par la justice locale. Selon des données de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme fin janvier 2025, « environ 400 personnes sont poursuivies » en vertu du décret, dont des journalistes, des blogueurs et des citoyens.

© Afriquinfos & Agence France-Presse