Affaire de drone malien abattu: Colère de l’AES à l’égard d’Alger, vers un nouveau bras de fer entre les parties

Afriquinfos Editeur
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Drapeaux de l'AES (DR, Affaires étrangères du Mali).

Le Mali et ses alliés du Niger et du Burkina Faso ont annoncé dimanche 06 avril 2025 le rappel de leurs ambassadeurs respectifs en Algérie, qu’ils ont accusée d’avoir abattu fin mars 2025 un drone de l’Armée de Bamako en territoire malien.

Le 1er avril 2025, Alger avait dit avoir abattu un drone de reconnaissance armé qui avait pénétré son espace aérien. A la suite d’une enquête, le Mali a « conclu avec une certitude absolue que le drone a été détruit suite à une action hostile préméditée du régime algérien« , a affirmé dans un communiqué le ministère malien des Affaires étrangères.

Le logo des Forces armées du Mali.

« Le collège des Chefs d’Etats de l’AES (Alliance des Etats du Sahel) décide de rappeler pour consultations les ambassadeurs des Etats membres accrédités à Alger« , ont annoncé les trois pays dans un communiqué commun. Les autorités algériennes n’ont pas réagi dans l’immédiat.

Des officiers maliens assistent à une cérémonie célébrant le retrait de leur pays de la Cedeao, le 28 janvier 2025 à Kurukanfuga (Mali).

Selon le Gouvernement malien, dirigé par des militaires depuis un double coup d’Etat en aout 2020 et mai 2021, l’épave du drone a été localisée à 9,5 kilomètres au sud de la frontière avec l’Algérie. « La distance entre le point de rupture de liaison avec l’appareil et le lieu de localisation de l’épave est de 441 mètres. Ces deux points sont tous situés sur le territoire national« , dit le communiqué, ajoutant que l’aéronef « est tombé à la verticale, ce qui, probablement, ne peut s’expliquer que par une action hostile causée par des tirs de missiles sol-air ou air-air« .

« Face à la gravité de cet acte d’agression inédit« , le Mali « condamne avec la dernière rigueur cette action hostile, inamicale et condescendante des autorités algériennes« , poursuit le document. La junte malienne a par ailleurs annoncé plusieurs mesures de protestation contre Alger, notamment la convocation de l’ambassadeur algérien à Bamako, son retrait avec effet immédiat du Comité d’état-major conjoint (CEMOC) – une alliance de plusieurs Forces armées du Sahel pour lutter contre le terrorisme -, et une plainte devant des instances internationales « pour actes d’agression« .

– Accord d’Alger –

Ce contentieux est le dernier en date entre le Mali et son grand voisin algérien, dont les relations n’ont cessé de se dégrader ces dernières années. Les deux pays avaient déjà rappelé leurs Ambassadeurs respectifs à la suite d’une brouille en décembre 2023. Le Mali reproche à l’Algérie d’entretenir une « proximité avec les groupes terroristes« , notamment dans la région frontalière, où l’Armée malienne et ses alliés russes ont subi fin juillet 2024 de lourdes pertes (à cause de l’implication de forces étrangères, en l’occurrence ukrainiennes) dans leurs opérations.

Fin janvier 2024, la Transition malienne avait déjà annoncé la « fin, avec effet immédiat« , de l’accord de paix d’Alger, signé en 2015. Cet accord a longtemps été considéré comme essentiel pour stabiliser le pays, confronté depuis 2012 à une crise sécuritaire nourrie par les violences de groupes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique (EI), et de bandes criminelles communautaires. Depuis leur prise du pouvoir par la force en 2020, les militaires maliens ont, outre l’accord de paix d’Alger, rompu l’alliance ancienne avec la France et ses partenaires européens pour se tourner vers la Russie. Ils ont aussi fait partir la MINUSMA (la mission de stabilisation des Nations Unies au Mali).

La junte a ensuite formé en septembre 2023 l’AES (Alliance des Etats du Sahel) avec le Niger et le Burkina Faso, également dirigés par des régimes militaires issus de coups d’Etat. En janvier 2025, ces trois pays sahéliens ont quitté la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) qu’ils estiment inféodée à la France.

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