Le documentaire ‘MK, l’armée secrète de Mandela’ à voir à tout prix pour mieux comprendre la lutte anti-apartheid

Afriquinfos Editeur
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Pretoria (© 2024 Afriquinfos)- Un mélange d’interviews d’anciens combattants de l’armée secrète de l’ANC et d’images d’archives, une plongée intéressante sur la stratégie révolutionnaire qui a mené à l’abolition de l’apartheid: c’est ce qu’illustre le documentaire ‘’MK, l’armée secrète de Mandela’’.

Réalisé par  la Camerounaise Osvalde Lewat, le film retrace à travers les parcours des anciens membres d’uMkhonto weSizwe (MK en abrégé), l’histoire de la branche militaire de l’ANC fondée par Nelson Mandela, le père de la nation sud-africaine. L’histoire internationale occidentale de cet homme tend à occulter le fait qu’il fut condamné à la prison à perpétuité pour avoir fondé et dirigé MK. Aussi, avant de devenir un vieux sage pacifiste, il a été un révolutionnaire à la tête d’une armée de guérilla.

Ces « anciens combattants » ont été indispensables à la lutte mais ont été oubliés au profit du dialogue et du retour à la paix … et de l’image « pacifique » de Mandela. L’histoire officielle les oublie, ne leur fait pas partager la gloire de la victoire. Même matériellement, ils sont oubliés…Recueillant les témoignages d’anciens combattants de « MK », la branche armée de l’ANC, fondée par Nelson Mandela, ce documentaire rend hommage aux héros oubliés de la lutte contre l’apartheid, qui ont sacrifié leur vie pour libérer l’Afrique du Sud de l’oppression raciale.

Le tournant s’est produit en 1960. Après le massacre de Sharpeville, township au sud de Johannesburg où 69 personnes sont abattues par la police au cours d’une manifestation pacifique, le Congrès national africain (ANC) décide de poursuivre son combat contre l’apartheid, imposé depuis 1948, en rompant avec la non-violence. En 1961, la branche armée du parti, baptisée Umkhonto we Sizwe (« la lance de la nation »), ou « MK », voit le jour.

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Mais l’arrestation de ses principaux dirigeants, au premier rang desquels Nelson Mandela, puis leur condamnation à la prison à perpétuité à l’issue du procès de Rivonia (1963-1964) laissent l’organisation exsangue. En juin 1976, les émeutes de Soweto, provoquées par la sanglante répression d’une marche de lycéens dressés contre l’hégémonie de l’afrikaans dans les écoles noires, redonnent de l’élan au mouvement. Forcés à l’exil, de nombreux jeunes rejoignent les camps d’entraînement de MK à l’étranger. Dans la décennie qui suit, l’organisation armée multiplie les attaques contre la minorité blanche, tandis que le mouvement antiapartheid s’étend dans le monde entier, forçant le régime à entamer des négociations avec Mandela. Libéré le 11 février 1990, celui-ci est élu à la présidence de la République en 1994.

« L’idée de présenter Mandela en pacifiste, c’est encore une façon de nous déposséder de notre histoire« , estime Mac Maharaj, ancien dirigeant de MK. Pendant trente ans, des milliers de jeunes hommes et femmes se sont formés à la guérilla dans des pays voisins ou appartenant au bloc soviétique, dans l’objectif d’abolir la ségrégation raciale en Afrique du Sud. Remettant en lumière l’histoire et l’apport de l’aile militaire de l’ANC, illustrés par des archives, la réalisatrice Osvalde Lewat donne la parole à d’anciens soldats, qui racontent leur engagement, leurs actions mais aussi leurs rêves déçus.

Alors qu’ils ont sacrifié leur jeunesse pour la cause noire, nombre d’entre eux ont ensuite sombré dans la misère et les addictions, privés de la reconnaissance qu’ils espéraient, dans un pays désormais rongé par les inégalités et la corruption. « Ce n’est pas pour ça qu’on s’est battus ! », s’emporte ainsi un ancien membre des forces spéciales, qui vit à la rue. Diffusé pour une première fois ce 2 avril 2024, le film sera de nouveau diffusé ce 9 avril 2024.

V. A.