Maroc : le réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako appelle les artistes à œuvrer pour la cause de l’humanité

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Au Festival international du film de Marrakech (FIFM) 2014, tenu au Maroc du 05 au 13 décembre,"Timbuktu", le film de Sissako, avait été projeté jeudi soir. Ce long métrage  dénonce le règne de quelques mois d'une coalition de groupes salafistes (AQMI, Ansar Din, etc.) à Tombouctou, entre 2012 et début 2013.

Ces forces islamistes y avaient au préalable supplanté le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ce groupe insurrectionnel touareg s’était à l'époque emparé de Tombouctou, ville surnommée la "Perle du désert".

Les nouveaux arrivants y avaient instauré la loi islamique, lapidant des personnes qu'ils accusaient d'adultère, interdisant la musique et le football, avant d’en être chassés par les armées de la France, du Mali et d'autres pays africains, en janvier 2013. Projection qui a suscité une analyse duréalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako.

 "Le rôle de l’artiste, c’est parler et dénoncer les choses. Et quand on a un artiste qui a la possibilité de faire cela, c’est important de s’attaquer aux grands sujets", a-t-il soutenu dans un entretien de l'Agence de presse sénégalaise.
"Une petite histoire d’amour dans un appartement, ça ne m’intéresse pas", par contre, "comme artiste venant d’un continent où le cinéma n’existe pas beaucoup, c’est important de s’attaquer à des sujets importants", a-t-il renchéri.
 

"Ce sujet de Timbuktu est un sujet important pour moi parce que je viens du Sahel, de cette région où depuis quelques années, il se passe cette forme d’occupation avec de gens qui sont obscurantistes, des gens qui ont fait le choix de la violence pour s’exprimer et s’imposer, en allant contre toute valeur humaniste et religieuse", a-t-il déclaré. Selon le cinéaste, la situation qui prévalait à Tombouctou signifiait que les djihadistes avaient "pris une religion en otage" pour parler au nom d’elle.

Or, une religion, c’est la transmission de valeurs, fait-il valoir en parlant de la tolérance caractérisant, selon lui, son éducation musulmane. Les djihadistes, en prenant "cette ville en otage un matin, au-delà même de l’islam, ce sont des valeurs humanistes qui sont prises en otage, c’est l’humanité qui est prise en otage, d’une certaine façon", a-t-il estimé. "Pour moi’’, a relevé Sissako, ‘’les manuscrits avaient la même symbolique que le Bouddha géant d’Afghanistan, que les taliban avaient explosé, un Bouddha millénaire, qui représentait beaucoup de choses." Ainsi donc, en agissant de cette manière, "encore une fois en s’érigeant comme porte-parole d’une religion", ces groupes devaient amener toute personne et tout musulman en particulier à "se positionner, non seulement dans son travail, mais il faut se positionner aussi si la rue le permet, dans la rue aussi", a-t-il soutenu.

                                                    

                                                            P. Amah