Afrique du sud/Remise en prison du célèbre criminel Thabo Bester: Un nouveau feuilleton judiciaire s’ouvre le 1er mai

Afriquinfos Editeur
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La médecin Nandipha Magudumana (c), compagne du fugitif Thabo Bester, au tribunal de Bloemfontein, le 13 avril 2023 en Afrique du Sud.

Il s’était évadé en laissant un cadavre calciné dans sa cellule pour faire croire à sa propre mort: le meurtrier et violeur sud-africain Thabo Bester a été rattrapé et remis en prison ce 27 avril, mais l’affaire rocambolesque reste embarrassante pour les autorités.

Pourquoi les services pénitentiaires ont-ils mis plusieurs heures avant d’intervenir le jour de l’évasion? Comment la police n’avait-elle pas l’ADN du violeur au moment de l’identification des restes carbonisés? Pourquoi le public n’a-t-il pas été informé qu’un criminel en série était dans la nature?

A cette batterie de questions d’une commission parlementaire se penchant sur l’affaire jeudi, responsables de la police et des prisons ont pâlement répondu. La série de défaillances dans l’affaire qui tient le pays en haleine depuis plusieurs semaines est un concentré des maux du pays: criminalité affolante, enquête bâclée, police impuissante.

« L’enquête a pris pas mal de temps », a expliqué un policier. « Nous ne connaissons toujours pas l’identité de la personne décédée dont le corps calciné a été retrouvé dans la cellule », a reconnu un autre. L’annonce de l’évasion a été « lamentablement tardive », a reconnu l’ancien juge chargé à l’époque d’inspecter les services pénitentiaires, Edwin Cameron.

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– Surveillance maximale –

En mai 2022, un corps d’homme carbonisé est trouvé dans la cellule de Thabo Bester à Bloemfontein (centre). Surnommé « le violeur Facebook » car il attirait la plupart de ses victimes en se faisant passer pour un recruteur de mannequins sur ce site, il avait été condamné en 2012 à la prison à vie pour meurtre et viols. Dans un premier temps, les autorités pénitentiaires croient qu’il s’est immolé par le feu. En réalité, le détenu trentenaire s’est fait la malle, dans des circonstances qui restent à éclaircir. Fin mars, soit près d’un an après l’évasion, la police révèle que selon des tests ADN, la dépouille dans sa cellule n’est pas la sienne.

Samedi dernier, le gouvernement sud-africain a annoncé que le criminel en fuite avait été interpellé dans la région d’Arusha (Tanzanie), près de la frontière kényane, alors qu’il tentait de quitter le pays avec sa compagne sud-africaine et un complice mozambicain.

Ils détenaient chacun plusieurs passeports, a précisé jeudi le ministre de la Police, Bheki Cele, lors d’un point-presse. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le couple extradé est arrivé dans un aéroport des environs de Johannesburg. Thabo Bester a été « réincarcéré » dans une prison à sécurité maximale de Pretoria où il sera surveillé « 24 h/24 et 7 jours/7 », selon un responsable pénitentiaire. Il doit être entendu par la justice. Sa compagne, Nandipha Magudumana, a été présentée au tribunal dans l’après-midi. Sous une capuche et le visage derrière un masque, elle ne s’est pas exprimée. Elle doit se représenter lundi 1er mai.

– « Froid dans le dos » –

Mercredi dernier, le porte-parole du Président Cyril Ramaphosa a affirmé que le chef de l’Etat était « troublé » par les dysfonctionnements en série autour de cette évasion. Quatre personnes ont été arrêtées dont le père de la compagne de Bester. Il a été inculpé en début de semaine pour meurtre, en lien avec les restes retrouvés dans la cellule.

Des doutes sur la mort de Bester avaient été émis pour la première fois en novembre 2022 par le média local « GroundUp« . Témoignages et photos laissaient penser qu’il était bien vivant. La police n’a ouvert une nouvelle enquête pour meurtre que le mois dernier après qu’une autopsie a révélé que l’homme mort trouvé dans la cellule de Bester avait succombé à un traumatisme crânien avant d’être brûlé.

« Cette histoire ressemble à un film et fait froid dans le dos », avait réagi Bafana Khumalo, co-directrice d’une association féministe. Elle « témoigne de l’incompétence de l’Administration pénitentiaire et de la corruption endémique de ce secteur », a dénoncé de son côté l’EFF, parti radical d’opposition.