Journée mondiale 2022 de l’environnement: La technologie numérique pour accompagner la nécessaire transition écologique africaine

Afriquinfos Editeur
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Le barrage de Laúca en Angola (DR).

Paris (© 2022 Afriquinfos)- La transition numérique est reconnue comme un outil puissant de maîtrise de la consommation d’énergie à l’heure où la lutte contre le réchauffement climatique est au cœur des agendas nationaux et internationaux. Bien que les pays africains ne soient responsables que de 3% des émissions de gaz à effet de serre, ils sont néanmoins gravement touchés par le dérèglement climatique. Le renforcement de leurs capacités technologiques est donc essentiel afin d’accroître leur résilience, tout en permettant la relance économique, mise à mal par la pandémie de la Covid-19.

En 2021, l’OMM (Organisation météorologique mondiale) a publié son rapport intitulé «State of Climate in Africa in 2020». Celui-ci indique que les défis climatiques auxquels l’Afrique est confrontée depuis quelques décennies s’intensifieront dans les années à venir, et se traduiront notamment par une forte variabilité météorologique. Outre la multiplication des sécheresses, des vagues de chaleur, – plus intenses et plus fortes -, ou encore une élévation du niveau des mers, le réchauffement climatique aura de forts impacts sur les rendements agricoles et l’accès à l’eau. Et in fine sur la sécurité alimentaire.

Toujours selon le rapport 2020 de l’OMM, l’Afrique est l’une des premières victimes du réchauffement climatique avec l’Asie du Sud-Est. Les analyses estiment que l’année 2020 se situe entre la troisième et la huitième année la plus chaude jamais enregistrée sur le continent. L’ensemble de ces phénomènes a aggravé la crise socio-économique et sanitaire à laquelle le continent fait face, renforcée par la récente crise sanitaire.

Si les États africains sont durement touchés par les effets du changement climatique, ils sont malheureusement moins aptes à y faire face. Face à ce triste constat, il est établi depuis longtemps que les pays doivent renforcer leurs capacités technologiques afin d’augmenter leur résilience. Preuve de l’idée que nous avançons, la BAD (Banque africaine de développement) a ouvert en décembre 2018 un espace de discussion sur l’importance des technologies dans la lutte contre le changement climatique.

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Vers le vert en Afrique (DR, OIF).

Numérique pour pallier les défis et enjeux soulevés par le dérèglement climatique

 Selon l’Agence météorologique des Nations Unies, environ 98 millions de personnes étaient victimes d’insécurité alimentaire aiguë et avaient besoin d’une aide humanitaire en Afrique en 2020, soit 40% de personnes en plus qu’en 2019. A titre d’exemple, 1,2 million de nouvelles personnes sont des déplacés climatiques pour 500.000 déplacés de guerre dans la région de la Corne de l’Afrique ! Or, avec l’arrivée de la pandémie de la Covid-19, la faim dans le monde et particulièrement en Afrique s’est aggravée.

D’ici 2030, les prévisions font état de 118 millions de personnes extrêmement pauvres (c’est-à-dire vivant avec moins de 1,90 dollar par jour) exposées à la sécheresse, aux inondations et aux chaleurs extrêmes, si des mesures adéquates ne sont pas rapidement prises sur le continent. De plus, cette situation entravera considérablement les efforts de réduction de la pauvreté et empêchera toute relance économique. A titre d’exemple, ​​en l’absence de mesures d’adaptation, la production de maïs, l’une des cultures de base en Afrique, pourrait diminuer de 40% d’ici 2050.

Les phénomènes météorologiques susmentionnés ne risquant pas de décroître dans les années à venir, il est nécessaire de réfléchir à la mise en place de solutions innovantes. La protection de notre planète tout comme le développement socio-économique durable des pays en est en jeu. Selon une étude menée par le FMI (Fonds monétaire international) auprès de ménages en Tanzanie, en Éthiopie, au Malawi, au Mali et au Niger, le risque d’insécurité alimentaire pourrait être réduit de près de 30% si des investissements innovants sont réalisés dans des systèmes d’alerte météorologiques précoces. Ces derniers indiquent aux agriculteurs le moment opportun pour planter, irriguer ou encore fertiliser.

