Faure G. et A. Condé : deux Présidents en exercice de la CEDEAO et de l’UA très contestés en interne

Afriquinfos
6 Min de Lecture
Faure G. & A. CONDE (DR)

CONAKRY (© 2017 Afriquinfos) – COMMENTAIRE– 

Présidents en exercice respectivement de la CEDEAO et de l’UA, Faure E. Gnassingbé et Alpha Condé sont depuis plusieurs semaines hyper contestés en interne dans chacun de leur pays. Une donne qui ne les aide pas à accomplir avec efficacité leurs missions à la tête de ces organisations régionale et panafricaine.

 

 

- Advertisement -

Doyen des Chefs d’Etat en fonction en Afrique de l’ouest, Faure E. Kodjo Gnassingbé a été rattrapé depuis le 19 août 2017 par la vague des réformes politiques et institutionnelles que lui recommandaient l’APG (Accord le plus consensuel entre politiques togolais, signé en août 2006). Une opposition mordante et hyper éveillée qui campe dans les rues et est ferme dans ses revendications. Cette donne tranche singulièrement avec l’attitude impavide et impassible du pouvoir togolais face à son opposition depuis plus de 10 ans, malgré les multiples rappels à l’ordre de la communauté internationale. Aux commandes de la CEDEAO jusqu’en juin 2018, Faure Gnassingbé, en complicité avec son beau-frère Marcel Aimé de Souza (Président de la Commission de la CEDEAO), avait arrêté l’organisation d’un certain nombre d’activités diplomatiques (sommets, rencontres, colloques, etc.) dans le cadre de la présidence tournante qu’il assume à la tête de l’organisation régionale. Toutes choses qu’il a été obligé de mettre en stand-by, vu l’ampleur et la profondeur de la crise des réformes qui secoue son pouvoir, et qui compromettent la mise en pratique des projections de son entourage de lui faire accorder via des urnes deux nouveaux quinquennats.

Elu en 2005, réélu en 2010 et en 2015 au terme de scrutins présidentiels meurtrier (en 2005) et émaillés de nombreuses irrégularités (en 2010 et en 2015), Faure Kodjo Gnassingbé traverse à l’heure actuelle sa plus pernicieuse crise politique à l’issue incertaine. Président en exercice de la CEDEAO, F. Gnassingbé assume les mêmes charges au faîte de l’UEMOA (qui regroupe 8 Etats ouest-africains). Deux organisations qui devront être « orphelines » jusqu’à un règlement consensuel, durable et apaisé de la contestation populaire qui ébranle son pouvoir hérité des 38 ans de gouvernance de son père Etienne Eyadèma Gnassingbé.

 

Quand Condé rejoint Gnassingbé  

 Alpha Condé a la particularité d’avoir accédé au pouvoir quand Faure Gnassingbé entamait son deuxième quinquennat, en 2010. Elu dans des conditions qui demeurent contestables et contestées (au regard de la grande longueur d’avance de voix qu’avait sur lui son rival Cellou Dalein Diallo au 1er tour) ; réélu dans un contexte de «massives fraudes institutionnelles» dénoncées par le même opposant en 2015, Alpha Condé avait pourtant fait amende honorable fin 2016. En tentant un rapprochement salvateur, conciliateur et humble avec son principal opposant Diallo. Une posture saluée à l’international comme dans toute la Guinée. Ce geste de ce politique natif de Boké (Basse Guinée) était le point d’orgue de 04 accords signés depuis 2013 avec l’opposition guinéenne, et censés accélérer l’ancrage démocratique dans ce potentiel riche Etat d’Afrique occidentale.

Malheureusement, très peu de concessions palpables et pratiques accompagneront cet état d’esprit du leader guinéen ! Tout comme au sujet de l’impunité criarde dont jouissent plusieurs présumés auteurs des violences historiques du 28 septembre 2009, ou encore ceux de la centaine de morts civiles durant diverses manifestations publiques en Guinée, depuis l’accession au pouvoir de celui que ses concitoyens appellent «Professeur». Le tout est saupoudré par l’état du panier de la ménagère qui a toutes les difficultés du monde pour se remplir sous Condé, en dépit des énormissimes potentialités agricoles et forestières dont dispose la Guinée, château d’eau d’Afrique de l’ouest.

Autant de chantiers politiques et sociaux restés en friches, et qui justifient le retour, ces dernières semaines, en masse et de façon cyclique des militants et sympathisants des principaux partis d’opposition dans les rues guinéennes, et principalement à Conakry. Dans un pareil contexte, difficile de dérouler l’ambitieux et panafricain programme que s’est donné le «Professeur» Condé en prenant la présidence tournante de l’UA… Même si contrairement à F. Gnassingbé, A. Condé continue d’effectuer des voyages avec le manteau de patron de l’UA, sa disponibilité à abriter diverses rencontres de haut niveau consacrées aux «réflexions sur le devenir de l’UA» a pris un grand coup, depuis le renouveau des marches de contestation de son pouvoir à Conakry ces trois derniers mois.

A Faure et à Alpha Condé de redresser à temps la barre… Le premier s’accroche toujours à l’idée de briguer un nouveau mandat en 2020, en dépit du contexte politique abrasif de l’heure sur sa terre natale. Le second n’aura pas d’autre choix que de s’éclipser à la fin de son deuxième mandat en cours, et tirer définitivement un trait rouge sur les velléités de modification constitutionnelle pour être à nouveau candidat en 2020.

 

Par Komlan AWUKU