Bilan 2011 – Afrique subsaharienne: stabilité en général, malgré quelques foyers de tension

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L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE PEU INFLUENCEE PAR LE "PRINTEMPS ARABE"

Le "Printemps arabe", ainsi appelé par certains, a déjà provoqué la chute successive de plusieurs dirigeants arabes longtemps au pouvoir: Ben Ali, Hosni Moubarak, Abdallah Saleh, sans compter le tonitruant Mouammar Kadhafi, tombé sous les tirs de l'Otan. Mais les rafales de ce "Printemps arabe", aussi fortes et meurtrières soient-elles, n'ont pas produit les mêmes effets en Afrique subsaharienne, en dépit de leur force de contagion.

Les quelques tentatives subversives entreprises par des extrémistes notamment au Sahel n'ont pas réussi à ébranler le socle institutionnel des pays de la région subsaharienne, selon des médias.

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Pour mémoire, après la tourmente du multipartisme des années 1990, la plupart des pays africains subsahariens ont fini par mettre en place des institutions relativement démocratiques et stables par rapport au passé. Certes, ce résultat n'a pas été obtenu sans coup férir.

Dès l'entrée au 21e siècle, les pays subsahariens n'ont pas ménagé leurs efforts pour préserver leur stabilité politique et assurer une gouvernance à visage plus démocratique et plus humain, suivant les tendances irréversibles de l'évolution du monde. En l'occurrence, l'Afrique subsaharienne, du point de vue général, semble aujourd'hui aspirer plus à la stabilité qu'à la "mutation" qui marque justement la physionomie politique et sociale du Moyen-Orient à l'heure actuelle. La stabilité y est donc devenue un leitmotiv de tous, les gouvernants comme les gouvernés. Dans tous les cas, il serait peu probable que l'Afrique subsaharienne connaisse, à l'étape actuelle, les changements aussi révolutionnnaires et aussi boulversants que ceux qui sont survenus depuis le début de l'année au Moyen-Orient, dont le processus de démocratisation vient à peine de s'ébranler, selon des analystes.

 

ELECTIONS: PLUS DE PEUR QUE DE MAL

2011 est une année électorale de l'Afrique subsaharienne. Un enjeu de taille, puisque 16 pays africains au sud du Sahara ont organisé des élections présidentielles: le Bénin, le Cap-Vert, la Gambie, le Libéria, le Niger et le Nigeria pour l'Afrique de l'Ouest; le Cameroun, la République centrafricaine, le Tchad, la Républque démocratique du Congo et Sao Tomé et Principe pour l'Afrique centrale; Djibouti et les Seychelles pour l'Afrique australe.

D'après les résultats du scrutin déjà annoncés, on en conclut que la majorité de ces élections se sont déroulées normalement ou presque, prouvant par-là la maturité politique grandissante des peuples africains, malgré la levée de boucliers des opposants et des pertes en vies humaines. La situation de l'Afrique subsaharienne, dans son ensemble, est alors restée sous contrôle, estiment des observateurs avertis.

Sur la liste des présidents élus ou réélus figurent Paul Biya du Cameroun, Idriss Déby du Tchad, Yoweri Museveni de l'Ouganda, Yahya Jammeh de Gambie, Michael Sata de Zambie, Goodluck Janathan du Nigeria, François Bozizé de la RCA, Ellen Jonhson Sirleaf du Libéria, Jorge Carlos Fonseca du Cap-Vert et Joseph Kabila en République démocratique du Congo (RDC).

Il faut néanmoins reconnaître que, le plus souvent, des actes de violence vont de pair avec les élections en Afrique. Au Nigeria, par exemple, au moins 121 personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessées dans les violences qui ont éclaté dans le nord du pays suite au scrutin présidentiel début avril. En RDC, les tensions post-électorales qui ont saisi Kinshasa depuis le vendredi 9 décembre, ont fait plusieurs morts. Le cas encore plus prégnant est celui de la Côte d'Ivoire: après le scrutin présidentiel de novembre 2010, marquée par une crise ayant fait au moins 3 000 morts, l'ancien président Laurent Gbagbo, aujourd'hui livré à la Cour pénale internationale (CPI) et son rival Alassane Ouattara ont tous les deux revendiqué la victoire en se proclamant respectivement élu président de la République. Il a fallu une intervention étrangère pour sonner le glas d'une crise nationale vieille de plus d'une décennie. Le pays s'attèle maintenant aux tâches difficiles de la reconstruction, de la réconciliation nationale et de la relance de l'économie.

LA CROISSANCE AU PROFIT DE LA STABILITE

Dans le contexte de la mondialisation, les pays africains sont parvenus à un large consensus: le développement économique est tributaire de la stabilité, et vice-versa.

D'après des données officielles, l'économie subsaharienne s'est rapidement développée depuis le milieu des années 1990. Pendant la période 1999-2008, la croissance a atteint en moyenne 4,6%, soit deux fois le taux de croissance de la décennie précédente. La crise financière de 2008, qui a plongé le monde dans la récession, a aussi porté un coup dur à l'Afrique subsaharienne. Cependant, l'économie africaine, qui tournait au ralenti, a montré sa capacité surprenante de résister au choc et a vite rebondi pour la reprise.

Pendant la même période, 17 pays de la région, dont douze à bas revenu, ont enregistré en moyenne un taux de croissance supérieur à 5%, les pays riches en ressources naturelles ayant accusé une croissance de 6%, à l'exemple du Nigeria (5,6%) et de l'Angola (11,1%). Au demeurant, des pays pauvres en ressources minières ont réalisé un taux de croissance de plus de 4%. L'Ethiopie, le Mozambique et l'Ouganda, qui font partie de cette dernière catégorie, ont également acquis une croissance de 7%. L'amélioration des conditions du commerce, la multiplication des échanges internationaux, l'élan du secteur tertiaire, l'afflux d'investissements, les progrès scientifiques et technologiques étaient autant de facteurs qui ont contribué à ce boom économique en Afrique subsaharienne. Au point que la revue "Economist" a arboré un immense optimisme: de 2001 à 2010, parmi les pays et entités économiques qui ont vu leur économie se développer le plus rapidement au monde, six se trouvaient en Afrique: Angola, Nigeria, Ethiopie, Tchad, Mozambique et Rwanda. On trouve déjà sur le ring de l'économie mondiale le "Dragon chinois", l'"Eléphant indien" et les "Tigres asiatiques", et pourquoi pas des "Lions africains"? La même publication a prévu un taux de croissance de 7% en Afrique dans les 20 années à venir, dépassant fort probablement celui de l'Asie!

De son côté, le Fonds monétaire international (FMI) a prédit en avril dernier que le taux de croissance économique des pays de l'Afrique subsaharienne pourrait atteindre 6,5% cette année contre 5,4% en 2010.

Mais des opinions moins en rose se font aussi entendre quant aux perspectives de développement de l'économie africaine. Le "Rapport sur le progrès de l'Afrique en 2011", publié par un groupe d'étude économique et socio-politique, dirigé par l'ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, avertit qu'une croissance de faible qualité et une tension sociale non maîtrisée remettraient en cause le développement durable et que l'Afrique risquerait ainsi de passer à côté des opportunités que lui offre l'Histoire.