Certaines start-ups ont déjà pris ce tournant en proposant des outils “intelligents” tels que le dispositif intelligent d’irrigation goutte à goutte, proposé par la start-up ‘Illuminum Greenhouses’ au Kenya. A travers cette solution, les petits agriculteurs peuvent optimiser leur production à un coût abordable. À ce jour, elle a aidé plus de 3.450 d’entre eux à accroître leurs revenus.

Comme en témoigne cet exemple, les technologies numériques ont donc la capacité de fournir des outils intelligents qui révolutionnent la gestion des ressources naturelles, dans une perspective de durabilité. En optimisant les pratiques et rendements agricoles, les TIC (Technologies de l’information et de la communication) répondent ainsi au 2e ODD (Objectif du développement durable) – “Faim zéro” – des Nations Unies, aspiration également inscrite au cœur de l’Agenda 2063 de l’UA (Union africaine).

Décupler le potentiel des énergies renouvelables via les innovations technologiques

Les États africains se doivent de plus en plus d’encourager la transition vers les énergies renouvelables. En effet, sur le continent, l’énergie fossile représente encore plus de 70% de la production d’électricité, ce qui augmente de facto les émissions de gaz à effet de serre. Face à ce constat, il est crucial d’augmenter la proportion d’énergie propre. La technologie doit être mise au service de l’environnement et du développement durable du continent.

Selon l’IRENA (Agence internationale pour les énergies renouvelables), les énergies renouvelables pourraient représenter près de 67% de la production d’électricité en Afrique subsaharienne d’ici 2030, si des politiques et des réglementations sont mises en place.

Les sources d’énergies telles que le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité et la géothermie abondent, offrant ainsi au continent une diversité en termes de ressources énergétiques. Si leur potentiel reste encore à exploiter, la capacité de l’Afrique en termes d’énergies renouvelables pourrait atteindre 310 GW d’ici à 2030. Ce qui placerait le continent au premier rang de la production d’énergie dites «vertes dans le monde».

Une véritable opportunité afin de mieux satisfaire les besoins énergétiques de l’Afrique de manière durable et soutenable, dans un contexte de volatilité des prix des combustibles fossiles, des dépendances aux importations énergétiques extérieures et de la prise de conscience des conséquences néfastes des émissions de carbone.

Pour l’équipementier chinois Huawei, le numérique n’est pas incompatible avec le développement durable et considère, au contraire, que le fort potentiel des nouvelles technologies doit être mobilisé au service de la transition écologique, et de la lutte contre le réchauffement climatique. Grâce à des technologies de pointe, notamment l’intelligence artificielle et les solutions avancées de stockage d’énergie, Huawei a déployé plus de 400 sites solaires en Éthiopie, en faisant appel à des solutions ‘Advanced Hybrid Power’ ainsi que des ‘Smart Micro Grids’.

L’énergie solaire est ici utilisée pour fournir de l’énergie aux stations   de communication. En comparaison à la solution d’alimentation électrique traditionnelle, ces   sites solaires économisent plus de 12 millions de litres de carburant diesel par an, réduisent les émissions de carbone de 2,850 de tonnes chaque année, et résolvent le problème de l’approvisionnement en énergie verte. Cette solution a d’ailleurs obtenu le Prix de la 21e AfricaCom, «Meilleure solution d’énergie durable».

Plus récemment, le groupe chinois a organisé de concert avec Informa Tech, le ‘Green ICT Forum’ sur le thème «Green ICT, Lighting up a Sustainable Continent». Mobilisant de nombreux experts, le forum a été l’occasion d’échanger sur la façon dont le numérique et la décarbonation sont en mesure de favoriser et de stimuler une croissance verte en Afrique. Selon le Forum économique mondial, les TIC peuvent aider de multiples secteurs à réduire leurs émissions de carbone de 12,1 milliards de tonnes d’ici 2030 et ainsi contribuer, dans une plus large mesure, à accélérer la réalisation de chacun des 17 ODD des Nations Unies.

A titre d’exemple, le développement de réseaux électriques intelligents, moins gourmands en énergie, permet de réduire les émissions de carbone et donc de répondre à l’ODD 7 “Énergie propre à un coût abordable”. Les avancées promises par les nouvelles technologies, couplées à une innovation continue et durable, pourront donc permettre au continent africain d’allier développement socio-économique et résilience au changement climatique, tout en démocratisant l’accès aux ressources énergétiques.

E. K. Gadegbeku