Crise de la CEDEAO : après George Weah, Kako Nubukpo propose des solutions médianes

Afriquinfos Editeur
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Crise de la CEDEAO

Crise de la CEDEAO | La zone CEDEAO est en effervescence depuis quelques jours après les tweets cinglants du président nigérian, Muhammadu Buhari fustigeant, le processus d’adoption unilatérale de l’ECO par les pays membres de l’UEMOA. L’économiste togolais, Kako Nubukpo a été l’un des premiers à saluer l’annonce faite en décembre dernier, par les président Macron et Ouattara. Quelques mois plus tard et face au risque de dislocation de la CEDEAO brandi par le n°1 nigérian, le doyen de la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Lomé est moins enthousiaste et espère qu’un débat sera ouvert à ce sujet.

Kaka Nubukpo reconnait n’avoir pas tous les éléments en sa possession quand, en décembre dernier, il se félicitait de l’annonce conjointe des présidents ivoirien et français sur le changement du FCFA en ECO : « J’ai applaudi quand les présidents Macron et Ouattara ont annoncé, le 21 décembre dernier, le changement de nom du franc CFA en eco. A cette époque, nous n’avions pas encore le projet de loi qui modifie le Traité de l’union monétaire ouest-africaine. Finalement, ce projet a été adopté par le gouvernement français fin mai et il est actuellement en discussion à l’Assemblée nationale française ainsi que dans les Assemblées nationales des pays membres de l’UMOA. A la lecture de ce projet de loi, on s’aperçoit que les changements sont limités au nom de la monnaie, à la fermeture du compte d’opération et au retrait des ressortissants français des instances de l’UMOA » écrit l’économiste. Aussi comprend-t-il le coup de sang du président nigérian car explique-t-il « l’Eco est une monnaie destinée à 15 Etats, il ne s’agit plus d’une monnaie du Trésor français avec l’UEMOA. Il faut donc clarifier les contours de cette monnaie de la CEDEAO, dont les principes ont été rappelés le 29 juin 2019 lors du Sommet des chefs d’Etat. L’eco est une monnaie flexible, attachée à un panier de devises, avec un régime de ciblage de l’inflation alors qu’aujourd’hui, on voudrait nous faire adopter une version différente selon laquelle l’Eco serait toujours attaché exclusivement à l’Euro »  regrette Kako Nubukpo.  

L’économiste togolaise souhaite donc qu’un débat soit ouvert au niveau des chefs d’Etat, des parlementaires, des chercheurs, de la société civile ouest-africaine et africaine dans son ensemble, concernant les modalités d’une mise en place optimale de cette monnaie […] Il est également légitime qu’il y ait un débat entre économistes pour savoir si la CEDEAO peut devenir une zone monétaire optimale. L’ancien Ministre togolais de la Prospective qui annonce la tenue prochaine à Lomé des Etats généraux de l’Eco pour poser le débat met face à face deux écoles: celle « héritière du prix Nobel d’économie Robert Mundell, plutôt pessimiste, considère qu’une monnaie commune dans la zone CEDEAO n’est pas possible, car certains pays comme le Nigéria sont plutôt exportateurs de pétrole et les autres importateurs de pétrole. De fait, ils sont rarement dans la même phase du cycle économique, ce qui rend difficile l’efficacité de la politique monétaire » et celle de « l’endogénéité des critères d’optimalité, considère au contraire, que ce décalage permet de garantir la disponibilité permanente des réserves de change, car les cycles haussiers et baissiers se compensent ».

Au-delà de ce débat, Kako Nubukpo estime que tous les acteurs impliqués dans le processus d’adoption de la monnaie unique de la CEDEAO font face à un « double test. Au niveau de la France, il s’agit de mesurer sa volonté de tourner la page de la Françafrique et d’établir les bases d’une véritable politique de coopération au développement. C’est ce que j’appelle « le test de sincérité ». Au niveau des chefs d’Etat ouest-africains se présente le « test de crédibilité », quant à leurs capacités en matière d’action collective pour la mise en place d’une nouvelle monnaie, capable de financer nos économies et de supporter la compétitivité à l’export de nos biens et services. »

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Boniface T.