New York (© 2024 Afriquinfos)- Les grands projecteurs «du Débat de la Semaine de haut niveau» se sont éteints le 30 septembre 2024 à New York (USA) dans le cadre de la 79è AG de l’ONU sans un dessin clair et net autour de la représentativité souhaitée de l’Afrique au CS (Conseil de Sécurité). Un futur incertain ouvrant la voix à de nouvelles guerres diplomatiques feutrées ou ouvertes en Afrique.
Le «consensus d’Ezulwini» soumis par l’Afrique en juillet 2005 autour de la réforme du CS reste d’actualité et demeure le bréviaire principal du continent africain autour de sa revendication légitime. Une réclamation qui a pour principaux fondements la dénonciation du fait «qu’avec ses 55 pays membres et 1,3 milliard d’habitants, l’Afrique, qui représente plus d’un quart des membres de l’ONU, 18% de la population mondiale et 50% des questions à l’ordre du jour du CS», ne peut plus se contenter de sièges de non-permanents à l’ONU.
Le «consensus d’Ezulwini» demande expressément de «donner à l’Afrique deux sièges permanents au CS, et cinq de membres non-permanents au lieu des deux que le continent occupe depuis 1965».
Depuis sa création il y a 79 ans, le CS onusien n’a connu qu’une seule expansion en 1965. Quand il est passé de onze à quinze membres, avec l’ajout de «quatre sièges élus de membres non-permanents». Certes, en 2005, le «G4 » (groupe composé de l’Allemagne, du Japon, de l’Inde et du Brésil) a plaidé pour un projet de résolution «prévoyant un élargissement à 25 membres, dont 6 nouveaux sièges permanents». Mais ce plaidoyer non plus n’a pas fait avancer ce dossier. Dix-neuf ans plus tard, les débats de la 79è AG de l’ONU n’ont pas fait bouger les lignes, en dépit des professions de foi réitérées des 5 Etats du CS disposant du droit de veto (USA, Chine, Russie, Grande-Bretagne et France). Un statut quo qui renvoie le réexamen du «consensus d’Ezulwini» à l’UA et à son «C10» (groupe de dix pays chargé de négocier ce dossier et cette réforme).
La plus grosse crainte qui pointe à l’horizon est la bataille entre puissances africaines autour de cette représentativité. En gros, qui a les mensurations nécessaires pour agir au nom de l’Afrique au CS, au regard des atouts et enjeux que confèrent les places de permanents dans cet organe onusien, et au regard des mutations que va connaître l’Afrique d’ici 2063, le centenaire des indépendances africaines ? Une chose est presque certaine, la lutte pour accéder au CS au nom de l’Afrique sera sans pitié !
Le Nigeria avec son PIB ondoyant permanemment (malgré ses plus de 220 millions d’habitants, Etat le plus peuplé d’Afrique), l’Afrique du Sud et son statut de «nation la plus industrialisée» d’Afrique (avec, de très loin, la plus grande part africaine dans le commerce mondial), l’Egypte avec le statut d’armée la plus puissante et riche d’Afrique (et nation la plus peuplée du monde arabe) font office de grandissimes favoris.
Un trio dans lequel va s’inviter sans grandes entraves l’Algérie (Etat francophone le plus riche d’Afrique) avec une diplomatie bien rôdée et outillée depuis 1962.
La lutte d’influence adossée à la guerre de veille stratégique autour de cette question a en réalité débuté depuis plus de deux décennies. Une donne qui a créé de la distance entre les figures de proue du continent pour siéger au CS onusien et les puissances émergentes ou émergées de l’Afrique depuis l’entame du 3è millénaire. C’est le cas par exemple du Maroc (qui s’érige de plus en plus en hub incontournable de l’Occident projetant de conquérir économiquement le Sud du Sahara), de l’Ethiopie (avec ses plus de 120 millions d’âmes, second Etat le plus peuplé d’Afrique, siège de l’UA), de l’Angola (plus grand ex-colonie lusophone d’Afrique et exportateur majeur d’or noir jouissant d’une diplomatie agissante).
Le Kenya (locomotive de l’économie d’Afrique de l’est), la Côte d’Ivoire (leader de l’UEMOA, 3è pays francophone le plus riche d’Afrique), la RDC (et ses 100 millions, Etat le plus peuplé dans l’espace francophone comptant 88 Etats et Gouvernements) sont aussi bien décidés à jouer les seconds rôles dans cette course au Graal.
Il faudra également compter avec la litanie de petits Etats d’Afrique (d’un point de vue superficie) jouissant d’une grande respectabilité à l’international du fait de leurs respects des règles démocratiques. Maurice, Botswana, Cap-Vert, Seychelles sont à classer dans ce groupe. Un peu comme d’autres Républiques respectables et respectées, peu tapageuses sur le plan diplomatique, mais qui ont des vertus du développement à vendre, malgré la jeunesse de leurs indépendances. Mozambique, Namibie et Tanzanie font office de chefs de file incontestables de ce lot.
Il faudra à terme être rigoureux dans les critères pour éliminer ou décourager tous les ‘Etats plaisantins’ qui auraient envie de candidater à une place au CS onusien au nom de l’Afrique ! Se doter de critères mesurables, objectifs et à même de défendre l’honorabilité de l’Afrique dans le cadre de ce choix va indubitablement imposer au reste au monde le respect des choix de l’Afrique. En attendant de trouver les voies et moyens d’accélérer, depuis le continent noir, l’incontournable et nécessaire réforme du CS onusien intégrant les nouvelles puissances mondiales.
Par GGKE