Afrique du Sud, le deuil impossible des familles de victimes musulmanes du Covid-19

Afriquinfos
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« On a pu voir le corps mais il était enveloppé dans du plastique et on n’a même pas pu le toucher ». Depuis que son beau-père est mort du Covid-19, Esa Alexander, 52 ans, ne se remet pas de n’avoir pu lui dire correctement au revoir.

Comme ce photographe du Cap (sud-ouest), de nombreuses familles musulmanes d’Afrique du Sud sont plongées dans le désarroi à cause des strictes mesures de protection qui encadrent le déroulement des inhumations des victimes du coronavirus en Afrique du Sud.

« C’est vraiment dur », confie lui aussi Ebriham Solomon, propriétaire d’une petite entreprise captonienne de pompes funèbres. « En vingt-sept ans de carrière, c’est la première fois que je suis confronté à ça ».

La province du Cap-Occidental, qui inclut la deuxième ville du pays, est devenue depuis quelques semaines l’épicentre national de la pandémie de Covid-19.

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Les deux tiers des près de 53.000 cas et plus des trois quarts des 1.162 morts recensés à ce jour y sont concentrés.

A cause des risques d’infection, les familles ne sont plus autorisées à laver ou à envelopper elles-mêmes les corps de leurs disparus. « On n’a même pas pu l’embrasser sur le front », regrette, inconsolable, Esa Alexander.

« Leurs émotions peuvent prendre le dessus et elles peuvent être tentées de serrer dans leurs bras ou d’embrasser le mort », justifie en retour M. Solomon.

« J’ai organisé il y a peu des funérailles pour une famille dont le père a passé huit semaines à l’hôpital avant son décès. Le seul contact avec leur père était le téléphone ou la vidéo », poursuit le patron de la société Haathiem al-lathaat, « la famille n’a pas eu la chance de lui dire vraiment au-revoir ».

Farhan Richards, qui a enterré son grand-père mardi au Cap, confirme que ne pas avoir été autorisée à porter son cercueil fut particulièrement « difficile ».

« Personne n’a pu faire son deuil », regrette-t-elle. « Quand ils ont déposé le corps au fond du trou, j’ai trouvé très perturbant qu’ils jettent leur matériel de protection le long de son corps. C’était comme déshonorer notre proche ».