Ces cyber-escrocs que l’on appelle les « brouteurs », suivent un mode opératoire aussi simple que pernicieux : sur les chats ou les sites de rencontre, ils se font passer pour une jeune femme et entament la conversation avec des « pigeons », jusqu’à leur proposer une séance mutuelle de vidéo érotique. Les victimes, qui ont en face d’eux une pin-up en dessous sexy – un pré-enregistrement, en réalité – ne se méfient pas et se prennent au jeu.
Sauf qu’une fois qu’ils se sont mis nus et se sont prêtés à leurs jeux coquins devant leur webcam, un mail leur parvient avec la vidéo accompagnée de menaces violentes : « t’es mor » « j’ai tou sur toi », « ton patron va tou savoir ». Pour éviter l’infamie, ils doivent payer des sommes environnant 200€ ou 400€, et parfois même des milliers si le « brouteur » sent qu’il a à faire à un gros poisson.
Ce trafic de chantage à la webcam a fait plus de 2.000 victimes – connues – en 2012 en France, contre 600 en 2011. Les maîtres-chanteurs opèrent principalement d’Afrique de l’Ouest, en particulier la Côte d’Ivoire, et forment des réseaux très bien organisés et hiérarchisés, d’après la section de la police en charge de ces affaires.
Ce phénomène est d’une grande violence, et deux adolescents se sont même suicidés l’année dernière suite à un chantage de ce type. « C’est dévastateur pour des jeunes qui pensent tester leur pouvoir de séduction sans risque via internet » explique Justine Atlan, présidente de l’association E-Enfance. D’autant qu’aligner l’argent n’est pas une garantie d’éviter la honte : la plupart du temps, les cyber-escrocs publient quand même la vidéo sur Youtube.
Ce business de l’humiliation marche malheureusement très bien ; on estime à 5 millions d’euros le gain des « brouteurs » rien que l’année dernière.
Sur le net, la méfiance est donc de mise : plus que partout ailleurs, les apparences y sont tragiquement trompeuses.