Desmond Tutu vacciné, vaccinations à grande échelle en Afrique du Sud

Afriquinfos
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Enroulé dans un gros gilet, il fait un signe en sortant d’un hôpital du Cap. A 90 ans, le prix Nobel de la paix, Desmond Tutu, fait partie des publics prioritaires pour les vaccinations anti-Covid à grande échelle, lancées lundi en Afrique du Sud.

Dès le matin dans certains centres de vaccination du pays, les salles d’attente commençaient à se remplir. Visant en priorité les plus de 60 ans et les personnes présentant des comorbidités, les autorités prévoient de vacciner 16,6 millions de personnes en six mois, dont environ cinq millions de plus de 60 ans d’ici fin juin.

Au centre de l’hôpital de Germiston, près de Johannesburg, Asha Naran, une retraitée de 61 ans, confie à l’AFP être soulagée de recevoir enfin le vaccin. « Partout ailleurs les gens se font vacciner« , dit-elle.

Pays africain officiellement le plus touché par la pandémie avec plus de 1,6 million de contaminations dont 55.210 décès, l’Afrique du Sud n’a vacciné que 1% de sa population jusqu’ici, lors d’une première phase d’essais cliniques auprès des personnels de santé, plusieurs fois suspendue.

En février, le vaccin du laboratoire anglo-suédois AstraZeneca a été écarté après des doutes sur son efficacité contre le variant local. L’Afrique du Sud a décidé de revendre ses doses à d’autres pays africains. Le vaccin américain Johnson & Johnson a ensuite été suspendu mi-avril, après des cas de caillots sanguins aux Etats-Unis.

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A la traîne dans la course mondiale à l’acquisition des précieux vaccins, le gouvernement sud-africain affirme avoir désormais acheté assez de doses pour au moins 45 millions des quelque 59 millions d’habitants. Soit suffisamment pour atteindre l’immunité collective.

Les objectifs seront atteints si les commandes de vaccins sont livrées à temps, a assuré le ministre de la Santé, Zweli Mkhize, ajoutant qu' »il nous faudra jusqu’à la première partie de 2022 pour terminer les vaccinations« .

Les autorités attendent dans les prochaines semaines la livraison de 4,5 millions de doses du vaccin américain Pfizer et deux millions de doses de celui de Johnson & Johnson.

– « Apartheid vaccinal » –

Le retard accumulé par la puissance africaine, quand l’Union européenne ou les Etats-Unis promettent de vacciner une vaste majorité de leur population d’ici l’été, est en partie responsable de la récente remontée des contaminations dans le pays, selon certains spécialistes.

« Si les vaccins avaient été distribués beaucoup plus tôt, ça aurait aidé« , même si d’autres facteurs comme l’abandon des gestes barrières sont aussi en cause, estime Nombulelo Magula, spécialiste en médecine interne et membre du Conseil scientifique auprès du ministère de la Santé.

La semaine dernière, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a dénoncé un « apartheid vaccinal« , déplorant « une situation dans laquelle les pays riches vaccinent alors que des millions de personnes dans les pays plus pauvres meurent dans la file d’attente ».

L’Afrique du Sud et l’Inde sont à la tête d’une campagne visant à renoncer aux droits de propriété intellectuelle sur les vaccins contre le Covid-19, afin que chaque pays puisse produire des doses.

Entre la dernière semaine d’avril et la première de mai, les contaminations en Afrique du Sud, déjà durement touchée par une deuxième vague fin 2020, ont augmenté de 46%. La mortalité a elle enflé de plus de 18%, selon le ministère de la Santé.

« Le pays n’a pas encore atteint le seuil de résurgence, bien que certaines provinces du pays s’en approchent rapidement« , ont mis en garde les autorités la semaine dernière.

Le Covid-19 a fait officiellement au moins 3,3 millions de morts dans le monde depuis décembre 2019. Inquiète de la progression inégale des campagnes de vaccination, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) craint que la deuxième année de la pandémie ne soit « beaucoup plus mortelle » que la première.