Tunisie: compte à rebours pour les élections de la Constituante

Afriquinfos Editeur
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Venant couronner la révolution tunisienne du 14 janvier 2011, l'Assemblée constituante tunisienne demeure la deuxième après celle du 25 mars 1956, soit quelques jours après la proclamation de l'indépendance de la Tunisie. Ainsi, les deux assemblées constituantes de 1956 et de 2011 venaient abolir deux régimes, respectivement le régime monarchique et celui de Zine El Abidine Ben Ali.

L'Assemblée constituante qui coulera des élections du 23 octobre courant, devra rédiger une nouvelle Constitution pour la Tunisie d'autant plus qu'elle devra former un nouveau gouvernement de transition. Ce dernier exercera jusqu'à l'élection d'un nouveau président de la République tunisienne.

Cette assemblée se chargera, par conséquent, de l'organisation des élections présidentielles et législatives prochaines en Tunisie.

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Actuellement, les avis et positions se croisent en Tunisie, quant à la durée de la mission de l'Assemblée constituante, son rôle, les fondements de la nouvelle Constitution tunisienne, à même d'appeler à l'organisation d'un référendum populaire parallèlement aux élections.

Certains acteurs politiques et médiatiques tunisiens plaidaient, depuis le début de septembre 2011, pour la limitation à six mois de la mission de l'Assemblée. D'autres acteurs sont allés plus loin pour défendre la transformation de la Constituante en une instance de contrôle du gouvernement transitoire, et elle sera chargée de la préparation des élections présidentielles et législatives dans un délai de 12 à 18 mois.

Selon M. Yassin Brahim, directeur exécutif au sein du parti Afek Tounes (Perspectives de la Tunisie), "l'objectif majeur de l'Assemblée constituante demeure la Constitution".

L'Assemblée constituante tunisienne, a-t-il indiqué à l'Agence de presse Xinhua, "aura deux autres pouvoirs à savoir l'exécutif puisqu'elle va mener un gouvernement et le législatif décidant entre autres de la manière dont la justice sera gérée pendant la phase de la Constituante".

La lecture dans les différents programmes électoraux publiés officiellement par les partis politiques, indépendants et coalitions, révèlent que la nouvelle Constitution devra consacrer la souveraineté du peuple à travers l'instauration d'institutions indépendantes et élues démocratiquement.

Pour le président du parti Al Majd (Gloire) M. Abdelwahab Hani, il s'agit de la deuxième assemblée constituante dans l'histoire de la Tunisie, après celle "tout juste après l'indépendance en 1956, laquelle exerça à la fois les pouvoirs constituant, exécutif tout en donnant naissance au pouvoir législatif".

La différence entre les deux assemblées tourne, selon M. Hani, autour de la question de la "légitimité de l'exécutif" qui manque aujourd'hui en Tunisie. La nouvelle la Constituante "devra avoir un rôle constituant et un rôle obligatoire de gestion et d'organisation des affaires publiques du pays",  juste le temps de rédiger la Constitution.

"Une année ou une année et demi pourrait être une durée raisonnable de l'Assemblée constituante qui va être élue le 23 octobre 2011", a affirmé le président du parti Al Majd dans une déclaration à l'Agence de presse Xinhua.

Selon lui, pour rédiger la nouvelle Constitution, deux facteurs demeurent indispensables: Un texte et un processus de compromis. "Un texte, a-t-il expliqué, mais juste avant un processus de compromis qui sera le garant du consensus autour de la Constitution, la stabilité du pays ainsi que la prospérité pour tous les citoyens".

Deux ou trois mois, comme durée de mission de l'Assemblée constituante tunisienne, ne serait pas suffisante, selon M. Hani, dans la mesure où cette Constituante exercera également le pouvoir exécutif en gérant les affaires courantes du pays. Ce qui rend sa tâche plus difficile d'où la nécessité d'étendre la durée de sa mission.

Toujours dans le cadre de la Tunisie d'après-Constituante, les positions de la classe politique tunisienne restent encore éparpillées concernant le régime politique qui va être adopté en Tunisie.

"La Tunisie n'est pas encore mûre pour un régime parlementaire pure", a affirmé à l'agence de presse Xinhua le directeur exécutif du parti Afek Tounes M. Yassin Brahim, précisant que la Tunisie "devrait avoir un régime parlementaire amélioré où les pouvoirs du président de la République soient limités tout en optant pour un pouvoir bicaméral à deux chambres: la première pour le parlement et la présidence, et la seconde proportionnelle aux différentes régions tunisiennes".

La question qui se pose fréquemment actuellement en Tunisie, est celle d'assurer le consensus au sein de l'Assemblée constituante. Pour aboutir à ce consensus, certains facteurs doivent être évidents à savoir une mini-constitution, baptisée "Constitution El Amen" (constitution de la quiétude) pour assurer la transition démocratique en Tunisie, mais également pour rassurer la stabilité constitutionnelle le plus tôt possible, a expliqué Abdelwahab Hani, président du parti Al Majd.

Pour se faire, a-t-il poursuivi, force sera d'éviter les questions incitant à la discorde notamment celles liées à l'identité du pays et focaliser sur des questions pratiques dont "la limitation des prérogatives du Chef d'Etat, la coordination entre l'aspect constatant et législatif de la Constituante, le contrôle de la constitutionnalité des lois, ainsi que l'initiation d'une procédure de destitution du Chef d'Etat en cas de manquement à ses devoirs …

Sur un autre plan, la Cellule communication du Premier ministère tunisien avait annoncé, il y a une semaine, que le gouvernement transitoire actuel aurait la tâche de gérer les affaires courantes de la Tunisie pour cinq à dix jours au maximum après le 23 octobre, le temps que l'Assemblée constituante proclame son nouveau gouvernement.

Dans l'attente de l'exercice officiel du pouvoir par l'Assemblée constituante et pour la continuité de la gestion des affaires courantes du pays,  cette durée, a souligné le président du parti Al Majd, ne devrait pas dépasser une semaine, durée suffisante à la Constituante pour s'arranger et se mettre en orbite, tout en déconseillant de faire recours à des responsables du gouvernement actuel au sein de la prochaine administration tunisienne.

Ainsi, le compte à rebours a commencé pour les élections jugées "décisives", non seulement par la classe politique tunisienne mais également par le citoyen ordinaire qui ne cesse d'afficher son aspiration à une nouvelle ère où il aura ses droits fondamentaux dont celui à l'éducation, à l'habitation, à la santé, à la liberté d'expression, tout en préservant son identité arabo-musulmane.