Lagos (© 2024 Afriquinfos)- Seyi Tinubu, fils de l’actuel président nigérian, Bola Ahmed Tinubu, très actif ces derniers mois sur le terrain philanthropique après des inondations meurtrières dans le pays, serait-il en train de se préparer à occuper le poste de Gouverneur de l’État de Lagos ? La question fait débat au sein de la classe politique du pays le plus peuplé d’Afrique après que plusieurs groupes de jeunes ait lancé une campagne pour soutenir sa candidature pour l’élection prévue en 2027. L’idée ne fait pas l’unanimité.
Pour prendre les rênes de l’Etat le plus peuplé et le plus riche du Nigeria, il faut s’y prendre tôt. Alors que le deuxième mandat de l’actuel Gouverneur Babajidé Sanwo-Olu s’achève en 2027, les candidats pour sa succession s’annoncent déjà. Parmi eux, Seyi Tinubu, fils de l’actuel président du Nigeria, qui avant de diriger le pays, a fait ses armes dans l’Etat de Lagos jusqu’en 2007 et y conserve une influence considérable.
Si l’intéressé lui-même, n’a pas officiellement fait part de ses ambitions, ce sont des groupes de soutien qui s’en chargent pour lui. Cette stratégie on le sait, est utilisée par les hommes politiques pour tâter le terrain avant de sortir du bois. C’est donc, un groupe de jeunes réunis au sein de la coalition des jeunes leaders du Nigeria (CONYL) qui dans une déclaration rendue publique fin novembre à Owerri dans l’Etat d’Imo, ont appelé Seyi Tinubu à briguer le Gouvernorat de l’Etat de Lagos. D’autres mouvements comme la branche de Lagos des Middle Belt Youths ou encore une organisation sociopolitique, dénommée Friends of Seyi Tinubu (FOST) se sont joints à cet appel, considérant Seyi Tinubu, comme « un leader visionnaire doté d’un mélange rare d’intellect, d’empathie et de sens stratégique ». Ces mouvements soutiennent que le fils de celui que l’on surnomme « King of Lagos », est le choix par excellence pour conduire l’État de Lagos vers un avenir défini par la prospérité et l’innovation.
Mais l’idée que Seyi Tinubu, seulement âgé de 39 ans, dirige l’État le plus riche du Nigeria ne plaît pas à tout le monde. C’est au sein même du camp présidentiel que viennent les premières réserves. Joe Igbokwe, un éminent membre du All Progressives Congress (APC) a réagi via une publication sur Facebook : « Qui sont ces gens sans visage qui poussent Seyi Tinubu au poste de gouverneur de Lagos ? C’est une diversion inutile. Leur objectif est de faire tomber le PBAT (le Président Bola Ahmed Tinubu). Diriger Lagos n’est pas le travail des garçons », a écrit Igbokwe.
Il faut aussi dire que les Tinubu ne sont pas originaires de l’Etat de Lagos mais de celui d’Osun. Ce qu’a tenu à rappeler, une coalition se réclamant de jeunes autochtones de l’État de Lagos : « Bien que nous sachions que M. Seyi Tinubu a ses droits démocratiques en tant que Nigérian, nous condamnons cette approbation malheureuse et la décrivons comme antidémocratique et comme une action délibérée de certains individus sans visage pour refuser aux indigènes de l’État de Lagos le droit de se gouverner eux-mêmes en 2027 (…) Nous savons pertinemment qu’il y aura bientôt un poste vacant dans l’État d’Osun où M. Seyi Tinubu pourra exercer au mieux ses droits démocratiques sans entrave (…) Pour nous, il n’y a pas de place disponible pour les non-autochtones dans l’État de Lagos en 2027. La marginalisation est trop importante et elle a conduit au sous-développement de l’État », a déclaré le groupe dans une déclaration.
L’occasion était trop belle pour que le principal parti d’opposition, le PDP, ne saisisse pas la perche. Le porte-parole du PDP au niveau de l’État, Hakeem Amode, s’est interrogé si le poste de gouverneur devrait devenir un héritage, suggérant qu’il était inapproprié pour un fils d’hériter d’un tel poste de son père. Il a indiqué que les citoyens résisteraient à toute tentative d’imposer Seyi Tinubu, fils du président Bola Tinubu, comme prochain gouverneur de l’État de Lagos. « Lagos est-il un État monarchique où la famille Tinubu est suprême ? Est-ce que le pouvoir est le droit de naissance de la famille Tinubu ? s’est de son côté questionné, un militant des droits de l’homme, Deji Adeyanju.
Outre ces réticences et contestations, ce ne sont pas les candidats plus expérimentés et ce même dans l’entourage du Président Tinubu, qui manquent. On peut citer, l’actuel président de l’Assemblée nationale, Mudashiru Obasa ; l’actuel vice-gouverneur de l’Etat de Lagos, Kadri Femi Hamzat, qui s’était déjà éclipsé en 2019 sur recommandation de Tinubu, en faveur de Sanwo-Olu ou encore le Chef de Cabinet du Président, Femi Gbajabiamila, qui nourrissent tous l’ambition de régner sur Lagos.
Mettront-ils sous veilleuse leurs ambitions au profit de l’héritier désigné de Bola Ahmed Tinubu ? Le président prendra-t-il ce risque d’imposer son fils au risque de fissurer l’alliance qu’il a savamment constitué durant des décennies et qui lui permet d’être le faiseur de roi à Lagos ? Au moment même où en 2027, il aura besoin de cette alliance pour aller à la conquête de son deuxième mandat à la tête du pays.
Comme le disent les lagosians, c’est le « Wait and See ! ».
Boniface T.