Les chefs d’Etat présents à ce sommet, au total treize issus des deux régions africaines, se sont mis d’accord pour une stratégie régionale relative non seulement à ce phénomène, mais aussi aux vols à main armée et aux autres activités illicites commis en mer dans cet espace géographique au centre de multiples enjeux géostratégiques, selon leur déclaration commune dont Xinhua a obtenu copie. Cette stratégie qui attend à présent d’être élaborée se veut l’illustration de l’engagement « à travailler ensemble pour assurer la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans l’espace maritime de l’Afrique centrale et de l’Afrique de l’Ouest par la mobilisation des moyens opérationnels adéquats tant institutionnels que logistiques », d’après la déclaration rendue publique mardi.
Elle prévoit de se fonder sur une série d’instruments juridiques africains et internationaux au rang desquels la Stratégie africaine intégrée pour les mers et les océans – horizon 2050 (Stratégie AIM 2050) adoptée par l’Union africaine (UA) le 6 décembre 2012 à l’initiative du Cameroun, dont le choix d’abriter les présentes assises est justifié par son expérience de l’action de l’Etat en mer à travers les opérations du Bataillon d’intervention rapide (BIR). C’est une unité d’élite des forces de défense camerounaises à l’origine spécialisée dans la lutte contre le grand banditisme dans le Nord-Cameroun et qui a par la suite orienté ses activités contre la piraterie maritime au large des côtes nationales avec des résultats appréciables ayant permis la diminution du redoutable fléau au sujet duquel le président tchadien Idriss Deby Itno, président en exercice de la CEEAC, a promis « une lutte sans merci » des pays du golfe de Guinée. Flatté par cette expérience unique dans la région, ce dirigeant a plaidé à l’ouverture du sommet lundi pour un BIR régional. « La surveillance maritime est une nécessité. Il y va de notre survie », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse au terme de ce rendez-vous mardi, avant d’indiquer cependant que « les décisions que nous avons prises aujourd’hui ne sont pas contraignantes.
« Ces décisions sont valables pour trois ans ». C’est à la fin de la troisième année, a-t-on appris, que les mesures annoncées commenceront à devenir contraignantes. La déclaration dite de Yaoundé mentionne en effet la mise en œuvre d’un « Code de conduite transitoire en vue de faciliter l’adoption d’un accord multilatéral contraignant visant à éradiquer les activités illicites au large des côtes de l’Afrique centrale et de l’Afrique de l’Ouest ». Signé par les ministres des Affaires étrangères, ce code de conduite est un document qui, selon ses propres termes, « s’applique dans les cas d’actes criminels transnationaux organisés dans le domaine maritime, d’actes de terrorisme maritime, d’actes de pêche INN (c’est-à-dire illégale, non déclarée et non réglementée, NDLR) et d’autres activités illégales commises en mer » dans ces régions.
Dans ses dispositions, il préconise une lutte contre la piraterie maritime, les vols à main armée en mer et les autres activités maritimes illicites consistant à « arrêter les personnes qui ont commis des actes de piraterie ou que l’on soupçonne raisonnablement d’en avoir commis, mener des enquêtes à leur sujet et les traduire en justice ; saisir les navires et/ou aéronefs pirates et les biens qui se trouvent à leur bord ; et secourir les navires, les personnes et les biens qui font l’objet d’actes de piraterie ». Les opérations envisagées se proposent d’impliquer des « officiers embarqués », c’est-à-dire « des agents des forces de l’ordre ou d’autres agents habilités (…) qui embarqueront à bord de navires ou d’aéronefs patrouilleurs».
L’application de ces mesures suggère la mise en place d’un cadre intercommunautaire de coopération en matière de sûreté et de sécurité maritimes, l’élaboration des procédures opérationnelles conjointes, l’harmonisation du cadre juridique et institutionnel des Etats membres, l’établissement d’un mécanisme de partage de l’information et du renseignement, l’institutionnalisation d’une conférence sur le développement et la sécurité. Il a aussi été décidé la mise en place d’un mécanisme de financement basé sur les contributions, qui reste à définir.
Ces missions sont dévolues à la CEEAC, à la CEDEAO et à la Commission du golfe de Guinée (CGG), trois organisations régionales qui ont signé un mémorandum d’entente ayant institué la création d’un Centre interrégional de coordination chargé d’assurer la mise en œuvre de la Stratégie régionale de sûreté et de sécurité maritimes, dont le siège a été attribué au Cameroun. Selon le président camerounais Paul Biya, hôte du sommet pour qui la volonté affichée vise à faire du golfe de Guinée « un espace sûr, un espace sécurisé pour la circulation des biens et des personnes », cet organe doit être capable de « concevoir des concepts nouveaux, concepts en avance afin que nous ne soyons plus jamais surpris par l’ingéniosité des pirates et des preneurs d’otages ».
Le mémorandum d’entente des trois organisations régionales institue aussi la tenue d’une réunion annuelle des hauts responsables de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CGG, ayant pour rôle d’assurer « l’orientation, le suivi et l’évaluation de la coopération régionale ».
Prenaient part au sommet, les présidents du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, du Congo, de Côte d’Ivoire, du Gabon, de Guinée- Bissau, de Guinée équatoriale, du Niger, du Nigeria, de Sao Tomé & Principe, du Togo et du Tchad.