Fin du 18e sommet de l’UA sur un air de malaise et un autre cycle d’engagements

ecapital
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Grand moment du sommet tenu à Addis Abeba en Ethiopie comme le veut la coutume pour le premier sommet annuel, le renouvellement du mandat du président de la Commission de l'organisation n'a pu ni réélire le sortant Jean Ping, ni confier la charge à la Sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, en l'absence de la majorité des 36 voix requise pour l'un et l'autre candidat.

Même le désistement, conformément aux statuts de l'UA, de la ministre sud-africaine de l'Intérieur et ex-épouse du président Jacob Zuma n'a pas permis de dégager une légitimité électorale en faveur de son adversaire gabonais, qui a pourtant dominé, mais de courte tête, les trois tours de vote préliminaires par 28-25, 27-26, 29-24 avant d'arriver à 32 voix au quatrième round où il était resté seul en lice, mais coïncé par le choix de bulletins blancs de 21 votants.

Moins le Maroc, retiré sur un coup de colère par protestation de l'admission de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) au sein de l'organisation continentale en 1982, et ensuite Madagascar, suspendu suite au "changement anticonstitutionnel" d'Ange Rajoelina, 53 pays sur 55 prenaient part au scrutin à vote secret.

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Plus d'une vingtaine de chefs d'Etat ont honoré le rendez-vous placé sous le thème "stimuler le commerce intra-africain", accompagnés d'un vice-président (du Burundi), de Premiers ministres et de ministres des Affaires étrangères.

Partagées par des intérêts divers, ces personnalités ont finalement reconduit pour une transition de 6 mois, jusqu'au prochain sommet de l'UA en juin-juillet à Lilongwe au Malawi qui organisera de nouvelles élections, Jean Ping et les autres responsables (le vice-président et les 8 commissaires) qui n'ont pas pu non plus faire renouveler leurs mandats.

Pour cette situation inédite (en l'occurrence Jean Ping par exemple ayant été élu sans peine dès le premier tour en 2008 pour son premier mandat de quatre ans), perçue par les observateurs comme un signe de divisions accentuées et d'affaiblissement de leur organisation, les dirigeants africains se défendent quant à eux d'une démonstration de leur esprit démocratique exprimé lors du vote sans résultat positif.

"Il s'agit d'une Afrique, il s'agit d'un continent qui a décidé de se faire prendre au sérieux et de renforcer l'unité du continent. Les deux premiers votes, il n'y a pas eu de bulletins blancs. Moi, j'ai commencé par me donner cette assurance", a déclaré lor d'une conférence de presse à la clôture du sommet, le nouveau président en exercice de l'UA, le chef de l'Etat béninois Thomas Yayi Boni.

Un comité ad hoc dit des sages, composé de 8 chefs d'Etat dont 5 représentant chacune des régions africaines en plus des présidents gabonais, sud-africain et béninois, en sa qualité pour ce dernier de président en exercice pour 2012 de l'organisation panafricaine, a été constitué pour se pencher dès mars sur les modalités de l'élection, en vue de sortir de l'impasse, a-t-il assuré.

"Nous avons placé ce sommet sous un double signe, d'abord sous le signe de la stabilité, la paix, la sécurité de notre cher continent (…) En seconde posistion, nous l'avons placé également sous le signe de la nécessaire renaissance, de relance économique de notre cher continent", a-t-il préalablement souligné.

Selon lui, le sommet de deux jours, précédé samedi par l'inauguration du nouveau siège de l'UA célébré par tous comme "un magnifique cadeau de la Chine à l'Afrique" et un témoignage du renforcement du partenariat stratégique entre les deux parties, a débattu de sujets tels que les foyers de tension observés sur le continent : Somalie, Soudan, Libye, bande sahélo-sahélienne, Ethiopie-Kenya, etc.

"C'est un point, a-t-il expliqué se voulant rassurant sur le ciel brumeux soudainement apparu au-delà de l'Afrique après les crises ivoirienne et libyenne en 2010 et 2011 où elle n'avait pas réussi à parler d'une seule voix face aux puissances américaines et européennes, qui a pris beaucoup de temps et les échanges fructueux que nous avons eus nous ont permis d'arrêter un certain nombre de dispositions pour que nous fassions tout pour que la paix revienne dans (ces) partie(s) du continent".

Sur la Libye en particulier, un des miroirs du "printemps arabe" encore sous tension, "c'est avec bonheur, a-t-il dit, que nous avons reçu ici la participation des nouvelles autorités de la Libye (…) A ce niveau, nous avons mis en relief la nécessité pour ce pays d'aller à la stabilité et à un dialogue politique avec toutes les sensibilités de ce pays pour que la paix revienne et que la Libye retrouve le chemin du développement".

Cette question, a poursuivi le dirigeant béninois, a amené à examiner les conséquences orchestrées par la crise, concernant "la prolifération des armes, légères, lourdes. Il y en a qui ont même parlé d'armes chimiques", conséquences qui "se sont prolongées sur la bande sahélo-sahélienne, avec des tentatives de déstabilisation de la République fédérale du Nigeria".

Pour Yayi Boni, l'Afrique "n'a jamais connu autant d'insécurité, autant de guerres, des conflits frontaliers, autant de trafic d'armes, trafic de stupéfiants (…) la piraterie sur nos côtes, notamment le golfe de Guinée. Je dis bien autant de défis à relever pour faire de notre continent, un continent sûr dans un monde sûr comme l'a dit le secrétaire général (de l'Onu, ndlr), Ban Ki-moon".

Le chef des Nations Unies était l'un des invités spéciaux du sommet, marqué par ailleurs par la présence du président du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois, Jia Qinglin, qui, venu assister à l'inauguration du nouveau centre de conférences et administratif flambant neuf de l'UA, a assuré les partenaires africains de la fidélité de l'amitié et du soutien sans faille et sans conditionnalités de la Chine.

Premier thème à l'ordre du jour des débats, la réflexion sur la stimulation du commerce intra-africain, le plus faible du monde, établi à 11% contre 72% pour l'Europe et 52% pour l'Asie (d'après les statistiques de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique), a débouché sur des recommandations appelant à oeuvrer pour la mise en place d'une zone de libre-échange continentale à l'horizon 2017.

C'est un vieux débat depuis l'ancêtre de l'UA, à savoir l'Organisation de l'unité africaine (OUA) créée en 1963 au lendemain des indépendances africaines et remplacée en 2002. Pour les jalons de sa concrétisation devant consacrer l'intégration économique du continent, il est préconisé le développement des infrastructures qui implique la mobilisation de plus de 68 milliards USD pour les trois années à venir, à en croire Yayi Boni.

Sur l'accélération de la croissance, le débat également, non guère nouveau, sur les financements innovants de l'économie en plus des mécanismes traditionnels et de l'aide au développement, a été ressorti des tiroirs. Pour cet autre cycle d'engagements, le numéro un béninois a martelé le discours sur "une Afrique d'espérance, d'espoirs et en devenir", déterminée pour son unité et son intégration, économique et humaine.