«Les gouvernements africains devraient jouer un rôle moteur pour poursuivre les avancées importantes réalisées en 2015 afin que les crimes internationaux graves soient jugés» introduisent les organisations signataires qui soulignent dans ce courrier les progrès réalisés mais aussi et surtout, font état des défis relever en matière de justice internationale.
«Les avancées dans l’affaire Hissène Habré, ancien président du Tchad, et la reddition du chef de l’Armée de résistance du Seigneur Dominic Ongwen, ont déjà constitué d’importants progrès cette année, mais la justice est compromise par le manque de responsabilisation vis-à-vis des crimes graves perpétrés au Soudan du Sud et dans d’autres zones de conflit », a signalé Penny Mbabazi de la Foundation for Human Rights Initiative de l’Ouganda (Fondation pour l’initiative des droits humains).
«Alors que la majorité des membres de l’UA sont aussi membres de la Cour pénale internationale, la plupart de ces pays ne disposent pas de lois nationales qui intègrent totalement les crimes de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et la coopération avec la CPI comme piliers essentiels de la justice», dénonce le texte. Les victimes de crimes graves risquent de se sentir trahies si leur gouvernement ne prend pas de mesures pour réparer les préjudices subis, préviennent les organisations.
Ce n’est pas la première fois que la CPI est épinglée. En janvier dernier, le président zimbabwéen, Robert Mugabe, qui occupe la présidence tournante de l’UA en 2015, a averti qu’il encouragerait les pays africains membres de la CPI à se retirer de la cour lors du sommet de juin.
Ce dernier avait proposé à cet effet la création d’une juridiction à l’échelle continentale qui porterait le nom de la Cour africaine de justice internationale des droits de l’Homme. Elle serait chargée de juger les affaires criminelles et les violations des droits de l’Homme.
Mais M. Mugabe sera freiné dans sa course par les représentants du Malawi qui ont indiqué aux journalistes quelques jours avant le sommet qu’ils n’étudieraient pas la question du retrait.
«Davantage d’États devraient suivre la décision récente du Malawi de s’opposer publiquement aux appels au retrait de la CPI et se rallier au soutien public fort du Botswana en faveur de la CPI », a déclaré Timothy Mtambo du Centre for Human Rights and Rehabilitation du Malawi (Centre pour les droits de l’homme et la réhabilitation) qui estime que «la CPI est un tribunal indispensable qui doit être soutenu et renforcé».
Dans la logique d’apporter leur soutien à cette instance juridique, les organisations ont fait des recommandations. Les organisations ont ainsi appelé les pays africains membres de la CPI à développer la capacité de l’UA à répondre aux situations de conflit pour éviter les crimes internationaux et faciliter la responsabilisation.
La CPI est également invitée à exiger et promouvoir des procès nationaux crédibles pour traduire en justice les responsables de crimes graves, comme en République centrafricaine et à reconsidérer et revoir leur position sur l’immunité accordée aux chefs d’État et de gouvernement en fonction, ainsi qu’aux hauts fonctionnaires déférés devant la juridiction de la Cour africaine de justice et des droits de l’homme. Enfin les organisations somment la cour de favoriser la participation des victimes dans les procès nationaux pour crimes graves.
Les groupes signataires du courrier comptent parmi les partenaires les plus actifs d’un groupe informel d’organisations africaines et internationales, basées dans plus d’une dizaine de pays africains, qui cherchent à promouvoir la justice pour les crimes graves qui enfreignent le droit international.
Larissa AGBENOU