Xinhua : Voici près de 50 ans que la Chine et le Congo entretiennent des relations diplomatiques et une coopération dont l'un des domaines de prédilection est celui de la santé. Que pouvons-nous retenir dans ces relations ?
M. Dokekias: Ce sont des relations très anciennes qui se sont développées à travers plusieurs étapes, dans le cadre d'une coopération sud-sud, elles se sont ensuite intégrées dans le cadre du mouvement des non-alignés et se sont confortées sur la base des idéologies communes. On peut dire que dans le domaine de la santé, elles sont les plus exemplaires. Pour s'en convaincre, il faut regarder avec franchise les infrastructures sanitaires au Congo. Elles sont pour la plupart le fruit de la coopération sino-congolaise.
Xinhua : quelles sont notamment ces infrastructures ?
M. Dokekias: A Brazzaville (la capitale du Congo), en dehors du Centre hospitalier et universitaire (CHU) qui est issu de l' époque de la colonisation française, les autres hôpitaux tels que ceux de base de Makélékélé et de Talangaï (premier et sixième arrondissements), ainsi que celui dit de l'Amitié Sino-congolaise construit dans le septième arrondissement Mfilou et qui sera officiellement mis en service ce 29 août, sont le fruit de cette relation. Il en est de même pour l'hôpital du cinquième arrondissement Ouenzé, actuellement en cours de construction, et de l'hôpital spécialisé mère et enfant de Blanche Gomez dans le centre de la capitale qui est en cours de réhabilitation. C'est aussi le cas de la plupart des hôpitaux de Pointe-Noire (la capitale économique et deuxième ville du pays), des hôpitaux généraux des villes d'Owando et Oyo (dans la partie nord du pays), etc. Il s'agit bien d'investissements et d'actes concrets.
Xinhua : Qu'en est-il des équipements ? Tous ces hôpitaux fonctionnent-ils bien ?
M. Dokekias: Chaque fois que la coopération chinoise a fait un don ou un prêt au Congo pour financer les infrastructures de santé il y a toujours un volet équipement et cela fonctionne bien.
Xinhua : On a vu récemment, le 26 juillet, une nouvelle équipe de médecins chinois arriver au Congo. Quel a été jusqu' ici l'apport de la Chine dans le domaine des ressources humaines en santé au Congo ?
M. Dokekias: C'est également un autre volet qui accompagne les dons et aides chinois au pays. Dans la plupart des hôpitaux cités, il y a des coopérants chinois qui travaillent dans plusieurs spécialités de la médecine. C'est ainsi que pour l'hôpital de Mfilou qui sera bientôt remis officiellement, nous venons de recevoir près de 25 médecins chinois qui vont accompagner cet hôpital aux côtés des congolais. Il se posait un petit problème concernant la langue, mais à la demande de la partie congolaise, les autorités chinoises s'arrangent à faire que les coopérants qui viennent au Congo aient une certaine connaissance du français. N'oublions pas par ailleurs que nous avons depuis les années 1970 des Congolais formés en Chine qui arrivent au pays et intègrent le système de santé.
Un autre volet est celui de la fourniture des services, nous recevons beaucoup de dons en médicaments de la Chine. Sans oublier que de plus en plus des partenaires chinois s'installent en privé au Congo avec des cabinets de soins infirmiers ou d'acuponcture et qui offrent des services aux patients congolais. Même si nous constatons que des gens s'installent parfois illégalement en se présentant comme chinois alors qu'ils ne le sont pas, nous y prenons garde. Des Chinois réellement diplômés des écoles de santé ou ayant des compétences reconnues en soins modernes ou traditionnels viennent de plus en plus au Congo et le ministère les accompagne.
Xinhua : Qu'est-ce qui peut encore être amélioré dans cette coopération vieille déjà de 50 ans ? Nous savons par exemple que la formation des ressources humaines est un défi important pour le système de santé au Congo.
M. Dokekias: Justement, dans toute coopération il y a toujours lieu d'évaluer ce qui a été fait et d'améliorer. C'est la raison d'être des commissions mixtes. J'ai tantôt parlé du problème de langue qui a trouvé sa solution. Et, évidemment nous connaissons des difficultés de ressources humaines. Nous sommes 4 millions d'habitants et chaque année notre école de médecine produit 30 médecins, les écoles paramédicales forment des ressources humaines dont le niveau n' est pas satisfaisant actuellement, il faut corriger tout cela. Le ministère de la santé a pris des dispositions depuis trois ans pour faire former des médecins spécialisés au Cuba, au Maroc, au Sénégal et en France. Cependant, il faut envisager de renforcer ce côté-là aussi avec la Chine par rapport à nos besoins. Que cela soit en formation de base pour les jeunes bacheliers qui peuvent aller faire sept années d' études de médecine générale ou des généralistes qui peuvent accéder à des formations spécialisées et d' autres qui travaillent comme instrumentistes, ingénieurs et techniciens biomédicaux pour maintenir le matériel, des pharmaciens, réanimateurs, dentistes, etc. Cette question concerne plusieurs départements ministériels, mais nous devons la regarder avec la coopération chinoise aussi.
Xinhua : Quel est donc votre dernier mot sur cette coopération médicale entre la Chine et le Congo?
M. Dokekias: Personnellement, en tant que technicien de santé et universitaire, je suis satisfait de cette coopération. C'est l'une des coopérations exemplaire, pratique et pragmatique qui se fait sur la base de la compréhension mutuelle, mais elle doit être renforcée.