Le Nord de la Côte d’Ivoire, asphyxié par le coronavirus

Économie et coronavirus en Côte d'Ivoire

Économie et coronavirus en Côte d’Ivoire | « Corona n’a qu’à partir! Nous laisser en paix ! » se lamente Fatima Koné, qui peine à vendre ses arachides sur le marché de Ferkessedougou, carrefour commercial du nord de la Côte d’Ivoire.

« Pour manger c’est difficile, j’ai cinq enfants. Mon mari est cultivateur de mangue, coton et anacarde (noix de cajou). Mais il ne vend plus non plus », dit-elle.

Ferkessedougou, communément appelé Ferke, et ses 160.000 habitants n’ont connu aucun cas de coronavirus, mais la ville subit de plein fouet la pandémie.

Les mesures sanitaires (fermeture des frontières aux voyageurs, isolement d’Abidjan) ont tari le flux de camions, bus et véhicules qui traversaient la ville, située stratégiquement sur la route nationale qui part d’Abidjan et son port vers les deux pays voisins enclavés que sont le Mali et le Burkina Faso. Ferke se trouve aussi sur la ligne de chemin de fer Abidjan-Ouagadougou.

Abidjan a concentré l’écrasante majorité des 8.000 cas de Côte d’Ivoire et les autorités ont « isolé » la capitale économique du reste du pays. Il faut une autorisation pour sortir ou se rendre à Abidjan.

En principe, les marchandises continuent de circuler librement dans le pays et dans ceux de la région, mais les hommes sont bloqués.

« Moi, j’allais souvent à Abidjan acheter des petites choses pour vendre dans ma boutique. Pour ça, il faut pouvoir choisir, discuter. Aujourd’hui ce n’est plus possible. J’ai perdu 40% de mon chiffre d’affaires puisque je ne peux plus voyager depuis le début de la crise », explique un boutiquier de Ferke sous couvert de l’anonymat.

Le petit commerce informel, qui fait vivre une grande majorité de la population ivoirienne, paie les pots cassés.

Les commerçants qui allaient à Abidjan avec fruits, noix de cajou, tomates, piments ou aubergines et en revenaient avec pagnes (tissus), habits et bonbons, sont désormais cloués à Ferké. Idem pour ceux qu vivaient de voyages de commerce au Mali ou au Burkina.

« Ca impacte très négativement la ville », affirme le maire Kaweli Ouattara. « Il n’y a plus la même affluence dans les marchés. Le chômage monte. Les jeunes qui faisaient des petits métiers sont inactifs. On a une hausse de la petite délinquance. Il y a des parents qui n’arrivent plus à payer la scolarité de leurs enfants. On demande de l’aide à l’Etat notamment pour les jeunes ».

« On ne travaille plus »

Sinali Coulibaly, mécanicien sur la place centrale Alassane Ouattara, allait régulièrement au Burkina et au Mali pour chercher des pièces détachées de mobylette.

« Je dois désormais en trouver ici. C’est plus cher et ça prend plus de temps. Avant je pouvais gagner 5.000 FCFA par jour (7,5 euros). Avec le virus, c’est plutôt 2.000 FCFA (3 euros) ». 

Bordée par des échoppes de garagistes, la place centrale est presque déserte. « Normalement il y a beaucoup de camions garés. Ils transportent du bétail, du sucre, des produits agricoles… Ils attendent ici un chargement et en profitent pour faire des réparations. Aujourd’hui, le trafic a chuté », affirme un garagiste.

A côté, les employés de la SAMA, une compagnie de bus, font acte de présence. Habituellement, 50 bus par jour transitent par l’escale de Ferke. Avec la fermeture des frontières, plus aucun bus ne roule.

« Tous les bus sont au Mali où Bamako n’est pas isolée du reste comme Abidjan en Côte d’Ivoire. Si on ne peut pas rouler vers Abidjan, ni sortir du pays, les lignes ne sont pas rentables. Heureusement notre patron continue de nous payer mais il faut avouer qu’on ne travaille plus », explique Koné Ouanlo Fusseni.

Malgré l’autorisation de circulation des marchandises, le poste frontière de Laleraba, à 50 km de Ferke, est peu fréquenté. Quelques camions passent, contrôlés par douaniers et policiers, mais la cohue habituelle pour faire tamponner ses papiers a fait place à un parking désert.

Dans le poste de police, sept Burkinabè, arrêtés dans le bourg voisin de Ouangolodougou, attendent leur expulsion. En temps normal, ces jeunes qui cherchaient à faire de l’orpaillage dans la région de Korhogo seraient passés sans aucun problème, de manière légale. Ils ont traversé « à pied », assurent-ils, ne dévoilant pas leur méthode aux policiers.

En fait, un trafic est déjà né pour faire passer la frontière aux voyageurs qu’on cache dans des camions ou qu’on accompagne à pied et en moto sur les innombrables pistes qui sillonnent la région, confient des journalistes locaux. Même si certains ont été arrêtés en flagrant délit, les passeurs sont les seuls à connaitre un boom de leur activité avec le virus.

 

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