Au Rwanda, des stades remplis d’habitants pris hors-jeu contre le Covid

Au Rwanda, les autorités ont imposé des mesures drastiques pour enrayer, avec succès, la propagation du Covid-19, allant jusqu’à parquer dans des stades les récalcitrants du masque ou les transgresseurs de couvre-feu, afin de leur inculquer pendant plusieurs heures et en plein air les gestes qui sauvent.

Jour et nuit, les policiers patrouillent les rues et appréhendent quiconque ne porte pas de masque ou déambule après 21H00, début du couvre-feu.

Ainsi, depuis mi-juillet, quelque 70.000 personnes ont été arrêtées et conduites dans un stade ou un centre de détention, selon les chiffres officiels. Vendredi dernier, jour férié au Rwanda, pas moins de 2.000 habitants ont été priés d’accompagner les forces de l’ordre, direction le stade le plus proche.

« J’étais dans le magasin où je travaille, mon masque sur le menton et c’est là qu’ils (les policiers) m’ont trouvé et m’ont dit: ‘Tu ne portes pas ton masque correctement’. Ils m’ont dit qu’ils allaient m’emmener dans un endroit pour m’apprendre comment porter le masque« , a raconté à l’AFP Jado fils Nizeyimana.

« A partir de maintenant, je le porterai où que je me trouve« , promet ce commerçant de Kigali.

Ainsi, chaque nuit, des centaines de personnes se retrouvent dans des stades, dont le stade national Amahoro, gardés par des policiers armés.

Assis sur les gradins à plus d’un mètre les uns des autres, avec interdiction de bouger, dans la fraicheur nocturne, les punis du Covid doivent écouter des messages de prévention jusqu’à l’aube, avant d’être relâchés avec ordre de se placer en autoconfinement.

Dans le stade, des enceintes martèlent les règles de prévention et les enjoignent de devenir des ambassadeurs de la lutte contre le nouveau coronavirus.

La presse est régulièrement conviée à filmer et interroger ces détenus d’un jour, des images qui passent sur les médias publics dans le but de dissuader le reste de la population de badiner avec les gestes barrières.

2.000 cas de Covid-19

Dans certains cas, le choix est donné de passer une nuit au stade ou de payer une forte amende de quelque 25.000 francs rwandais pour un particulier (environ 22 euros), dans un pays où un serveur gagne entre 50 et 100 euros par mois.

« J’ai été arrêté deux fois et j’ai passé la nuit au stade en ces deux occasions. La première fois, j’ai été attrapé après le couvre-feu et la seconde fois aussi d’ailleurs. L’alternative, c’était de payer une lourde amende mais je n’ai pas d’argent, je cherche un boulot« , témoigne Elly Niganze, 25 ans.

Selon la police, ces arrestations jouent un rôle crucial dans la capacité du pays à juguler l’épidémie.

De fait, le Rwanda, dont la population dépasse les 12,5 millions d’habitants selon les estimations, totalise un peu plus de 2.000 cas seulement, dont moins de 900 actifs et cinq décès, tout en dépassant la barre des 280.000 tests, un ratio qui place le pays parmi les bons élèves de la lutte sur le continent.

« Nous continuons de trouver de nombreuses personnes qui transgressent les règles, tout le temps. C’est comme si certains faisaient exprès, pour décourager la police. Je peux vous dire que ça n’arrivera pas« , a averti devant la presse le porte-parole de la police, John Bosco Kabera.

« Nous avons commencé à entrer en contact avec les institutions et les employeurs des personnes qui ont été arrêtées pour prendre des mesures et s’assurer que celles-ci soient en auto-isolement lorsqu’elles sont relâchées« , a-t-il poursuivi.

Mais ceux qui se retrouvent dans les stades font, paradoxalement, partie des chanceux.

D’autres ont connu des périodes de détention plus longues et sont menacés de poursuites pour « rébellion contre les autorités« , passible d’un an de prison au Rwanda.

La plupart d’entre eux sont des journalistes et des blogueurs qui ont tenté d’enquêter sur tel ou tel aspect de l’épidémie dans le pays.

Ainsi, Dieudonné Niyonsenga, un blogueur en vue, a été arrêté en avril, alors qu’il tentait de documenter les effets de l’épidémie dans les couches les plus pauvres de la population.

Avant son arrestation, il avait travaillé sur des allégations de viols qui auraient été commis par des soldats chargés de faire respecter le couvre-feu. Il est désormais poursuivi pour usurpation d’identité, fraude et rébellion.

L’organisation de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a demandé aux autorités rwandaises « de mettre un terme aux détentions arbitraires, y compris des journalistes et blogueurs qui tentent de mettre au jour des abus« .

HRW a également appelé les autorités à enquêter sur « les allégations de meurtres, viols et autres crimes sérieux pesant sur les forces de sécurité pendant le confinement« .

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