La charge est particulièrement rude : « Quand bien même on était habitué aux montages et mensonges grotesques du régime de Bujumbura, lorsque ceux-ci sont repris en refrain par une haute instance onusienne, cela ne peut qu'en rajouter aux inquiétudes et peurs des uns et des autres » s’insurge Agathon Rwasa au nom des Forces Nationales de Libération, le principal parti de l'opposition. Ces propos sont dans une lettre adressée ce 23 janvier à la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies au Burundi, la Suédoise Karin Landgren.
Pour comprendre cette affaire, retournons quelques jours après les communales de 2010. Les partis d'opposition contestent vivement le scrutin, « entaché de fraudes massives » selon les leaders de onze formations qui forment alors une coalition, l'ADC Ikibiri. Quelques mois après, les leaders de l'opposition quittent un à un le Burundi, accusant le Conseil National pour la Défense de la Démocratie (Cndd-Fdd, au pouvoir) de vouloir attenter à leur vie.
Fin 2011, les plus en vue des leaders de l'ADC Ikibiri se retrouvent cités dans un rapport présenté en décembre 2011 au Conseil de sécurité des Nations unies. Ils y sont décrits comme les leaders d'une rébellion burundaise naissante, dont les bases arrières se situeraient dans le Sud-Kivu, en République démocratique du Congo voisine. Il s'agit d'Agathon Rwasa à la tête du Front National de Libération (crédité de 14% aux communales) et Alexis Sinduhije, président du Mouvement pour la Solidarité Nationale (7%). « Même si elles n’ont pas encore communiqué l’identité ni la structure qu’elles auront officiellement, les FNL bénéficient de l’appui politique, matériel et financier de responsables politiques appartenant à l’Alliance démocratique pour le changement-Ikibiri », notent les sept membres du Groupe d'experts.
Les accusations me concernant sont « sans fondement » s’insurge Agathon Rwasadans sa lettre à la diplomate onusienne Même dénégation de la part d’Alexis Sinduhije : « Je n'ai aucunement l'intention de recourir à la lutte armée ».
La Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies au Burundi a réagi en ses termes : « Bien que travaillant sous couvert d'un mandat du Conseil de sécurité, le groupe d'experts mène ses investigations en toute indépendance ! » Karin Landgren a néanmoins promis de transmettre la lettre au Groupe d'experts et aux membres du Conseil de sécurité.