Les acquis du premier Sommet économique de la CEDEAO tenu à Abuja

Afriquinfos Editeur
5 Min de Lecture
1er Sommet économique de la Cedeao (Dr-Pr du Sénégal)

Abuja (© 2025 Afriquinfos)- Le premier Sommet économique de l’Afrique de l’Ouest (WAES 2025), s’est tenu ce 21 juin à Abuja en marge du 67ème sommet les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté. Placé sous le thème « Une voix, un avenir », la rencontre a permis aux chefs d’État et ministres présents de réaffirmer leur attachement à l’unité économique de la région en dépit de certains départs et absences.

Malgré l’absence des pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), et de la Mauritanie, le Nigeria, le Bénin, le Ghana, la Côte d’Ivoire et d’autres pays ont convenu de renforcer leurs échanges bilatéraux et de simplifier les procédures douanières. Mais ces engagements, pour l’instant théoriques, ne suffiront pas sans une dynamique inclusive.

Le Nigeria et le Bénin ont signé un accord, le samedi 21 juin 2025, visant à approfondir l’intégration bilatérale, avec l’ambition d’en faire un modèle pour toute la région ouest-africaine. La coopération entre le Bénin et le Nigeria couvre les domaines de la culture, du commerce et de l’énergie. Il pourrait dynamiser les échanges entre les deux pays.

« Le président Tinubu et moi avons convenu d’une intégration complète entre le Bénin et le Nigeria. La responsabilité incombe maintenant à nos ministres de la mettre en œuvre. Le Bénin et le Nigeria sont plus que des jumeaux – nous sommes les mêmes personnes. Montrez à la région que l’intégration est possible », a déclaré le président béninois, Patrice Talon.

Appelant à des réformes urgentes, le chef de l’Etat béninois a également mis en garde contre le blocage de l’intégration régionale, soulignant la crise actuelle de la CEDEAO. « La CEDEAO est un parfait exemple d’intégration régionale. Malheureusement, notre CEDEAO est en crise en ce moment », a-t-il déploré.

Il a aussi dénoncé les obstacles logistiques le long du corridor Lagos-Abidjan, entravé selon lui par des contrôles aux frontières abusives. « La route existe. Mais un homme d’affaires devrait pouvoir voyager de Lagos à Abidjan en quelques heures, et non en quelques jours. Ce n’est pas ça l’intégration ».

Une institution en branle

Ce rendez-vous, pourtant conçu pour relancer la coopération économique régionale, a surtout mis en lumière les tensions et le manque de coordination persistants au sein de la CEDEAO.

Seulement quatre chefs d’État prenaient part à la rencontre. La Mauritanie et les trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) ont décliné l’invitation que leur avait adressée le président nigérian Bola Ahmed Tinubu – illustrant une nouvelle fois la crise de confiance qui règne entre les États membres de la Cédéao, mais aussi la crise structurelle qui mine l’institution.

Dans son intervention, le chef de l’État béninois a également décrypté pendant plusieurs minutes les raisons objectives de l’inertie de l’organisation ouest-africaine, soulignant notamment le manque d’application des textes adoptés, mais incriminant aussi et surtout la longue chaîne partant des chefs d’État pour relier leurs administrations respectives.

Le président nigérian Bola Tinubu a ouvertement critiqué le faible volume des échanges intra-africains dans la région, appelant à une coopération plus efficace et à des résultats concrets. Le président béninois Patrice Talon, lui, a dénoncé l’inertie de la CEDEAO, malgré l’existence d’une volonté politique commune : « Ce n’est pas la volonté qui nous manque, mais nous ne parvenons pas à faire aboutir nos idéaux », a-t-il regretté.

L’exclusion ou le désengagement de plusieurs pays-clés risque de limiter la portée des décisions prises à Abuja. Sans participation de l’ensemble des économies ouest-africaines, toute ambition de relance commerciale ou de construction d’un marché commun reste incomplète. Les appels à une réforme de la CEDEAO pourraient, cependant, ouvrir la voie à une redéfinition de son rôle et de ses mécanismes d’action dans un environnement politique en mutation.

Ce sommet marque aussi la fin de mandat de Bola Ahmed Tinubu à la présidence tournante de la CEDEAO. Désormais l’institution a à sa tête le Président de la Sierra Léone, Julius Maada Bio. Ce dernier devra relever un double défi : gérer le départ de membres clés tout en relançant une organisation régionale affaiblie, mais toujours centrale pour l’avenir de l’Afrique de l’Ouest.

V.A.