Son agression, à l’époque avait provoqué l'indignation. Esdras Ndikumana dont les articles avaient gêné le pouvoir burundais avait été arrêté le 2 août 2015 à Bujumbura par les forces de sécurité gouvernementales, alors qu’il prenait des photos sur les lieux d’une attaque à la roquette.
Aujourd’hui Esdras Ndikumana, est récompensé pour avoir subi les dérives du pouvoir burundais. Agé de 54 ans, le journaliste avait dû ensuite rapidement quitter le pays par crainte pour sa sécurité. A ce jour, il est actuellement réfugié au Kenya.
Selon les organisateurs du prix, le journaliste est récompensé «pour ses analyses de la situation dans la région des Grands lacs». Pour eux, ce correspondant de l’Agence France-Presse et de Radio France Internationale «illustre par ses compétences, son courage et son talent, la difficulté d’être journaliste aujourd’hui dans un pays en crise». Après avoir appris la remise du prix, le lauréat a rendu hommage aux victimes burundaises sur son compte twitter.
Un journaliste adulé
Reconnu pour son professionnalisme et son dur labeur, Esdras Ndikumana est l’un des journalistes populaires et respectés du Burundi. Ses compétences lui ont valu de devenir le correspondant de Radio France Internationale au Burundi depuis 2002, puis de l’Agence France presse. Il est réputé pour rédiger des articles «audacieux» dans un pays classé 145ème sur 185 dans le Rapport 2015 de Reporter Sans Frontières sur la liberté d’expression. Ce qui lui vaut d’être perpétuellement épinglé par la justice. En 2011,le journaliste a comparu devant le Procureur Général près la Cour d'appel de Bujumbura, après avoir été accusé d’avoir collaboré avec les journalistes de la télévision française M6 qui enquêtaient sur l'affaire Patrice Faye. A l’issue de sa récente agression, deux sociétés de médias françaises, RFI et l’AFP, avaient exigé par un communiqué rendu public le 13 août que la lumière soit faite sur cette agression de la part du Service national de renseignements (SNR).
Sans réponse, RFI et l’AFP avaient de nouveau écrit en septembre dernier au président burundais Pierre Nkurunziza, en vain. Le procureur général de la République du Burundi a toujours affirmé de son côté qu’il n’y avait "pas d’éléments" permettant d'enquêter sur cette affaire. «Ce silence des autorités burundaises nous pousse à porter plainte en justice", affirment les deux médias, qui précisent que "l’aboutissement rapide de l’enquête est une condition impérieuse au rétablissement de la confiance dans le respect de l’État de droit et de la liberté d’expression au Burundi».En attendant l’issue du procès, le journaliste burundais bénéficiera d’un montant de 2.000 euros pour avoir obtenu ce prix.
Le prix de la presse de diplomatie française créé par l’APDF qui compte 140 membres, récompense chaque année un journaliste professionnel pour son travail sur un sujet de l’actualité internationale. Le prix 2014 avait été décerné au journaliste indépendant Harold Thibault, 30 ans, pour une série d'enquêtes sur la lutte anticorruption menée sous le président Xi Jinping.
Esdras Ndikumana recevra officiellement le prix en janvier 2016 en France, lors d’une cérémonie au ministère des Affaires étrangères, en présence du chef de la diplomatie française, Laurent Fabius.
Larissa AGBENOU