Togo: Propositions directes du Pr Komi Wolou et de Brigitte Adjamagbo pour sortir du cycle de crises

Afriquinfos Editeur
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Prof Wolou Komi (Dr-IciLomé)

Lomé (© 2025 Afriquinfos)- Au Togo, des acteurs de l’Opposition et de la Société civile prennent la parole face aux tensions socio-politiques qui prévalent dans le pays depuis quelques semaines. Parmi eux, le Pr Komi Wolou et de Brigitte Adjamagbo pour sortir du cycle de crises.

 Dans une missive adressée Président du conseil des ministres Faure Gnassingbé et  intitulée : ‘’Choisir le bien plutôt que le pouvoir’’, le prof Wolou Komi, premier responsable du Pacte socialiste pour le renouveau (PSR), exhorte à revenir à la raison et à l’éthique au nom du peuple togolais.

Pointant du doigt les dérives du pouvoir, les injustices sociales, la mauvaise gouvernance et le musellement des libertés, il plaide pour un sursaut patriotique, la libération des prisonniers politiques et la restauration d’une démocratie véritable. Un appel à la conscience et à la responsabilité.

Faure Gnassingbé interpelé avec une «rose noire»

Avant l’appel du Professeur Komi Wolou, Dr Brigitte Adjamagbo-Johnson avait aussi interpelé Faure Gnassingbé avec une «rose noire».

À l’occasion de l’anniversaire du président Faure Gnassingbé, le 6 juin dernier, Brigitte Adjamagbo-Johnson, coordinatrice de la Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP), a adressé un message au ton sévère dans une lettre ouverte rendue publique. Plutôt que des vœux traditionnels, l’opposante a offert symboliquement une «rose noire pleine d’épines», image d’un régime qu’elle qualifie de «à bout de souffle», dénonçant une gouvernance autoritaire et éloignée des aspirations démocratiques.

Dans sa tribune, Brigitte Adjamagbo-Johnson dépeint une situation politique marquée par les arrestations d’opposants et la frustration d’une jeunesse «désabusée». Elle évoque notamment l’interpellation récente de l’activiste Amron comme exemple d’une dérive liberticide. Loin des félicitations, elle affirme que ce message représente «des funérailles politiques à peine déguisées», tout en appelant à un sursaut du chef de l’État pour sortir «avec un reste d’honneur».

Adoptant une posture de citoyenne plus que d’opposante, la secrétaire générale de la CDPA appelle clairement Faure Gnassingbé à quitter le pouvoir. Elle estime que ce départ serait un acte de responsabilité et un ultime geste d’écoute envers un peuple en perte de repères. La lettre, fortement relayée sur les réseaux sociaux, confirme l’orientation résolument critique de la DMP face à la récente réforme constitutionnelle et à la gouvernance actuelle.

Zoom sur des mandatures désastreuses

Lors de son interpellation, M. Wolou a aussi interpellé le PCM sur son bilan macabre. L’orateur s’adresse au Président, dénonçant une situation où des manifestations récentes n’ont pas ébranlé le pouvoir, malgré leur hostilité. Il reproche au Président d’avoir choisi délibérément des actions contraires à ce qui est bien pour le peuple.

Il rappelle que le Président avait affirmé que limiter les mandats était nécessaire pour la démocratie, mais qu’il a modifié la Constitution pour rester au pouvoir. Il souligne aussi que le Président a dénoncé le détournement des ressources, alors que des soupçons de corruption et de gaspillage existent dans la gestion des fonds publics. L’orateur accuse aussi le Président d’exploiter personnellement les ressources du pays, de ne pas avoir agi à temps pour régler la crise de l’énergie, ce qui coûte cher au peuple, et d’ignorer la détresse des citoyens à cause de la mauvaise gestion des infrastructures comme la route nationale ou le système de santé, où les inégalités sont criantes.

Il critique la faiblesse des investissements pour améliorer les conditions de vie des populations, avec des villas de luxe de certains collaborateurs entourées de villages pauvres sans accès à l’eau potable ou à une éducation décente. Finalement, il mentionne le contraste entre un hôpital moderne construit à Agoè, accessible à peu, et le reste du système de santé, en mauvais état, témoignant des inégalités et de la gestion problématique.

’Excellence, Monsieur le Président, à votre actif, vos partisans évoquent la paix dont vous seriez l’artisan. La paix est sans doute un besoin fondamental. Mais permettez-moi de vous dire que la paix n’est pas simplement une absence de guerre ou d’affrontements. Pensez-vous que ces jeunes sans emploi, à plus de 35 ans, à la charge de leurs parents épuisés par des décennies d’efforts, sont vraiment en paix?

Pensez-vous que ce père de famille incapable de procurer des soins à son enfant malade qu’il voit mourir est vraiment en paix ? Pensez-vous que le citoyen qui dort le ventre affamé est vraiment en paix ? Pensez-vous qu’un peuple à qui l’on impose sans consultation une constitution, un peuple réduit au silence, est un peuple en paix ?’’, interroge M. Wolou dans ses propos tout en rassurant M. Faure Gnassingbé sur son départ imminent du pouvoir .

’Excellence, M. le Président, tout est question de temps. Vous partirez forcément dans quelques semaines, dans quelques mois, dans quelques années ou même décennies. Vous partirez. C’est pourquoi je vous demande, avec humilité, de libérer les prisonniers politiques. C’est pourquoi je vous demande de revenir à un meilleur sentiment et de choisir le bien. C’est pourquoi je vous demande, Excellence, M. le Président, de cesser d’entraver le développement du pays. Des richesses mal gérées sont forcément source d’endettements qui entravent les projets sociaux’’.

Appel à libérez les personnes ayant manifesté les 5 et 6 juin

‘’C’est justement pour cette raison que pour votre compte les personnes sont détenues, parfois sans jugement, pour dissuader ceux qui osent contester votre autorité. C’est pour cette raison qu’il faut mettre en prison des personnes qui, par leurs propos, sont en mesure d’éclairer davantage le peuple’’, dénonce entre-autre le Professeur Wolou.

Allant dans cette même veine, Mme Adjamagboh a salué la ‘’capacité des jeunes le 5 juin dernier à prendre des risques, à s’exprimer pour construire et obtenir ce qu’ils veulent’’. ‘’Les jeunes ont surmonté leurs peurs et ont pu, à partir de cette nuit-là, dire non à de nombreuses choses qui se passent’’.

Aussi, a-t-elle dénoncé malheureusement les arrestations qui ont suivi et exprimé toute sa solidarité envers les compatriotes arrêtés. ‘’Malgré la réaction du régime, notre combat doit continuer ; nous soutenons pleinement cette lutte et sommes prêts à soutenir les efforts que vous, les jeunes, avez menés’’.

Elle appelle également à libérer toutes ces personnes détenues en marge des manifestations du 5 et 6 juin dernier, alors même que d’autres appels à manifester s’annoncent pour les 26, 27 et 28 juin. ‘’Il est temps de libérer le Togo. Quoi que vous fassiez, vous ne pourrez jamais faire taire tous les Togolais’’, a pour sa part conclu le Professeur Wolou.

V. A.