Togo/Législatives 2024: Retour sur une semaine de décomptes menant aux résultats provisoires proclamés

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Législatives au Togo le 29 avril 2024.

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Les Togolais ont voté dans le calme lundi 29 avril pour élire députés et conseillers régionaux, un scrutin qui s’est tenu juste après une modification éclair de la Constitution destinée selon l’Opposition à prolonger le Président Faure Gnassingbé au pouvoir.

Législatives 2024 au Togo: une phase du dépouillement.

Les dépouillements avaient débuté en fin de journée du 29 avril dans les bureaux de vote et la Commission électorale avait annoncé en soirée de ce 29 avril que « les tendances des résultats provisoires seront annoncées au cours de la nuit électorale ». Il en a été autrement avec les scores électoraux révélés au compte-gouttes jusqu’au soir du 04 mai 2024.

Début du dépouillement des bulletins de vote aux élections législatives, dans un bureau à Lomé, le 29 avril 2024.

Les résultats des législatives devront ensuite être validés par la Cour constitutionnelle. Selon le Code électoral, les résultats provisoires doivent être annoncés dans les six jours suivant le vote. A Lomé, la capitale, les électeurs ont été peu nombreux aux urnes le 29 avril, et le vote s’est déroulé sans incident, globalement. Le Togo, pays de 8,8 millions d’habitants coincé entre le Bénin et le Ghana, est dirigé par la famille Gnassingbé depuis les années 1960: l’actuel Président, Faure Gnassingbé, est arrivé à la tête de l’Etat en 2005 à la suite de son père, Eyadèma Gnassingbé, qui a dirigé le pays d’une main de fer pendant près de 38 ans. « En me réjouissant du déroulement paisible du scrutin sur l’ensemble du territoire national, j’exhorte tous nos concitoyens à accomplir leur devoir civique dans la sérénité pour la consolidation de nos acquis démocratiques« , avait confié sur X le Chef de l’Etat après avoir voté dans son fief familial de Pya, dans le nord du pays.

Amnesty International a toutefois dénoncé lundi 29 avril dans un communiqué « des élections sur fond de musellement des voix dissidentes ». « Je suis là pour accomplir mon devoir civique et suis sûr que mon parti politique va gagner ces élections », avait déclaré Robert Aloudji, mécanicien, juste avant l’ouverture de son bureau de vote à Lomé.

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– Climat tendu-

Ce double scrutin législatif et régional intervient dans un climat politique très tendu après l’adoption le 19 avril 2024 d’une nouvelle Constitution qui fait basculer le pays d’un régime présidentiel à un régime parlementaire. Désormais, le pouvoir réside entre les mains d’un Président du Conseil des ministres lequel sera le chef du parti ou coalition majoritaire à l’Assemblée. Faure Gnassingbé étant l’actuel président du parti majoritaire, Unir, il pourrait assumer ce nouveau poste immédiatement et demeurer aux manettes du pays, sans limitation de mandats, ce que l’opposition dénonce comme « un coup d’Etat institutionnel ».

« Je suis serein, parce que nous avons fait l’essentiel, nous avons dénoncé les tares du système et comme les Togolais sont à l’écoute, ils feront le travail », s’enthousiasmait avec le vote Jean-Pierre Fabre, leader du parti d’opposition ANC et candidat à un poste de député à Lomé. « Je ne suis pas inquiète, j’ai confiance en mes concitoyens, ils ont compris l’importance de ces scrutins », avait affirmé Brigitte Adjamagbo-Johnson, coordinatrice de la Dynamique pour la majorité du peuple (DMP, regroupement de partis politiques de l’opposition et d’organisations de la Société civile). Les Togolais, dont près de 60% ont moins de 25 ans, vivent toujours dans une situation de grand dénuement matériel, notamment dans les zones rurales, même si le taux de pauvreté a diminué de 60% en 2006 à 40% en 2023, selon la Banque mondiale.

L’économie togolaise reste stable avec une croissance annuelle autour de 5%, principalement tournée vers les services, notamment avec le Port autonome de Lomé, et l’agro-industrie. Depuis quelques années, comme ses voisins, le pays fait face à la menace jihadiste avec des attaques régulières dans le nord du pays. Au total, 113 députés à l’Assemblée nationale doivent être élus, mais aussi pour la première fois, 179 conseillers régionaux qui – avec les conseillers municipaux – désigneront le Sénat nouvellement créé.

Pour UNIR, la modification constitutionnelle du 19 avril rend les instances du pouvoir plus représentatives du Togo. M. Gnassingbé, à bientôt 58 ans, a déjà remporté quatre élections, toutes contestées par l’opposition. En vertu de la Constitution précédente, il n’aurait plus pu se présenter qu’une fois à la présidence, en 2025.

– Serrer la vis –

Suite au tollé provoqué dans l’opposition par cette nouvelle Constitution, les autorités ont serré la vis à l’approche du scrutin. Toutes les tentatives pour manifester contre la réforme constitutionnelle ont été interdites. Et la Commission électorale a refusé à la CET (Conférence des évêques du Togo) l’autorisation de déployer des observateurs électoraux. La HAAC (Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication) a également suspendu temporairement les accréditations pour la presse étrangère voulant couvrir les élections du 29 avril 2024. Dimanche 28 avril, les ministres de la Justice et de la Sécurité du pays avaient par ailleurs mis en garde « les auteurs de publications de faux résultats ou d’informations incorrectes, de diffamation ou de calomnies » qui « répondront de leurs actes devant les juridictions compétentes ».

Décompte des voix lors du dépouillement des bulletins de vote aux élections législatives, dans un bureau à Lomé, le 29 avril 2024.

© Afriquinfos & Agence France-Presse