Exprimée par le ministre camerounais du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, en marge des travaux de la 75e Assemblée générale de l'Alliance des pays producteurs de cacao (COPAL, basée à Lagos au Nigeria) du 8 au 12 octobre à Yaoundé, la préoccupation induit, de l'avis même de ses acteurs, la nécessité pour l'industrie cacaoyère africaine de la mise en place d'une chaîne de valeur incitant l'investissement local dans la transformation du produit.
« Au cours du vingtième siècle, on a pu observer une augmentation considérable de la production cacaoyère au niveau mondial, qui a attient plus de 3 millions de tonnes. Sur ce total, près de 70% sont produits par la seule Afrique de l'Ouest. Bien que la production ait augmenté à un rythme annuel de 2,5% depuis le milieu de la dernière décennie, la consommation n'a augmenté que 1% », constate une étude conjointe dirigée par le Nigérian Eugène Yahaya.
Pour Mbarga Atangana qui relève le niveau de la production continentale entre 70 et 75%, la consommation locale est limitée à 3,3%. Ce qui revient à dire que achève le cacao africain essentiellement son parcours auprès des consommateurs extérieurs par le biais des exportations qui représentent 40% des recettes de l'Etat en Côte d'Ivoire et 30% respectivement au Ghana et au Cameroun.
Comme l'illustre le cas du Cameroun qui compte les Pays-Bas, l' Allemagne, l'Espagne, la Belgique, le Danemark, la Grande-Bretagne, l'Italie et le Portugal parmi ses clients en plus de la Russie et de la Malaisie pour le reste du monde, l'Europe représente la principale destination de ce cacao.
Un marché où plane le spectre du renforcement de la réglementation sur le cadmium, el plomb et autres métaux lourds dans le cacao, sans oublier l'entrée en vigueur dès le 1er avril 2013 du règlement de la Commission européenne sur la teneur en hydrocarbures aromatiques polycycliques dans les fèves de cacao, fait savoir le ministre camerounais.
Pour protéger ses consommateurs, l'Union européenne (UE) envisage en effet la mise en oeuvre d'une nouvelle législation imposant des limites plus strictes sur la contamination en métaux lourds dans les produits alimentaires, dont le cacao et les produits du cacao, une décision justifiée par un constat de teneurs élevées en métaux lourds dans les fèves de cacao provenant de nombreux pays producteurs.
Dominée en Afrique par les trois grands producteurs mondiaux que sont justement la Côte d'Ivoire, le Ghana et le Nigeria, et puis le Cameroun, cinquième mondial, cette filière dite stratégique est structurée en quatre catégories d'acteurs : les producteurs, les coxeurs ou les acheteurs locaux, les acheteurs agréés et les organisations paysannes.
Une enquête menée par les chercheurs Aboubakar Iyabano, Dorothy Fon et Cyrille Kamdem dans les régions du Sud et du Sud-Ouest du Cameroun, deux des sept bassins de production de ce pays d'Afrique centrale, a identifié quatre types de plantations : les jeunes plantations, les plantations en pleine production, les plantations en phase du déclin de production et les vieilles plantations.
« Deux types de circuits de commercialisation ont été identifiés : le circuit à un intermédiaire et le circuit à deux intermédiaires. D'une manière générale, les producteurs sont les acteurs qui supportent les charges les plus élevées. Parmi les intermédiaires, les acheteurs agréés ou LBA sont ceux qui supportent les charges de commercialisation les plus faibles », souligne l'étude.
Dans une présentation dont Xinhua a obtenu copie, elle précise en outre que « les marges moyennes des producteurs sont les plus élevées pour ceux qui commercialisent aux acheteurs agréés, suivis de ceux qui vendent aux coopératives et enfin aux coxeurs. Parmi les acheteurs, les marges les plus élevées s'observent chez les acheteurs agréés ou LBA, suivis des coxeurs et enfin des coopératives ».
Introduite par les Portugais dans le golfe de Guinée, la cacaoculture est produite depuis plus de 200 ans dans la plupart des pays producteurs d'Afrique, selon la COPAL. La Côte d'Ivoire, le Ghana et le Nigeria sont les seuls jusqu'ici à avoir emboîté lepas de la certification, reconnu comme un système avantageux pour l'amélioration des conditions de vie et de travail des producteurs ainsi que leur rémunération.
D'après les estimations, près de 70.000 exploitations en Côte d' Ivoire contre 8.000 au Ghana et 2.000 au Nigeria ont déjà pu être développées pour une adaptation à ce mécanisme défini par le Conseil international du cacao (ICCO, basé à Londres en Grande- Bretagne) comme un indice servant à attester de façon transparente la conformité du produit aux exigences du marché et aux normes de durabilité.
Cette expérience a permis à l'industrie cacaoyère ivoirienne de recevoir pour ses coopératives 1,5 milliard de francs CFA (3 millions USD) de la part du groupe Armajero, spécialisé dans le cacao certifié.