Les responsables de l’opposition camerounaise s’indignent contre un projet de loi actuellement en vote. Ils dénoncent particulièrement l'article 2 du texte, qui «punit de la peine de mort celui qui, à titre personnel, en complicité ou en coaction, commet tout acte ou menace d'acte susceptible de causer la mort, de mettre en danger l'intégrité physique, d'occasionner des dommages corporels ou matériels, des dommages aux ressources naturelles, à l'environnement ou au patrimoine culturel dans l'intention d'intimider la population, de provoquer une situation de terreur ou de contraindre la victime, le gouvernement et/ou une organisation nationale ou internationale, à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque ou à adopter ou à renoncer à une position particulière ou à agir selon certains principes ».
Mais le passage qui suscite le plus leur désapprobation vise des personnes accusées « de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation des services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations ». Pour le président du Mouvement camerounais pour la social-démocratie (MCPSD), Vincent-Sosthène Fouda, le projet de loi soumis à la lecture et à l'adoption des députés est un fourre-tout, tant dans la définition du terrorisme que dans la qualification même des actes dits terroristes.
Député de l'Union des populations du Cameroun (UPC), Robert Bapoh Lipot estime, à travers ce texte, qu'on veut ôter au chef de l'Etat Paul Biya sa promesse faite au peuple camerounais dans sa volonté d'être, pour les générations futures, celui qui aura apporté la démocratie et la prospérité au Cameroun. Son collègue du Mouvement pour la défense de la République (MDR), Pierre Laoussou, pense pour sa part qu'une telle loi, si elle était promulguée, signerait la fin du droit de grève qui sera facilement assimilé à du terrorisme.
Mais le plus virulent parmi les critiques est sans doute le président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), Maurice Kamto, qui comme les autres exige le retrait d'un projet de loi liberticide, mais aussi évoque « une volonté perverse de terroriser le peuple camerounais et de caporaliser la société par un retour aux heures les plus sombres de notre histoire politique qui avaient donné naissance, entre autres, à la tristement célèbre Ordonnance de 1962 sur la subversion ».
Pour ce juriste, par ailleurs ex-membre du gouvernement démissionnaire, ce texte apparaît manifestement comme la réponse du régime de Yaoundé au soulèvement populaire qui a entraîné la chute du régime dans divers pays africains, et en particulier au Burkina Faso. Selon M. Kamto, le projet de loi crée manifestement une infraction politique puisqu'il interdit de la sorte l'expression collective, même pacifique, d'un désaccord politique et assimile, en définitive, les populations camerounaises qui manifesteraient leur mécontentement à des terroristes. «Le gouvernement ne saurait faire régner la peur dans le pays et priver les camerounais de leur liberté d'expression et de manifestation, de leur droit d'exprimer leur désaccord avec un gouvernement sourd et indifférent à leurs revendications même les plus légitimes par une loi qui est contraire aux règles les mieux établies du droit international contemporain »,a-t-il commenté.
P. Amah