Niger : Les autorités et magistrats fument le calumet de la paix

Afriquinfos Editeur
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Une décision saluée dans tous les milieux, d'autant plus qu'elle intervient au fort moment de levée de boucliers entre les deux parties, provoquée par l'intransigeance des uns et la détermination des autres.

Elle tombe le jour même où le syndicat autonome des magistrats du Niger (SAMAN) entame une nouvelle grève, cette fois-ci, de cinq jours, à compter du lundi 5 novembre, sur l'ensemble du territoire national pour amener l'exécutif à respecter ses engagements par rapport au paiement des indemnités de ses militants.

Le mot d'ordre de grève fut levé le même jour par le SAMAN, visiblement satisfait, quelques heures à peine après son lancement, par la faveur de l'accord intervenu.

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En effet, le gouvernement représenté par le ministre nigérien en charge de la justice, M. Marou Amadou, et le SAMAN, représenté par son secrétaire général, M. Fallalou Malam Sofo, ont signé, le 5 novembre dernier, un protocole d'accord après près de 18 mois de négociations, entrecoupées de grèves perlées.

Un protocole qui fera l'objet d'un projet de décret pris en conseil des ministres, le même jour, en vue de procéder à la valorisation des primes et des indemnités allouées aux magistrats, conformément à l'accord intervenu entre le comité interministériel et le SAMAN.

Il s'agit donc à travers ce projet de texte, d'améliorer les conditions de vie et de travail des magistrats "dont la contribution est essentielle dans la moralisation de la gestion des affaires publiques, dans la lutte contre la corruption engagée par le gouvernement ainsi que dans la célérité au niveau du traitement des affaires judiciaires", précise le communiqué du gouvernement.

Aux termes de cette mesure, le gouvernement a rehaussé leur prime de judicature de 35% ainsi que la prime de responsabilité de 40%, et l'indemnité de roulage revalorisée de 40%, au grand bonheur du SAMAN.

Pourtant, 24 heures auparavant, le climat austère entre les deux parties était loin de présager un dénouement heureux de la situation dans un si bref délai.

En rappel, après une série de débrayages sans satisfaction, les magistrats venaient de déclencher, à nouveau, un arrêt de travail de cinq jours pour réclamer le paiement de leurs indemnités. Dans la matinée du lundi 5 novembre, début de la grève, toutes les activités des juridictions, aussi bien dans la capitale qu'à l'intérieur du pays, étaient paralysées.

Une grève que le ministre en charge de la Justice Marou Amadou avait qualifiée "d'illégale et d'inacceptable", sur la télévision nationale et a menacé d'opérer des coupures sur les salaires des magistrats grévistes.

Cette sortie du ministre jugée "provocatrice" par les juges est venu s'ajouter au malaise auparavant créé par l'affectation le 23 octobre dernier d'un magistrat du parquet qui a requis la relaxe des conducteurs de taxis de la ville de Niamey arrêtés à la suite de leur grève.

Une occasion que les magistrats n'ont pas ratée pour protester, cette fois-ci, contre "les pressions que subissent les magistrats de la part des autorités en place", à travers une journée d'une " justice indépendante au Niger".

Le SAMAN a fustigé cette attitude de vouloir museler la justice et rappelé aux autorités le principe sacro-saint de l'indépendance de la justice, consacrée par la constitution nigérienne et par les principes démocratiques, en général.

Apportant son soutien aux magistrats, le barreau de Niamey, devait simplement rappeler aux autorités en place que "la 7eme République ne pouvait pas avoir le jour sans l'affirmation courageuse de l'indépendance de la Justice nigérienne".

C'est dans cette situation qu'est intervenu le protocole d'entente entre les deux parties, à la grande satisfaction des magistrats.

"Pourvu que ce ne soit un accord de plus", souhaite Issaka, un syndicaliste averti.