Sharm El-Sheikh (© 2023 Afriquinfos)- «COP27, COP africaine», tel était le slogan présent sur toutes les lèvres lors de nouvelle cette conférence sur le changement climatique. Organisée en terre africaine, plus précisément à Sharm El-Sheikh, en Égypte, du 6 au 18 novembre 2022, cette COP vient notamment rappeler les nombreux défis climatiques auxquels l’Afrique est confrontée, dans un contexte où les enjeux sécuritaires sont déjà vifs. Durant ces deux semaines, plus de 100 chefs de gouvernements se sont réunis afin non plus de discuter, mais de mettre véritablement en place des politiques proactives.
En effet, alors que l’Afrique est seulement à l’origine de 3% des émissions carbone globales. la situation climatique continentale est de plus en plus alarmante, exacerbant la vulnérabilité des populations et limitant considérablement les efforts de développement socio-économique des pays.
Décarboner l’économie mondiale apparaît comme un prérequis essentiel pour tous. Dans ce cadre, les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) semblent pouvoir jouer un rôle clé dans la réponse à apporter aux grands changements environnementaux, notamment en Afrique.
Le numérique, un outil en faveur de la transition écologique
Le continent africain est l’un des continents les plus vulnérables au réchauffement climatique. Inondations, vagues de chaleur, cyclones tropicaux, sécheresses, etc. Les conséquences sont nombreuses et les impacts sur les communautés le sont d’autant plus. Si la population africaine représente plus de 20% de la population mondiale, elle n’est pourtant à l’origine que de 3% des émissions mondiales à effet de serre. Ce constat fait, il est donc impératif de déployer des mesures permettant de réduire les émissions de CO2 et ainsi limiter les effets délétères sur les populations.
Dans ce cadre, il est plus que crucial de tendre progressivement – et rapidement – vers la neutralité carbone. Il est, en effet, de plus en plus admis qu’il ne sera pas possible de maîtriser les impacts environnementaux sans le recours au numérique. L’innovation technologique, à condition qu’elle soit durable, peut, en effet, être ce pilier qui permettra à l’Afrique de lutter contre le changement climatique, tout en étant un puissant vecteur de croissance socio-économique. Selon une étude du Global e-Sustainable Initiative datant de 2016, les TIC seraient en mesure de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20% d’ici 2030, dans le monde.
Ce constat est également partagé par la Banque africaine de développement (BAD), qui a lancé en décembre 2018 un espace de discussion portant sur l’importance des TIC dans la lutte contre le réchauffement climatique. En proposant de nouveaux modes de consommation plus écologiques, les nouvelles technologies apparaissent ainsi en mesure de participer à la réduction des émissions de carbone, tout en renforçant l’accès des pays africains aux sources d’énergies propres. Une transformation numérique responsable et alliée de la transition écologique est le souhait de nombreuses voix et celle-ci n’est pas qu’une simple utopie en Afrique !
Rappelons que le continent possède plus de 60% de l’énergie solaire mondiale. L’Afrique doit donc se positionner comme un acteur phare du développement durable, celui-ci conditionnant parallèlement une croissance socio-économique à plus grande échelle. Telle est l’ambition des GreenTech qui fleurissent de plus en plus. L’entreprise Easy Solar en est un exemple idoine.
Co-fondée par une Sierra-léonaise, la jeune pousse distribue et finance des solutions et appareils solaires afin de faciliter l’accès à l’énergie renouvelable aux communautés peu raccordées au réseau national. Entre 2016 et 2019, la solution développée par Easy Solar a bénéficié à plus de 200.000 personnes. En Algérie également, une start-up du nom de Green AI vend des biodigesteurs afin que les particuliers, agriculteurs et restaurateurs vivant en zones reculées créent leur propre biogaz et électricité à partir de leurs déchets.
La technologie en faveur de la protection de l’environnement est également au cœur des stratégies des multinationales, qui voient dans l’innovation technologique l’un des piliers de la lutte contre le changement climatique. Le géant chinois des infrastructures Huawei a ainsi fait du slogan « Tech for a Better Planet » une véritable promesse d’action.
