Infrastructures : vaste programme de 360 milliards USD de l’UA pour réduire les déficits du continent

Afriquinfos Editeur
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Elaboré en concertation avec la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), la Banque africaine de développement (BAD) et l'Agence de planification et de coordination du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), ce vaste programme ambitieux se veut une réponse aux importants déficits infrastructurels du continent en vue de l'amélioration de la compétitivité des économies et d'un meilleur rapprochement des peuples, selon l'UA.

« L'Afrique a un déficit important de ses infrastructures aux niveaux national, régional et continental. Ce qui bloque le processus de son développement et particulièrement le processus de l'intégration physique et de mouvement des biens et des services », a souligné à Xinhua le directeur des infrastructures et de l'énergie de la Commission de l'UA, Aboubakari Baba-Moussa.

D'après lui, « seulement moins de 30% d'Africains ont accès à l'énergie durable. Seulement moins de 30% d'Africains ont accès à des routes praticables à moins de deux kilomètres de leurs résidences. En matière de télécommunications, le taux reste également très faible. Malgré que nous ayons une croissance assez spectaculaire aux services mobiles, l'accès aux nouvelles technologies de l'information par les fibres optiques modernes aujourd'hui reste très faible ».

La Stratégie de développement du secteur privé de la BAD estime que les services d'infrastructure en Afrique coûtent deux fois plus cher en moyenne que dans les autres régions en développement et observe que les tarifs douaniers sont exponentiellement élevés. Ainsi, les firmes d'Asie orientale économisent près de 70% sur leurs coûts de transport par rapport à leurs homologues africaines, et celles d'Amérique latine et d'Asie du Sud 50% environ.

Dans ce secteur, l'évaluation effectuée par le PIDA a révélé que le coût économique total des inefficacités du Réseau africain d'infrastructures régionales de transport (ARTIN) s'élevait à 172 milliards USD. Ces inefficacités, note l'étude, comprennent les coûts du transport par les corridors et du transport aérien, ainsi que celui de la demande de transport aérien et de fret découragée.

Le PIDA repose sur l'hypothèse que les pays africains réaliseront un taux de croissance économique de 6% par an en moyenne entre 2010 et 2040, alimenté par la croissance démographique, la progression des niveaux d'instruction et d'absorption des technologies. Pour l'UA, « une telle croissance signifie que sur les 30 ans qui nous séparent de 2040, le PIB ( produit intérieur brut) des pays africains sera multiplié par six et que le revenu moyen par habitant dépassera $10.000 dans tous les pays ».

« Ce programme est évalué à près de 360 milliards de dollars, avec un premier volet de programme prioritaire qu'on appelle PAP ( Programme d'actions prioritaires, ndlr) de 68 milliards de dollars pour les 10 prochaines années. Cela veut dire qu'il faut mobiliser environ 7 milliards de dollars par an pour permettre à l'Afrique de faire face à son déficit qu'on vient de dire tout à l'heure », explique Aboubakari Baba-Moussa.

« La mise en loeuvre de ce projet, précise-t-il, va nous permettre de passer de 30 à 70% d'accès à l'énergie durable par exemple, de multiplier au moins par 6 la capacité de transport de l'Afrique actuellement, de multiplier la capacité de l'Afrique en matière de Tic et enfin d'eaux transfrontalières et de combler la génération et la gestion des ressources transfrontalières dont pour l'instant nous n'exploitons que moins de 20% ».

Bâti autour de quatre pôles d'activités (transports, énergie, télécommunications et nouvelles technologies de l'information et de la communication eaux transfrontalières), le PIDA est un projet à long terme qui projette l'Afrique dans les années 2040, avec une partie à moyen et court terme dans les années 2020, ajoute encore ce responsable de l'Union africaine.

Les projets et les programmes dans les secteurs de l'énergie et des transports représentent environ 95% du coût total, ce qui montre la nécessité cruciale d'investissements transformationnels dans ces secteurs afin de soutenir le commerce africain, d'encourager la croissance et de créer des emplois, laisse entendre la Commission de l'UA.

Quinze projets phares sont identifiés dans le premier secteur et 24 dans le second. Ils comprennent par exemple la construction d'un grand barrage « Millenium Renaissance » de 5.250 MW dans le bassin du Nil en Ethiopie, d'un coût de 8 milliards USD, pour alimenter el marché intérieur et exporter de l'électricité vers marché des Etats de l'Afrique orientale.

En République démocratique du Congo (RDC), « Inga III », du nom de la troisième phase du complexe hydroélectrique développé sur le fleuve Congo, entend réaliser une capacité supplémentaire de 4.200 MW avec 8 turbines, pour un investissement de 6 milliards USD. D'un montant de 2,8 milliards USD, la Zambie attend de se doter dans le bassin du Zambèze d'une centrale de 1.600 MW pour une production destinée à l'exportation, et le Mozambique 1.500 MW pour un coût de 2,4 milliards USD.

Entre l'Egypte et l'Afrique du Sud via le Soudan, le Sud- Soudan, l'Ethiopie, le Kenya, le Malawi, le Mozambique, la Zambie et le Zimbabwe, une ligne de 8.000 km de transmission électrique est envisagée, pour un investissement de 6 milliards USD. Encore une fois, 3.800 km devront relier la RDC à l'Afrique du Sud via l'Angola, le Gabon et la Namibie, pour un coût de 10,5 milliards USD.

La mobilisation de fonds, insiste-t-on à la Commission de l'UA, exigera une volonté politique nationale forte et déterminée pour faire face à l'écart de financement attendu. Selon les estimations des études, le financement attendu de sources intérieures ( publiques ou privées) pourrait représenter plus de 50% du financement total du PIDA dès 2020. « Cette proportion augmenterait pour atteindre les deux tiers environ en 2030 et jusqu'à 75% en 2040 », ajoute-t-on.

A en croire Baba-Moussa, « sans même faire d'efforts, l'Afrique dispose au moins des 20% des financements recherchés. Le plus difficile, c'est la préparation des projets. C'est à ce niveau qu'on veut mettre l'accent pour que ces projets deviennent bancables ».