Niger: Des ombres du passé rattrapent Mohamed Bazoum, sur fond de collusion présumée avec l’Etat islamique

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Mohamed Bazoum, Président déchu du Niger le 26 juillet 2023.

Niamey (© 2023 Afriquinfos)- Le Niger demeure sous le spectre du bouleversement du 26 juillet 2023, date marquant le renversement du Président Mohamed Bazoum. Le ressac politique s’intensifie non seulement au cœur de Niamey, mais ébranle également les voisins de la sous-région. Les arcanes du pouvoir révèlent désormais des indices troublants sur une alliance obscure entre le Président déchu et certaines factions armées, y compris l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS).

Des sources au sein de la junte militaire nouvellement installées parlent de communications interceptées entre Bazoum et des têtes de file terroristes, découvertes dans l’ombre du putsch. Ces échanges apportent de l’eau au moulin des «accusations de haute trahison» portées contre Bazoum par les militaires au pouvoir, qui, le 13 août, ont affiché leur volonté de le voir répondre devant la Justice.

Ces preuves semblent avoir traversé l’Atlantique pour atterrir sur les bureaux des autorités américaines, ainsi que ceux des instances régionales, recalibrant ainsi leur posture vis-à-vis du soutien de principe à Mohamed Bazoum. Rappelons les échos de la réunion du 6 août à Niamey, entre la junte et la Sous-secrétaire d’État par intérim Victoria Nuland, qualifiant les pourparlers avec les nouveaux hommes forts de Niamey de «difficiles, mais réalistes».

Selon nos sources, ces mêmes indices accusateurs ont été relayés au général nigérian Abdul Salami, médiateur mandaté par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), puis au Président du Nigeria, Bola A. Tinubu. Les ondes de choc de ces révélations semblent avoir refréné l’ardeur interventionniste du Président nigérian, qui a pivoté vers une approche dialogique. Des tenants de la CEDEAO suggèrent désormais une phase transitoire de neuf mois pour la Transition militaire.

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De nombreux homologues de la CEDEAO ont progressivement distancé leur soutien à Bazoum, au rythme des confirmations d’enregistrements incriminants. Les analyses de Leslie Varenne, érudite de la scène africaine et co-fondatrice de l’Institut de veille et d’étude des relations internationales et stratégiques (IVERIS), dépeignent la destitution militaire comme le coup de grâce au « deal » entre Bazoum et les jihadistes.

Car, Bazoum, dès son investiture en février 2021, aurait entamé un “flirt dangereux” avec l’EIGS pour entretenir “une semblance” de stabilité nationale. Un “pacte du diable” matérialisé par la libération de centaines de détenus terroristes et des transferts financiers à l’EIGS. Ce mariage de convenance aurait dopé la montée en puissance de l’EIGS dans la région.

Le coup d’État a d’ailleurs été suivi d’une escalade de violences sur le territoire nigérien, esquissant la menace d’une déstabilisation régionale. Le 4 octobre 2023, une offensive contre un convoi militaire a occasionné la mort de 15 personnes près de la frontière malienne, et le lendemain, un camp de réfugiés maliens à Intikane a été ciblé, enregistrant 12 autres pertes.

Devant cette spirale de violences, la junte sous l’égide du général A. Tiani a juré de rétablir la paix et l’ordre. Un dialogue national inclusif a été esquissé, à l’issue duquel la durée de la Transition sera établie.

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