L’entreprise investit constamment dans la réduction des émissions de CO2, la promotion des énergies renouvelables, la contribution à une économie circulaire et la conservation de la nature grâce à la technologie. L’exemple de la première tour verte d’Afrique co-construite par Telecom Egypt et Huawei reflète ainsi la volonté des entreprises de réduire les émissions de CO2.
Transition numérique, durable et développement socio-économique, un triptyque clé en Afrique
Il est communément admis dans le monde que l’énergie joue un rôle central. En effet, sans énergie, l’accès à l’électricité demeure vain, limitant alors considérablement l’activité économique et l’innovation technologique. Cela empêche parallèlement les pays de répondre aux besoins de leurs populations et d’investir dans le potentiel que représente à juste titre ce capital humain.
Dans ce cadre, l’accès aux infrastructures et aux technologies nécessaires au développement du solaire est une condition indispensable. En Afrique subsaharienne, quelque 600 millions de personnes n’avaient toujours pas accès à l’électricité en 2022. Plus précisément, au Bénin, seule 40% de la population a accès à l’électricité, les disparités entre les zones urbaines (70%) et rurales (18%) étant particulièrement fortes. Dès lors, le déploiement d’une énergie moderne, durable et accessible apparaît comme un prérequis, notamment pour combler la fracture numérique sur le continent et réduire des inégalités déjà criantes.
Cherchant à répondre à la carence infrastructurelle en Afrique tout en améliorant le quotidien des populations, l’entreprise Huawei a déployé la solution Rural Solar Power, notamment au Cameroun. Reposant sur des panneaux solaires hors réseau combinant les réseaux Internet et l’énergie solaire, cette solution déployée à destination des zones rurales forme un véritable écosystème reposant sur les réseaux, l’accès à l’électricité et l’accès aux applications.
Entre 2014 et 2021, trois phases de ce projet ont été signées entre Huawei et le ministère de l’Eau et de l’Énergie camerounais, permettant ainsi à près de 350 villages, soit quelque 40 000 ménages, de bénéficier de sources d’électricité fiables. La multinationale MTN en Côte d’Ivoire s’est également emparée de ces sujets à travers la mise en place d’un partenariat avec la société ivoirienne d’énergie solaire hors-réseau Lumos. L’objectif ? Fournir de l’électricité à des millions de personnes n’ayant pas accès à une électricité sûre, fiable ou abordable dans le pays. Grâce à la mise en place de systèmes d’électricité reposant sur l’énergie solaire, Lumos est notamment en mesure de permettre à ses clients de payer l’électricité avec leur téléphone portable.
Ainsi que le soulignent ces exemples, les investissements pour réduire la carence infrastructurel sont essentiels. Selon les chiffres récemment donnés par la Banque mondiale, près de 20 milliards de dollars seraient nécessaires pour parvenir à l’électrification universelle en Afrique subsaharienne. Outre les financements, l’investissement dans le capital humain est tout autant essentiel.
La jeunesse doit en effet être au cœur des actions en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Cela passe notamment par la mise en place de formations dans le secteur des nouvelles technologies, qui, tout en encourageant l’entrepreneuriat, stimulent également la croissance socio-économique des pays. Le programme éducatif Africa Energy Fellowship for Young Energy Leaders vise ainsi à former des leaders dans le secteur de l’énergie dite intelligente contribuant sur le long terme à la décarbonisation de l’Afrique. Ce programme lancé par l’Institut de Formation aux Technologies des Énergies renouvelables, est issu d’une fusion de partenariats entre acteurs institutionnels publics et privés tels que le géant ENEL.
Cependant, si les investissements sont essentiels, l’appui et l’engagement des États demeure crucial. La mise en place de partenariats s’avère particulièrement essentielle afin d’atteindre l’Objectif de Développement Durable (ODD) n°7 des Nations Unies, devant garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable, cet objectif garantissant notamment la mise en place concrète des autres ODD.
Les TIC ont un rôle clé à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique, celle-ci contribuant également au développement socio-économique du continent. Cette transition numérique vers laquelle les pays africains se dirigent de plus en plus ne sera pas possible sans un recours effectif aux technologies vertes. Durable, l’économie numérique pourra alors pleinement être porteuse de nouvelles opportunités pour les populations africaines
G. G. Edem