Cette conférence internationale ayant rassemblé près de 300 participants, dont politiques, experts, financiers et spécialistes des secteurs, avait pour objectifs de faire découvrir les atouts de «l’Ingénierie touristique comme instrument de développement des territoires» et mettre en branle une dynamique de coopération africaine. Dynamique au sein de laquelle le Maroc veut se positionner comme un acteur-pivot.
Parmi les intervenants à ce grand rendez-vous sur le tourisme africain à Rabat, l’architecte sud-africain et patron du Fonds d’investissement «A Capital», Mokena Makeka, a mis en avant la «dimension essentielle de l’ingénierie touristique, afin d’attirer de grands groupes internationaux». Il a insisté à cette occasion sur le fait que dans un contexte de compétition accrue, les acteurs qui «organiseront leurs territoires afin de les rendre plus attractifs et en phase avec leur vocation profonde bénéficieront d’une position plus favorable».
Le patron de la SMIT, Imad Barrakad, a pour ce faire insisté sur la forte attractivité du Maroc lors des cinq dernières années, avec près de 4 milliards d’euros d’investissements touristiques consentis. Les participants ont eu droit à un «master class» d’un grand témoin du continent, l’ancien Premier ministre du Congo, Isidore Mvouba, qui a mis en lumière les enjeux transversaux du développement territorial au service du tourisme, du haut de sa riche expérience au sein de l’exécutif de son pays.
Dans un pareil contexte de croissance du tourisme en Afrique, le Royaume chérifien semble vouloir se positionner, en tant qu’Etat étant en pointe sur ces questions, d’autant plus que ses entreprises progressent de manière substantielle depuis une décennie, sur le continent noir. A cet égard, la SMIT a initié le premier réseau «med-africain de l’ingénierie touristique», espérant ainsi se positionner au centre des débats autour de l’investissement touristique en Afrique, et y jouer ainsi le rôle de «hub». Un peu comme Casablanca Finance City en matière d’investissements étrangers en Afrique, et en direction de l’Afrique.
A la différence de la promotion touristique qui consiste à attirer des touristes, l’ingénierie touristique est le processus qui consiste à conceptualiser des vocations pour les territoires, à les identifier, puis à les mettre en «packages» afin d’attirer des investisseurs internationaux en capacité de les développer et d’y installer des produits touristiques. L’ingénierie touristique agit de ce fait comme un intégrateur pour préparer le produit avant de le proposer à des bailleurs de fonds spécialisés.
Maroc en avance sur le reste du continent grâce à la SMIT
Pour le Maroc, l’enjeu de l’ingénierie touristique est de taille. En effet, si le pays du Roi Mohammed VI est connu pour être une destination incontournable au Sud de la Méditerranée en accueillant près de dix millions de touristes par an, le pays souhaite désormais accroître son attractivité au niveau des investissements directs étrangers (IDE) touristiques, afin de doubler ce nombre d’ici la fin de la décennie en cours.
Avec ses capacités d’hébergement actuelles qui sont de près de 250.000 lits, le Maroc a besoin d’un accroissement substantiel des investissements et ne peut compter sur la seule promotion pour atteindre cet objectif. Il est d’ailleurs le seul pays africain à s’être doté, depuis 2007 d’une structure dédiée à la dynamisation des IDE touristiques, la SMIT, une société privée à capitaux publics qui se veut un «one stop shop» auquel les apporteurs mondiaux de capital peuvent s’adresser.
Ce pari ambitieux ne semble pas gagné d’avance, tant les paramètres qui impactent le développement de l’industrie touristique sont soumis à des contraintes protéiformes, allant des aléas conjoncturels aux logiques de consolidation qui caractérisent les grands investisseurs dans le tourisme (dont beaucoup ont les yeux rivés sur le sud-est asiatique, qui connaît une très forte croissance ces dernières années).
Derrière la SMIT, l’idée des Marocains est de se positionner en acteurs à la taille critique afin d’intéresser les grands groupes internationaux. En cela, le tourisme marocain nourrit l’ambition d’épauler la stratégie globale du Royaume chérifien (devenu depuis 2014 le second investisseur privé en Afrique au Sud du Sahara) et qui poursuit une politique économique agressive sur le continent.
A la faveur de la grande rencontre de Rabat sur le tourisme en Afrique, il a été créé un réseau regroupant acteurs méditerranéens et africains, à travers un «Groupe d’échanges d’expériences panafricaines qui devrait agir comme un outil de mise en convergence des initiatives visant à promouvoir l’ingénierie touristique sur l’ensemble du continent berceau de l’Humanité».
Bella Edith & Samir Georges