Côte d’Ivoire : le nouveau Parlement à l’épreuve de la consolidation de l’Etat de droit

Afriquinfos Editeur
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L'ancien Premier ministre ivoirien Guillaume Soro se retrouve désormais dans les fonctions de président de l'Assemblée nationale après son élection à la tête de cette institution avec 236 voix sur 249 votants.

Pour plusieurs observateurs, le démarrage du nouveau Parlement ivoirien devrait contribuer à la consolidation de l'Etat de droit.

"L'Assemblée nationale ne fonctionnait plus depuis plusieurs mois suite à la crise que nous avons connue. Maintenant que cette institution est mise en place, les lois pourront être votées, et le pays pourra redécoller", a estimé le secrétaire général du Forum africain de la démocratie (FAD) Sylvain Allou.

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Pour celui-ci, l'émergence d'un Etat de droit implique la mise en œuvre de la normalisation après la crise post-électorale aigüe qui a secoué le pays.

Dans cette optique, le doyen des députés Gaston Ouassénan Koné qui assurait le rôle de président de séance lors de la session inaugurale du Parlement a invité les nouveaux parlementaires à prendre leur part dans le processus de reconstruction du pays et à entreprendre des réformes courageuses "à travers des propositions intelligentes".

SURVEILLER L'ACTION GOUVERNEMENTALE

Le nouveau président de l'Assemblée nationale Guillaume Soro a fait dans ce contexte mention d'un hémicycle qui répond aux aspirations du peuple.

M. Soro a également fait état de décisions courageuses que doivent prendre les nouveaux députés, et de leur rôle de surveillance des actions gouvernementales.

"C'est un rôle éminemment important car le président ivoirien Alassane Ouattara a fait de la bonne gouvernance son cheval de bataille. Cette bonne gouvernance est le fondement d'une nation solide", a commenté Thierry Ndoumi, professeur de sciences économiques dans une université d'Abidjan, insistant sur la lutte contre la corruption pour assainir tous les secteurs du pays.

Dans cette perspective, l'une des premières lois que devra examiner le nouveau parlement sera la loi sur l'enrichissement illicite.

Lors d'un atelier le 3 mars à Grand-Bassam (sud, 30 kms d'Abidjan) à l'initiative du secrétariat national à la bonne gouvernance, un projet consensuel de loi sur l'enrichissement illicite et un projet de décret de création d'une agence nationale pour la mise en application de la loi ont été retenus.

"J'ambitionne que ces projets de texte soient les tout premiers à être examinés par notre Parlement rénové. C'est un tournant important dans un système où nos ministres jouissaient d`une quasi immunité civile et pénale en raison d`un dispositif juridique et institutionnel ambigu", avait déclaré le secrétaire national à la bonne gouvernance, Sindou Méité.

Avec ce projet de loi, les agents ordinaires en charge de la gestion de la chose publique, les hauts fonctionnaires tout comme les membres du gouvernement pourront réprimés pour enrichissement illicite.

PLUSIEURS DÉFIS A RELEVER

"La libre circulation des personnes et des biens constitue aussi un élément déterminant d'un état de droit. C'est pourquoi nous proposons que des mesures plus vigoureuses soient prises en faveur de la lutte contre le racket et les tracasseries routières, et en faveur d'une sécurisation rassurante du pays. Ce sont des défis importants", plaide pour sa part le leader du collectif des jeunes pour l'intégration africaine (COJIA) Mamadou Ballo.

De son côté, le juriste et spécialiste du droit constitutionnel Losséni Touré invite les députés ivoiriens nouvellement élus à relever le défi de la démocratie.

"Il eut été intéressant que le Front populaire ivoirien (FPI, opposition) soit présent au Parlement pour garantir des ébats démocratiques. Mais cette absence n'entache pas la crédibilité de l'hémicycle", a relevé  M. Touré.

Pour celui-ci, les députés qui ont reçu l'onction du peuple doivent agir dans l'intérêt de la nation.

"Ils doivent savoir qu'ils représentent toute la nation et non la bannière politique sous laquelle ils ont été élus. A ce niveau, on peut être sûr que les débats seront démocratiques comme cela se fait dans un Etat de droit", a-t-il noté en substance.

Le nouveau Parlement ivoirien comportant 255 sièges a été mis en place au cours d'une cérémonie solennelle lundi, suite aux élections législatives du 11 décembre.

Le Rassemblement des républicains, (RDR, parti de Ouattara) a obtenu la majorité absolue au nouveau parlement avec 138 sièges.

Guillaume Soro a été porté à la tête de l'hémicycle après qu'il eut démissionné vendredi de son poste de Premier ministre.

Le FPI, parti de l'ancien président Laurent Gbagbo, avait boycotté les législatives en réaction à la détention de plusieurs de ses partisans dont l'ex-couple présidentiel.

La mise en place de la nouvelle Assemblée nationale est considérée comme l'un des piliers importants de la normalisation et de la reconstruction du pays.

La première session ordinaire du nouveau Parlement est prévue pour le 25 avril prochain.