Ramadan : « Dé-jeûner » est un pari risqué

ecapital
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Durant le mois du Ramadan, quelque chose d’aussi banal que manger un sandwich peut devenir acte de subversion. Malgré la très large application de la tradition musulmane par les croyants à travers le monde, certains refusent de se plier au jeûne pour diverses raisons, de la prise de position religieuse à l’incompatibilité technique avec le travail. Mais cette décision n’est pas toujours facile à assumer.

Dans les pays du Maghreb, la brûlante polémique reprend tous les ans là où elle s’était arrêtée, entre fervents dogmatiques et dé-jeûneurs. Au Maroc, en protestation contre l’article 222 du Code Pénal, certains esprits hardis organisent des pique-niques en plein jour, suscitant l’indignation, mais la plupart de ceux qui ne respectent pas le jeûne mangent en cachette, peu désireux d’attirer l’attention.

En Tunisie, le prédicateur Adel Almi a provoqué critiques et moqueries en clamant « les non-jeûneurs seront photographiés et décriés » ; selon lui, ces personnes « se rendent coupables d’une infraction à la loi et doivent être punis ». En un rien de temps, les réseaux sociaux ont vu se multiplier des réponses bravaches comme des photos d’internautes en train de se gaver goulûment ou encore une liste des cafés et restaurants ouverts en journée pendant tout le mois de Ramadan.

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Le problème prend une autre tournure quand, comme en Algérie, un plan répressif est méthodiquement mis en place pour arrêter et punir les « hérétiques » du Ramadan. Le régime algérien, en effet, a mis sur pied une brigade spéciale chargée de traquer ceux qui feraient acte de rébellion en mangeant en plein jour, en Kalybie. Les villages de Bgayet, Tizi Wezzu et Tubirett ont déjà été choisis comme cibles privilégiées. Chaque année, des jeunes sont traînés en justice pour « dénigrement et non-respect des préceptes de l’islam ».

Cependant, même dans les pays comme la France où aucune loi ne sanctionne le non-respect du Ramadan, les croyants sont assez réticents à afficher au grand jour leur choix de ne pas jeûner, alors que c’est le cas d’un tiers d’entre eux environ. Cela tient donc beaucoup à la tradition très ancrée dans la culture musulmane et qui pèse lourd sur les dé-jeûneurs, comme l’analyse Haoues Seniguer, politologue et spécialiste de l’islam. Il précise même que, alors que des dérogations sont prévues par les dogmes eux-mêmes pour les femmes enceintes, les vieillards, les malades ou les enfants, beaucoup d’entre eux se cachent pour manger.