Burkina Faso : une trentaine de ministres devant la Haute Cour

Afriquinfos
4 Min de Lecture

Ouagadougou (© Afriquinfos 2017)-L’ex-Premier ministre burkinabè Luc Aldophe Tiao et 34 de ses ministres, dont l’ex-président Blaise Compaoré, sont cités à comparaître devant la Haute cour de justice jeudi pour un procès spectaculaire sur la répression de l’insurrection de 2014 ayant conduit à la chute du régime.

Resté 27 ans au pouvoir,  M. Compaoré est cité à comparaitre non en tant que président mais en tant que ministre la Défense, portefeuille sur lequel il gardait la haute main. Il ne sera pas dans le box des accusés puisqu’il vit en exil à Abidjan depuis qu’il a laissé le pouvoir. Son avocat français, Pierre Olivier Sur, sera à Ouagadougou pour le défendre.

Les ministres sont poursuivis pour “complicité d’homicide volontaire et blessures volontaires” pour avoir participé “au Conseil extraordinaire des ministres du 29 octobre 2014 au cours duquel ils ont décidé de (faire appel à) l’armée pour réprimer les manifestants” contre la modification de la Constitution qui devait permettre à Compaoré de briguer un nouveau mandat.

“Le Premier ministre, en signant la réquisition spéciale a fourni aux forces de défense et de sécurité les instruments et moyens qui leur ont permis de tirer à balles réelles sur des manifestants, occasionnant des coups et blessures sur 88 d’entre eux et sept décès”, souligne l’ordonnance de renvoi.

- Advertisement -

Clothilde Ky, ministre déléguée au Budget, et Yacouba Ouédraogo, ministre des Sport, qui n’avaient pas participé à ce Conseil des ministres, sont les seuls à échapper aux poursuites.

Tous les autres ministres ont été inculpés mais bénéficient de liberté provisoire avec interdiction de quitter le pays à l’exception notable de Djibril Bassolé, ancien ministre des Affaires étrangères, écroué dans le cadre du putsch raté de septembre 2015. Ses proches estiment son incarcération injustifiée et demandent son hospitalisation. Sa présence est attendue.

Tous les accusés risquent la peine de mort au terme de ce procès qui est censé durer huit jours.

Après 27 ans au pouvoir, Blaise Compaoré avait tenté de modifier la Constitution en 2013 pour briguer un cinquième mandat. Cette tentative avait marqué le début du soulèvement populaire, fatal à son régime. Au total, 33 personnes ont été tuées lors de ces manifestations, selon des sources officielles même si le procès ne concerne que 7 décès.

“Ce que nous espérons (du procès), c’est la vérité et la justice (…), pour que le peuple burkinabè puisse repartir sur la bonne voie”, a déclaré avant le procès le porte-parole de l’Union des familles de l’insurrection populaire Nébon Bamouni.

Dans un communiqué, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, le parti de Compaoré) a dénoncé ces poursuites, parlant de “violation manifeste de l’Etat de droit” et “d’instrumentalisation de nos institutions à des fins de règlement de comptes politiques”.

“Nous ne nous faisons pas d’illusions. Les dés sont jetés”, a estimé le parti, accusant le pouvoir de livrer une “chasse aux sorcières” contre les “anciens ministres pourchassés par la vindicte du régime” actuel.

La Haute Cour de justice est présidée par une magistrate de grade exceptionnel, Elisabeth Bado-Somé, depuis sa réactivation en 2015.

I.N