Togo: Lomé aux allures de ‘ville morte’ au premier jour d’un appel à 3 jours de manifestations   

Afriquinfos Editeur
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Des scènes de contestation dans des rues de Lomé ce 26 juin 2025 (photo, DR).

LOME (© 2025 Afriquinfos)- Des scènes classiques typiques des grandes journées de manifestation dans la capitale togolaise ont rythmé ce 26 juin 2025, à la faveur d’un appel d’activistes de la diaspora togolaise à dénoncer la gouvernance sous Faure Gnassingbé durant 72H.

Circulation fluide depuis la matinée, scènes de courses-poursuites entre Forces de l’ordre et de très jeunes manifestants dans plusieurs quartiers, grandes boutiques et échoppes aux rideaux baissés, certaines Administrations privées en télétravail dans la capitale togolaise. Ce sont les principaux clichés qui décrivent le mieux l’atmosphère tout au long de ce 26 juin à Lomé.

Des scènes de contestation dans des rues de Lomé ce 26 juin 2025 (photo, DR).

Les principaux marchés de la capitale ont aussi connu une fréquentation inhabituelle. Adawlato, Gbossime, Hanoukopé ont été logés à cette enseigne.

«J’étais à Gbossimé tôt dans la matinée pour faire des emplettes ce jeudi, 26 juin. Il y avait très peu de vendeurs. Dans la zone de Kodjoviakopé et de Nyékonakpoè, la plupart des boutiques et détaillants n’ont pointé leurs nez qu’en fin de matinée», a  témoigné une habitante qui a préféré rester dans l’anonymat. «La ville a été calme globalement dans des quartiers sud-ouest de la capitale où j’ai pu circuler depuis le matin», ajoute encore cette citoyenne résidant dans le sud de la ville.

Dans le lot des quartiers ayant connu des rues bloquées par des barricades tout au long de la journée, plusieurs témoins ont relevé Bè, Ablogame, etc. avec des scènes de pneus et d’ordures ménagères brûlés.

Des blessés et des arrestations sont rapportés au terme de cette journée agitée à divers endroits de la ville, de même que des voies de fait exercées sur plusieurs manifestants. Au rythme du «slogan» «Libérer le Togo», certains de ces jeunes manifestants ont joué au chat et à la souris avec des agents des Forces de Sécurité (essentiellement des gendarmes) et de Défense. Des scènes de Forces de sécurité pourchassant des manifestants présumés jusque dans de nombreuses habitations ou confondant manifestants et simples passants dans les rues de Lomé ont également été signalées à plusieurs endroits. «L’Etat togolais nous a demandé le 24 juin, par l’entremise du ministre Bawara, de vaquer à nos occupations ce 26 juin. C’est donc insensé de voir de simples passants être tabassés par des éléments de Forces de l’ordre, alors qu’ils n’ont commis aucune inconduite», a dénoncé une employée dans le privé, au centre-ville.

Réapparitions de nervis dans la capitale togolaise

Plusieurs témoins ont signalé avec émoi, avec des images et de brèves vidéos à l’appui, la réapparition dans plusieurs quartiers loméens ce 26 juin 2025 d’hommes en civil circulant dans des pick-up neuves sans plaques d’immatriculation, à la recherche de manifestants. Armés de cordelettes, de bâtons et d’armes à feu, ces hommes ont agi dans plusieurs quartiers sans être inquiétés par les Forces de sécurité et de défense, selon diverses autres informations recoupées. «Un phénomène qui rappelle des scènes violentes, impunies jusqu’à présent, d’octobre 2017, quand des miliciens ont pris d’assaut des rues de Lomé, en lançant une chasse aux manifestants du PNP (Parti national panafricain) et de l’Opposition», analyse un défenseur togolais des droits de l’Homme.

«Ces scènes sont ahurissantes dans la mesure où j’ai vécu le même phénomène glaçant en octobre 2017», renchérit un photoreporter qui était de nouveau dans les rues ce 26 juin dans les quartiers de Bè-Bassadji, et d’Akodessewa. L’Administration au centre-ville a connu pendant ce temps un fonctionnement normal.  

Au cœur de ces mécontentements, la dénonciation de la gouvernance globale du pays par Faure Gnassingbé. Plusieurs voix diasporiques ont appelé, depuis près de 3 semaines, à la tenue de nouvelles manifestations pacifiques du 26 au 28 juin 2025 dans plusieurs villes du Togo pour dénoncer la «gouvernance sous Faure Gnassingbé depuis le 03 mai 2005». Ces appels font suite aux manifestations spontanées des 05 et 06 juin tenues dans plusieurs quartiers de Lomé par des jeunes, et ayant abouti à une série d’interpellations, de poursuites judiciaires et de blessés.

«Des forces obscures sont convaincues que les seuls moyens pour conquérir le pouvoir sont la violence, la révolte, l’insurrection, des raccourcis», a dénoncé Gilbert B. Bawara (ministre de la Réforme des Services publics, du Travail et du Dialogue social) ce 24 juin, en amont de la manifestation de ce 26 juin.

Il avait ouvertement averti les participants à la contestation populaire annoncée les 26, 27 et 28 juin qu’ils tomberont sous le coup de la rigueur de la loi, face «à l’illégalité de ces manifestations» et l’invisibilité de leurs organisateurs.

«L’Etat va faire observer l’ordre public et la tranquillité. Une manifestation illégale et irrégulière expose ses participants», a clairement fait observer ce proche conseiller de Faure Gnassingbé. Depuis le 03 mai 2025, l’exécutif togolais a remis sa démission après la prestation de serment du Président du Conseil et du Président de la République. L’équipe gouvernementale sortante évacue actuellement les affaires courantes.

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