La course s’annonce très serrée pour les huit candidats qui ne sont pas des moindres. A l’issue de l’appel à candidatures adressé par la secrétaire générale de la Banque le 1er juillet 2014 à tous les Gouverneurs des Etats membres régionaux, les candidatures se sont mobilisées.
Selon la résolution B/BG/2014/06 qui définit les règles de procédures régissant l'élection du Président de la Banque, les candidatures doivent être parrainées par un ou plusieurs Gouverneurs des pays membres régionaux. Après le 30 janvier 2015, date limite des candidatures, huit personnalités présentées par les autorités des pays membres ont été retenues. Tour d’horizon.
Cap-vert : Cristina Duarte
C’est l’unique femme qui fait partie de la course. Titulaire d’un MBA en Finance internationale et marchés financiers émergents décroché aux Etats-Unis d’Amérique, Cristina Duarte est une parfaite polyglotte qui maîtrise le français, l’anglais, le portugais, l’italien et le créole cap-verdien. Cette dame a joué un grand rôle dans l’économie de son pays en tant que ministre des Finances et du Plan, avant de se retrouver dans de hautes instances internationales, entre autres comme consultante pour la FAO, le PNUD et la Banque mondiale. Ce palmarès est renforcé par sa prise de poste à la BAD en qualité de gouverneure.
C’est sous son impulsion que le Cap-vert est passé du statut de «pays moins avancé» à celui de «pays à revenus intermédiaires», un exploit de ce pays d’autant qu’il est dépourvu de ressources naturelles et connaît un environnement climatique difficile.
Le premier objectif de Cristina Duarte, une fois élue est de «faire de la BAD l’instrument principal des Africains», selon l’APS. La jeune dame compte de ce fait aider les pays africains à sortir de «cette logique de gestion de la pauvreté et à entrer dans une logique de transformation structurelle» au cours de son mandat.
L’expérience, l’expertise et la maîtrise des langues de cette férue de l’économie constituent des atouts sur lesquels l’Etat cap-verdien mise beaucoup.
Ethiopie : Ato Soufian Ahmed
Ce Ministre de l’Economie et des Finances de l’Ethiopie depuis 1994, a été au cœur de toutes les grandes réformes qui ont transformé son pays. Sous la direction de Ato Soufian Ahmed , l’Ethiopie a conduit des négociations importantes avec la Banque Mondiale et le FMI pour l’annulation de 67% de sa dette due au Club de Paris en 2004.
Très effacé et taciturne, sa brillante carrière et ses prestigieuses expériences devraient le propulser au devant de ses concurrents mais l’argentier doit améliorer sa communication qui se limite à l’anglais alors que la banque exige la maitrise d’au moins deux langues : le français et l’anglais.
Sierra Léone : Amura Kamara
Actuel ministre sierra-léonais des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale depuis 2012, cet économiste a eu à diriger la Banque centrale de 2007 à 2009 sous la pression des pays donateurs. Ce cursus auquel s’ajoute une courte expérience au FMI avant 2007 a fait de lui un habitué des grands dossiers.
A Washington DC, l’économiste s’est certainement habitué aux logiques de Breton Woods, indispensable pour conduire les destinées d’une institution multilatérale comme la Banque Africaine de Développement.
Nigeria: Akinwumi Adesina
Dr Adesina fut le premier étudiant à décrocher un Bachelor en Economie Agricole avec mention à l’Université d’Ife, en 1981 avant d’obtenir son PHD en 1988 à l’Université Purdue aux USA. Nommé ministre de l’Agriculture en 2010, il a eu à diversifier son background scientifique avec l’approche pragmatique de la Fondation Rockefeller où il a occupé de hautes fonctions entre 1998 et 2008.
Pendant deux ans, de 2008 à 2010, il présidera l’Association africaine des économistes spécialistes de l’Agriculture. Son engagement pour l’agriculture africaine lui a valu d’être distingué en 2007 du prix «Yara à Oslo».
Accumulant plus de 20 années d'expérience, Dr Adesina défend les investissements agricoles dans l'une des économies les plus dynamiques de l'Afrique grâce à des réformes politiques audacieuses. Il est l’un des 17 leaders consultés par Ban Ki-Moon dans le cadre des objectifs millénaire pour le développement.
