Togo : Leçons politiques et organisationnelles des législatives du 25 juillet dernier

Afriquinfos Editeur
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L’Opposition togolaise qui a pris part aux élections législatives du 25 juillet 2013 à travers ses couches les plus représentatives, les Collectifs CST (Collectif sauvons le Togo) et AEC (« Arc-en-ciel »), continue de contester les résultats provisoires globaux proclamés le 30 juillet dernier par la CENI (Commission électorale). En dénonçant une kyrielle de fraudes dont certaines sont vérifiables sur le terrain, d’autres non. La même Opposition se déchire même sur les recours à faire devant la Cour constitutionnelle. Une chose est quasi certaine. La Cour constitutionnelle du Togo ne nous a pas habitués à des revirements dans ces décisions portant sur des élections ; elle ne devrait pas modifier son comportement sur le sujet cette année.

Le Togo a gagné, personne n’a perdu

Une semaine après le verdict des urnes, pas une seule barricade n’a été érigée sur l’ensemble du territoire togolais, pas un seul pneu n’a été enflammé par des citoyens lambda ou des partisans de l’Opposition pour contester les résultats. Une attitude qui tranche singulièrement avec les contestations qui ont suivi la proclamation des résultats des législatives de 2007 et ceux de la présidentielle de 2010.

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Ce "pacifisme électoral" ne signifie pas pour autant que le peuple a approuvé sur toute la ligne les scores électoraux donnés par la CENI. Il est plutôt la manifestation ostensible d’une volonté des "Togolais ordinaires" « de ne plus perdre leurs vies pour des causes perdues d’avance » ! C’est la rengaine qui est revenue à plusieurs reprises dans la bouche des Togolais à Lomé (fatras de la population togolaise), quand ils n’ont pas caché leur lassitude à l’égard des acteurs politiques locaux, après les résultats du 26 juillet.

Sur le plan organisationnel, les acteurs du monde électoral togolais ont forcément engrangé des acquis à travers ce scrutin législatif. La CENI en premier; désormais, sur la base de l’expérience de cette année, il sera difficile de signifier à l’électorat qu’il ne peut pas avoir droit aux premières tendances d’une élection, une fois les bureaux de vote fermés, et le dépouillement clos ! Pour le compte des prochaines consultations électorales, le peuple souhaiterait assurément disposer des premiers résultats partiels le soir du vote. Au lieu de simples tendances. Les élections parlementaires de juillet 2013 ont également fait reluire le chauvinisme des Togolais. Elles ont prouvé la capacité de l’Etat indépendant du Togo à pouvoir organiser un scrutin sans appui financier extérieur. Sur ce plan aussi, le peuple est en droit d’exiger une augmentation des investissements étatiques en matière électorale, dans ce sens que ce type de décaissement fait partie des attributs de souveraineté de toute République qui se respecte.

« Game over » pour certains partis

On peut donc d’ores et déjà dresser le bilan de cette bataille électorale dans toutes les écuries ayant pris part à cette consultation électorale. Dans les rangs du parti au pouvoir (UNIR), on doit pousser un grand ouf de soulagement ; au regard du chapelet de contestations sociales générales qui ont meublé le quotidien des Togolais durant les mois ayant précédé le scrutin du 25 juillet. Pour sa part, visiblement groggy et décontenancée par les scores issus officiellement des urnes il y a sept jours, l’Opposition dans son ensemble doit se sentir coupable d’avoir raté à nouveau le coche de l’alternance. En échouant à capitaliser les nombreux rancœurs ou mécontentements des populations à l’égard des gouvernants ces derniers mois.

Pourtant, dans ces deux grosses écuries de la politique togolaise, il va falloir repartir à l’abordage. En prévision des élections locales dont la date n’est toujours pas connue, mais surtout de la présidentielle du premier trimestre 2015. Moins de deux ans nous séparent de cette grande échéance. Dans le sérail du régime de Lomé, tout laisse croire que la préparation de ce scrutin présidentiel fait déjà partie des priorités du parti. Ce qui n’est pas le cas de l’Opposition où l’on devra, les prochains jours, panser les grosses plaies de la défaite électorale officielle du 25 juillet. Cette donne constitue indubitablement une longueur d’avance acquise par UNIR  sur ses adversaires de 2015.

Les législatives de juillet 2013 ont par ailleurs, à travers leurs résultats, décrédibilisé ou minoré pour un bon moment l’existence de plusieurs formations qui ont marqué le monde politique local depuis 23 ans. Il s’agit de l’UFC de Gilchrist Olympio, de la CPP de Francis Ekon, ou encore du PDR de Zarifou Ayéva. Comme après les élections parlementaires de 2007, il est presque invraisemblable que ces trois partis regagnent le cœur des Togolais d’ici 2015. Aussi bien les prochaines élections locales que la présidentielle qui aura lieu dans moins de 24 mois devrait se jouer entre UNIR et les collectifs CST et AEC ; si ces derniers n’implosent pas d’ici là, à cause de divergences généralement minuscules qui ont fait le lit à une méfiance feutrée parmi les politiques togolais. Le peuple-arbitre qui s’éloigne au fil des élections du monde politique devra encore trancher.

Si les positions des uns et des autres demeurent sclérosées d’ici là, nul doute que le taux de participation à une joute électorale va encore chuter sensiblement au Togo. C’est surtout l’apprentissage local de la démocratie qui en prendrait un nouveau coup.  

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