Le soutien de l’ancienne directrice générale de la Banque mondiale, Ngozi Okonjo-Iweala pourrait lui être bénéfique. Le fait que le Nigéria soit le plus solide «bailleur» de cette institution bancaire panafricaine constitue un autre détail non négligeable favorable à ce candidat.
Mali : Birama Sidibé
Son expérience dans le système économique et financier international le démarque de ses challengers. Considéré comme le favori de cette élection, Birama Sidibé engrange plus de 30 ans d’expérience dans les rouages des finances, tant sur le plan africain qu’international.
Après 24 ans à la Banque africaine de développement et Shelter Africa dont il fut directeur général, Birama Boubacar Sidibé est nommé vice-président de la Banque islamique de développement (BID) en janvier 2009.
Son professionnalisme et son sens élevé du devoir sont reconnus et respectés du monde des finances et de l’économie mondiale. Pour beaucoup, il incarne la nouvelle génération des économistes et des managers en développement du continent. Fort de ces expériences, Birama Sidibé entend «insuffler une nouvelle dynamique à l’institution financière africaine».
Zimbabwe : Zondo Thomassakala
Ayant débuté sa carrière au poste de Chargé de prêts associé, M. Sakala a acquis une expérience riche et variée des opérations institutionnels et de gouvernance dans le domaine bancaire qu’il a intégré depuis 1983.
Au fil des ans, il travaillé dans trois complexes, franchissant les différents échelons pour occuper ensuite plusieurs postes de direction. Il a ainsi été successivement nommé Chef de la division en charge du développement des ressources humaines pour l’Afrique de l’Est; Chef de la division de l’éducation au sein du département du développement social pour la région Nord, Est et Sud, et enfin Représentant-résident du bureau de la Banque au Nigéria.
En mars 2007, M. Sakala a été nommé Directeur de l’équipe de mise en œuvre de la réforme (RIT) placée sous la responsabilité directe du Président, avec pour mission d’assurer la coordination de la mise en œuvre des principales réformes institutionnelles en cours.
En sa qualité de Vice-président, M. Sakala chargé des programmes pays, régionaux et des politiques à la Banque africaine de développement (BAD) contribue à l’orientation stratégique générale de l’Institution.
Tunisie : Jalloul Ayed
Son pays a été la terre d’accueil de la BAD lors de la crise ivoirienne. Jalloul Ayed, ancien ministre des Finances de la Tunisie espère faire de la première structure financière en Afrique, «un train fort pour la réalisation du développement et de la prospérité du continent».
L'intégration africaine, le développement des petites et moyennes entreprises et la réforme du système financier du continent constituent, selon lui, les grandes lignes de la vision du candidat tunisien. Ce banquier international s’attend à un plus grand appui politique, logistique et diplomatique avec l’arrivée du nouveau gouvernement tunisien.
Tchad : Bedoumra Kordjé
Titulaire du diplôme d’Ingénieur civil des télécommunications de l’Ecole Nationale Supérieure des Télécommunications de Paris (France) en 1979 et de la Maîtrise d’électronique, d’électrotechnique et d’automatique de la faculté des Sciences de l’Université Paul Sabatier à Toulouse en 1977, Bedoumra Kordjé est le dernier à avoir annoncé sa candidature. Il talonne la capverdienne qui est au top d’un sondage réalisé par le magazine Financial Afrik.
Successivement ministre du Plan, de l’Economie et de la Coopération internationale, Secrétaire général de la présidence puis ministre des Finances, M. Kordjé cumule une longue expérience de plus de 29 ans au sein de la Banque Africaine de Développement dont 13 années à des postes d’encadrement qui lui permettent de maitriser les rouages de l’administration.
Le Tchadien a eu également à présider le Conseil d’Administration de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC) et le Comité Ministériel de l’Union Monétaire de l’Afrique Centrale (UMAC). L’un des challenges de cet économiste, c’est l’atteinte du point de décision de l’initiative PPTE.
Crée en 1964, la Banque Africaine de Développement amorce un tournant décisif de son histoire après un premier cinquantenaire, avec pour objectif fondamental de «contribuer au développement économique et au progrès social de ses États membres».
L’institution fonctionne sous la direction du Président, qui est, le représentant légal de la Banque, le Président du Conseil d'administration, et le Chef du personnel de la Banque. Ce dernier est élu par le Conseil des gouverneurs, pour un mandat de 5 ans, renouvelable une fois.
Larissa AGBENOU